Confort hygrothermique et acoustique accru en été comme en hiver, consommation énergétique moindre, meilleure tenue de la structure du bâtiment dans le temps… Une façade bien isolée thermiquement ne présente que des avantages. Zoom sur les critères indispensables à intégrer pour y parvenir.
Credit Habitat 76
Depuis 1974, date de la première réglementation thermique, l’isolation des immeubles neufs n’a cessé de s’améliorer. Les bâtis les plus performants construits actuellement sont ainsi dotés d’une véritable seconde peau qui retient la chaleur à l’intérieur des logements, en hiver et l’empêche de rentrer en été. Parallèlement, l’ajout de ventilations mécaniques contrôlées double flux, la limitation des ouvrants orientés plein nord, ou bien encore la présence de stores extérieurs, permettent d’obtenir d’excellents résultats, allant jusqu’à une consommation énergétique nulle pour les immeubles dits «passifs». Une conception aux antipodes de ce qui a été fait durant les Trente Glorieuses, alors que l’énergie était très peu chère et les préoccupations environnementales bien moindres, pour ne pas dire inexistantes. Problème, les immeubles construits durant cette période représentent la majorité du parc français et de très nombreuses copropriétés n’ayant quasiment pas été rénovées depuis, sont aujourd’hui considérées comme de véritables passoires énergétiques, sources d’inconfort pour leurs occupants. En 2008, le niveau moyen de performance énergétique du parc de logements existants avoisinait ainsi les 250 kWhEP/m2 par an. Or, la RT 2012, applicable pour toute demande de permis de construire de logements résidentiels déposée après le 1er janvier 2013, impose un maximum de 50 kWhEP/m2 par an. S’il est irréaliste d’espérer arriver à un tel niveau dans un appartement ancien, il est néanmoins tout à fait possible de réduire sensiblement cette consommation énergétique en effectuant des travaux appropriés, en particulier au niveau de l’isolation extérieure. De tels travaux ne doivent toutefois être engagés que s’ils sont envisagés dans leur globalité et après avoir bien pris en compte le temps de retour, c’est-à-dire la durée d’amortissement de leur coût.
Avantages multiples
Bien qu’onéreuse, l’isolation par l’extérieur des parois opaques reste un incontournable pour une rénovation réussie. En effet, l’isolation par l’intérieur présente plusieurs défauts majeurs. A commencer par le problème des ponts thermiques qui n’est alors pas réglé. Pour rappel, un pont thermique est une zone linéaire qui, dans l’enveloppe d’un bâtiment, présente une diminution de la résistance thermique. Ce phénomène, observé le plus souvent à la jonction du mur extérieur et d’un plancher ou d’une terrasse, entraîne une déperdition thermique loin d’être négligeable. Ainsi, pour un mètre linéaire de pont thermique non traité, la consommation annuelle d’énergie sera d’environ 10 kWh, soit 10 litres de fuel ou encore 5 Kg de rejet de gaz carbonique. Des chiffres qui prennent toute leur signification lorsque l’on sait qu’un bâtiment de cinq étages isolé par l’intérieur compte environ 700 mètres linéaires de ponts thermiques. Soit une consommation annuelle de 7 000 litres de fuel et le rejet de 3,5 tonnes de C02 !
Tout l’enjeu consiste à profiter de l’inertie thermique naturelle que possèdent les murs, particulièrement ceux en béton banché, pour stocker ou restituer de la chaleur en fonction des besoins. Or, l’isolation par l’extérieur permet justement de profiter de cette inertie en laissant les murs échanger des calories avec la pièce intérieure, ce qui est impossible dans le cas d’une isolation par l’intérieur où l’isolant fait écran. De quoi supprimer l’effet «mur chaud» en été et l’effet «paroi froide» en hiver, en évitant les pertes de chaleur à travers les murs, ce qui contribue à diminuer la facture de chauffage. D’autre part, cela évite les gênes liés aux travaux intérieurs et présente l’intérêt de ne pas réduire la surface habitable.
Un bâtiment bien isolé par l’extérieur permet, en outre, de limiter les variations de températures dans le bâti même. La structure bouge donc moins, les mouvements de dilatation sont atténués et, de fait, les risques de fissuration sont moindres. Dans le même ordre d’idée, comme les murs restent chauds en hiver, les risques de condensation sont réduits dans la paroi, évitant ainsi la corrosion des fers présents dans le béton et une dégradation accélérée de l’immeuble.
