Alors que les charges de chauffage pèsent lourdement dans le budget des copropriétés, il devient, face aux aléas pesant sur le prix des énergies, encore plus urgent de maîtriser sa consommation.
Article paru dans les Informations Rapides de la Copropriété numéro 682 d'octobre 2022
12,51 euros par m² et par an. Tel était le coût du chauffage en copropriété en 2020. Premier poste de dépenses, presqu’un quart du budget d’un immeuble. La facture du chauffage dépend du mode de chauffage et de la qualité thermique du logement, des aléas de l’hiver et du prix de l’énergie. Ainsi la dépense avait-elle baissé, selon la FNAIM Grand Paris, de 8,4 % entre 2019 et 2020 en raison d’un hiver doux… mais l’année 2021 s’est caractérisée par une forte hausse des prix du gaz, du fioul domestique et de l’électricité. Les dépenses mensuelles d’énergie des Français ont augmenté, selon l’Insee, en moyenne de 64 euros en octobre 2021 par rapport à décembre 2020. Et depuis, la guerre a été déclarée en Ukraine…
Face à ces paramètres immaîtrisables, la seule solution raisonnable est la moindre dépense. Précisons d’emblée que les immeubles collectifs chauffés individuellement, là où la gestion est privative et s’organise au niveau du lot, ne sont pas concernés ici. Ce qui suit s’adresse donc aux copropriétaires, aux syndicats et aux syndics de copropriété d’immeubles chauffés et gérés collectivement. Diverses actions sont envisageables pour diminuer les charges liées au chauffage inscrit au budget d’une copropriété, dont l’effet est à plus ou moins long terme : mise en concurrence des énergéticiens, remplacement de la chaudière, travaux d’isolation, installation de compteurs individuels, etc. Même si le bilan énergétique, dans sa forme de diagnostic de performance énergétique - collectif, ne sera obligatoire pour les copropriétés dont le permis de construire est antérieur au 1er janvier 2013 qu’au plus tôt en 2024, celui-ci est à même de présenter les meilleures mesures propre à réduire le gaspillage du chauffage.
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Choix de l'énergie
Les différentes sources d’énergie pour produire de la chaleur - principalement électricité, fioul, gaz naturel, bois - dépendent du choix du type de chauffage effectué lors de la construction de l’immeuble en copropriété. La date de construction est ainsi un paramètre significatif. Moins courante, la pompe à chaleur (PAC) convient pourtant à un immeuble. La chaleur qu’elle produit est renouvelable, car l’énergie est puisée dans l’air ou dans les sols, et économique car l’installation ne nécessite que peu d’électricité si elle est correctement dimensionnée aux besoins d’un bâtiment bien isolé. Selon le CEREN, on en dénombre 91 000 en 2020 dans les appartements utilisés à titre de résidence principale. La filière tente de développer cette alternative grâce à la géothermie pour des installations collectives. Cependant, les contraintes techniques et d’urbanisme liées à la PAC sont nombreuses.
Le chauffage collectif électrique, très prisé des Français, s’effectue par des sols et/ou des plafonds chauffants, installés dans chaque logement, et est complété, le cas échéant, par des radiateurs électriques. L’installation est assez simple et ne nécessite pas d’espace de stockage pour l’énergie. Pourtant cette énergie est la plus chère. Le marché est en constante augmentation, la demande est à la hausse et les infrastructures de production sont vieillissantes. De plus, elle se stocke mal et nécessite des logements avec une bonne isolation thermique.
Le gaz naturel est très utilisé en copropriété, 70 % du chauffage collectif se fait au gaz. Ses avantages portent sur la sensation de confort et la performance énergétique. Le raccordement au gaz de ville est simple et l’Etat propose des aides financières lors de l’installation d’une chaudière à gaz performante dans le cadre d’un projet de rénovation thermique. Toutefois, la solution demande un entretien régulier rigoureux des installations et des coûts subséquents de maintenance. Cette source de chauffage présente deux inconvénients liés, d’une part à la fluctuation de son prix sur le marché et, d’autre part, aux exigences de la réglementation thermique 2020 (RT2020) en matière d’émissions de CO2. Ainsi se chauffer au gaz devient-il interdit en 2025 dans l’habitat collectif neuf.
Malgré un vrai confort thermique et une bonne performance, le fioul est de moins en moins utilisé dans les systèmes de chauffage. En cause, la pollution et le coût élevé pour l’entretien de la chaudière et l’achat du carburant. Il est même interdit depuis le 1er juillet 2022 dans les bâtiments neufs.