Photo : Isolation thermique par l’extérieur en polystyrène. Crédit Ecotherm
Seconde peau respirante
Une bonne isolation par l’extérieur passe cependant par une solide connaissance du bâti, faute de quoi le remède risque d’être pire que le mal. Toute intervention peut, en effet, venir perturber l’équilibre hygrothermique des parois, surtout dans les immeubles construits avant 1945, souvent constitués de matériaux laissant circuler l’humidité. Tout en isolant, il convient alors de conserver, autant que faire se peut, le caractère perspirant de la paroi. En clair, ”laisser respirer” les murs plutôt que d’y bloquer l’humidité. Il faut donc choisir de préférence des matériaux isolants hydrorégulateurs, le plus souvent naturels, comme la laine de bois, le chanvre ou le lin, qui absorbent une partie de la vapeur d’eau migrant dans le mur, et éviter le polystyrène qui ne la laisse pas passer. Ces contraintes ne s’appliquent toutefois pas aux immeubles fabriqués en béton ou en parpaings, sachant que chaque construction présente ses propres caractéristiques et qu’une multitude de solutions restent possibles.
Photo : Isolation thermique par l’extérieur en cellulose de ouate - Crédit Habitat 76
Les enduits minces sur isolant, particulièrement répandus, présentent un bon rapport qualité/prix et offrent une grande souplesse dans la finition. Les formulations des enduits ayant beaucoup évolué, avec notamment des textures plus fines, ils s’encrassent bien moins vite et vieillissent donc mieux qu’auparavant. Cela se vérifie d’autant plus lorsque des enduits hydrauliques sont utilisés en finition car ces derniers résistent mieux à la pollution atmosphérique en ville. Les enduits à la chaux sont, eux, particulièrement efficaces pour la rénovation de bâtiments anciens. La chaux est en effet imperméable à la vapeur d’eau qu’elle absorbe, puis rejette rapidement, ce qui permet d’éliminer l’humidité des murs. Cette matière, qui s’adapte aux évolutions du bâtiment, possède également des qualités esthétiques et offre une grande souplesse dans le choix des pigments naturels et des finitions, qu’elles soient écrasée, rustique, talochée ou bien encore grattée.
Les systèmes de fixation par rails ou profilés permettent de fixer dans le temps l’isolant indépendamment de l’état du mur support. Bois, fibres-ciment, résines thermodurcissables, terre cuite… Les solutions disponibles sur le marché sont aujourd’hui conçues pour être posées rapidement et facilement, sous réserve que la façade ne comporte pas de pierres de taille ou de motifs rendant plus complexes une isolation par l’extérieur. Des revêtements en pierre mince associées par collage à un isolant thermique, peuvent également changer radicalement l’allure d’un immeuble, mais le coût reste important.
Photo : Isolation par l’extérieur : coupe - Crédit Saint-Gobain
De l’importance des vitrages
Toutefois s’atteler à isoler les parois opaques, sans tenir compte des menuiseries extérieurs est un non sens. En effet, indépendamment de toute considération de confort, les fenêtres sont une zone de faiblesse pour l’isolation thermique. Car même un triple vitrage présente une résistance thermique quatre fois moindre, dans le meilleur des cas, à un mur isolé. En revanche, les fenêtres permettent de maximiser l’apport solaire et ainsi de réchauffer l’appartement. Voilà pourquoi, dans le neuf, les constructeurs mettent un maximum d’ouvertures au sud et le moins possible, voire pas du tout, au nord. Dans l’ancien, il n’est pas rare d’avoir de nombreuses fenêtres mal orientées. D’où l’importance de limiter les déperditions. Si le triple vitrage représente le nec plus ultra en terme de performances, il reste encore cher et ne présente que peu d’intérêt en rénovation. Le mieux reste d’opter pour du double vitrage à lame d’argon à faible émissivité. La lame d’argon (gaz inerte) situé entre les deux vitres limite ainsi les pertes par conduction, tandis qu’une fine couche métallique invisible du côté intérieur du vitrage réfléchit au maximum des rayonnements infrarouge vers l’intérieur. Au niveau du matériau utilisé pour le cadre, trois possibilités s’offrent aux copropriétaires désireux de remplacer leurs fenêtres vieillissantes : le bois, le PVC et l’aluminium. Si les menuiseries en bois et en PVC possèdent de bonnes performances thermiques, les cadres en aluminium conduisent beaucoup plus la chaleur et sont donc déconseillés. La meilleure solution d’un point de vue écologique reste sans doute les menuiseries ”mixtes” en bois recouvertes d’un habillage en aluminium. Elles disposent ainsi de l’intérêt thermique du bois avec un entretien limitée, l’aluminium étant très peu sensible aux intempéries. Leur inconvénient reste toutefois leur prix souvent élevé.
Avant de procéder à tout changement, les copropriétaires doivent se poser plusieurs questions, à commencer bien sûr par l’état du châssis et du vitrage des menuiseries en place. Ainsi, si les fenêtres disposent déjà d’un double vitrage, même moins performants que les technologies actuelles, et que le châssis est relativement bien conservé, il peut être judicieux de reporter un remplacement ou de procéder à un simple ”rafraichissement”. En revanche, pour des ouvrages plus anciens, surtout s’ils sont en bois, les heures de main d’œuvre nécessaires (décapage, ponçage, remise en peinture) seront bien souvent trop importantes pour être rentable. Le mieux sera alors de tout changer.
La partie fixe de l’ancienne menuiserie, le dormant, peut également être laissé en place mais recouvert par une nouvelle fenêtre, dite de rénovation. Cette solution rapide peut constituer un bon compromis en supprimant tout raccord de maçonnerie. Elle présente néanmoins l’inconvénient de réduire le clair de jour, du fait des montants plus épais, a fortiori pour des ouvertures de petites dimensions.
Il convient également de choisir le facteur solaire des ouvrants en fonction de la présence ou non de systèmes d’occultation et du climat. Pour rappel, le facteur solaire caractérise la capacité d’une fenêtre à transmettre les apports solaires gratuits en chaleur à l’intérieur d’une habitation. Si ces apports sont très bénéfiques en hiver, ils peuvent en revanche provoquer des surchauffes en été. Dans les zones les plus froides, on cherchera ainsi le meilleur facteur solaire possible, contrairement à celles situées dans le sud de la France, surtout lorsqu’aucun système d’occultation extérieur n’est prévu. A noter, de très nombreux constructeurs proposent des ”blocs-baies” intégrant en un seul élément la menuiserie, un volet roulant, son coffre et sa motorisation. ●
Paul TURENNE
Source : RT 2012 et RT Existant / Eyrolles Environnement
Traiter les fissures
Lorsqu’une façade présente des fissures plus ou moins importantes, les revêtements d’imperméabilité, appliqués en plusieurs couches épaisses, permettent aux fissures existantes de résister aux intempéries ou d’éviter l’apparition de nouvelles fissures. Dans le premier cas, il s’agit d’un traitement curatif, alors que dans le second il est préventif. Très perméables à la vapeur d’eau, ces revêtements, gardent toute leur élasticité dans le temps même à basse température et résistent bien à l’encrassement. Le plus souvent à base de résines copolymères acryliques réticulables par UV, ils présentent quatre types différents d’imperméabilité :
• I1 pour des fissures allant jusqu’à 0.2 mm
• I2 pour des fissures allant jusqu’à 0.5 mm
• I3 pour des fissures allant jusqu’à 1 mm
• I4 pour des fissures allant jusqu’à 2 mm
Isolation thermique et charges de copropriété
Lors des questions parlementaires, un député a récemment interrogé le ministre sur l’intérêt financier d’un copropriétaire à changer ses fenêtres contre du double vitrage, dans un logement avec chauffage collectif, dans la mesure ou la facture d’énergie est supportée de manière égale pour chaque logement quel que soit son niveau d’isolation. Extraits de la réponse ministérielle publiée au JO le 1er mars 2011.
«Il n’est pas envisageable de prévoir dans la loi que les travaux réalisés individuellement par un copropriétaire sur ses parties privatives, notamment les travaux d’économie d’énergie, [permettent] la modification de la répartition des charges» prévue au règlement de copropriété. «Toutefois, la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, dite “Grenelle II”, a apporté des modifications importantes au régime des travaux d’économie d’énergie en copropriété.»
Les travaux d’intérêt collectif sur les parties privatives
«D’une part, l’assemblée générale vote désormais tous les travaux d’économie d’énergie et de réduction des émissions de gaz à effet de serre, quelle que soit la durée de leur amortissement économique pour les copropriétaires, à la majorité prévue à l’article 25, à savoir la majorité absolue des voix de tous les copropriétaires. Si cette majorité n’est pas atteinte mais que la décision a recueilli le vote favorable d’un minimum de copropriétaires, l’article 25-1 permet un second vote de l’assemblée générale à la majorité simple des voix exprimées des seuls copropriétaires présents et représentés, prévue à l’article 24. Cela concerne non seulement les travaux sur les parties et équipements communs, mais aussi les travaux d’intérêt collectif sur parties privatives, dont la liste doit être définie par décret. Ainsi, et sous réserve du contenu du décret à venir, l’assemblée générale pourrait voter des travaux d’économie d’énergie sur les parties privatives des copropriétaires, et par exemple imposer à ceux qui ont encore des fenêtres à simple vitrage de les remplacer par des fenêtres à double vitrage, et ce à leurs frais.»
L’installation de compteurs d’énergie ou de répartiteurs de chauffage
«D’autre part, l’assemblée générale vote désormais les travaux d’installation de compteurs d’énergie thermique ou de répartiteurs de frais de chauffage à la majorité prévue à l’article 25, avec possibilité, dans les conditions prévues à l’article 25-1, d’un second vote à la majorité prévue à l’article 24. L’installation de tels dispositifs permet de tenir compte, dans la répartition des charges, de la consommation de chaque lot. […]
Dès lors, le vote par l’assemblée générale de l’installation de compteurs ou de répartiteurs au niveau de chaque lot permet au copropriétaire qui a également fait installer des fenêtres à double vitrage dans son lot de bénéficier, au titre de ses charges, des économies attendues de ces travaux en termes de consommation de chaleur.»
Cf Inf. Rap.Copr. n° 567 p. 27 ou sur notre site.
Photo : Ravalement avec isolation thermique par l’extérieur - Crédit CC157
Ce qu'il faut retenir
• Le “dormant” de la fenêtre (cadre et liaison à la maçonnerie) reste partie intégrante de l’étanchéité verticale de l’immeuble, dont la responsabilité incombe au syndicat des copropriétaires.
• Sauf mention contraire dans le règlement de copropriété, les fenêtres et portes-fenêtres sont considérées comme des parties communes. Tous les copropriétaires doivent alors participer à leur entretien et toute modification ou rénovation doit faire l’objet d’un vote.
• La copropriété a tout intérêt à effectuer collectivement les réfections lourdes et les remplacements, même si la répartition tient compte du coût d’intervention sur chaque élément traité.
• Lorsque le règlement de copropriété inclut les fenêtres dans les parties privatives, la résolution d’assemblée décidant des travaux doit se prononcer explicitement sur la répartition du coût de leur réfection.
• Cette opération pouvant être considérée comme relevant de l’entretien de l’immeuble, la décision se prend à la même majorité que le ravalement, à savoir celle de l’article 24 de la loi.
• Toute adjonction d’éléments d’équipement nouveaux à l’immeuble, comme la pose de vêture de panneaux isolants fixés par rails ou profilés, peut être votée, par dérogation, à la majorité de l’article 25. Il faut pour cela que ces travaux visent à réaliser des économies d’énergie, et que celles-ci permettent d’amortir le coût des travaux sur une période inférieure à dix ans.
Pour aller plus loin
www.groupement-mur-manteau.com
www.ademe.fr
www.cstb.fr
www.qualibat.com
Ouvrages
• “RT 2012 et RT existant, réglementation thermique efficacité énergétique” de Dimitri Molle et Pierre-Manuel Patry ; Eyrolles Environnement ; 175 pages ; 9 €.
• “Le ravalement, guide technique, réglementaire et juridique” de François Virolleaud et Maurice Laurent ; Le Moniteur ; 652 pages ; 85 €.