Dans certaines copropriétés, le combustible bois peut remplacer un chauffage central au fioul. Son prix est intéressant et stable. Il s’agit de plus d’une ressource renouvelable, locale avec une filière française en plein essor, et écologique. Peu répandu en copropriété, le chauffage collectif au bois est mieux adapté aux petites copropriétés (puissance < 200 kW). Une installation mixte, avec une chaudière bois et une chaudière au gaz par exemple, est envisageable. La solution oblige à prévoir un stockage et à bien gérer l’approvisionnement. Le bois doit être de bonne qualité pour éviter l’encrassement du système de chauffe, et maintenir la vitesse de combustion et les émissions de CO2 à un niveau raisonnable.
Le réseau de chaleur urbain ou chauffage urbain se développe dans les métropoles et les territoires à forte densité de population et peut contribuer à alléger les charges de copropriété. Il reste minoritaire dans les territoires moins denses en raison du coût élevé de raccordement. C’est une chaufferie centrale qui produit de la chaleur, la plupart du temps sous la forme d’un fluide caloporteur tel que l’eau, redistribuée à des sous-stations installées au sein des bâtiments reliées au réseau souterrain de canalisations. Le réseau peut user d’un mix énergétique entre fossiles (gaz…) ou renouvelables (géothermie, chaleur de récupération…). Il doit, cependant, recourir à au moins 50 % d’énergie renouvelable pour bénéficier du taux réduit de TVA de 5,5 %. La copropriété raccordée à un tel réseau a une faible marge de manœuvre sur les négociations de prix, le coût du MWh étant non négociable car fixé dans le cadre d’appels d’offres menés par la collectivité. Des aides à la copropriété existent pour financer les travaux de raccordement à un réseau de chaleur urbain.
L’absence de chaudière et de stockage dans la copropriété rend intéressant un tel raccordement.
Mise en concurrence pour l'approvisionnement
Le coût de l’installation et de la consommation de chauffage dépend ainsi de la source et de l’énergéticien initialement choisis. Il est donc important de vérifier les contrats d’abonnement de gaz, de l’électricité ou de l’énergie utilisée et de mettre en concurrence les différents fournisseurs pour obtenir le prix le plus avantageux. Le changement d’une offre d’énergie est soumis à la décision de l’assemblée générale des copropriétaires prise à la majorité simple (art. 24, loi 10 juillet 1965). En général, un seuil a été fixé en assemblée générale au-delà duquel cette mise en concurrence est obligatoire (art. 21, loi 10 juillet 1965). A défaut, elle peut être organisée, à la demande du conseil syndical, par la présentation de plusieurs devis et d’un devis descriptif soumis à l’évaluation de plusieurs entreprises (art. 19-2, décret 17 mars 1967).
Diverses informations sont à transmettre aux énergéticiens sélectionnés, notamment l’identifiant du site, la consommation annuelle de référence, le profil de consommation, les historiques de consommation, figurant sur la facture d’énergie. Avant de souscrire une offre, il convient de comparer les éléments des devis en distinguant le prix de la fourniture d’énergie (le kWh d’électricité ou de gaz), les tarifs d’acheminement de l’énergie, les taxes et contributions. Il est important de s’assurer que les devis sont tous exprimés à partir de la même base (HT, hors TVA ou TTC), que les prix sont établis à la même date pour tenir compte de la variation des prix du marché de gros. Enfin, les conditions d’engagement et de paiement, de pénalités et de résiliation et les services complémentaires (interlocuteur dédié, gestion multisites, accompagnement à l’efficacité énergétique, offre verte, etc.) doivent être scrutées de manière attentive.
Le principe ayant été voté, l’assemblée générale peut déléguer au conseil syndical ou au syndic la réalisation du changement d’énergéticien. Dans ce cas, la décision de mandat est votée à la majorité absolue (art. 25, loi 10 juillet 1965).
Mise en concurrence pour l'entretien
De la même manière, les contrats d’entretien des équipements communs doivent être passés au crible. Le conseil syndical ou l’assemblée générale peut charger le syndic de mettre en concurrence tous les trois à cinq ans les différents prestataires. L’installation de chauffage collectif fait l’objet d’un entretien obligatoire fixé par arrêté du 15 septembre 2009. Le contrat d’entretien de type P2 passé avec un chauffagiste doit obligatoirement comprendre les différents éléments liés à la maintenance des installations : vérification du fonctionnement des appareils de mesure et de contrôle, du rendement de la chaudière et de la régulation, ramonage du conduit de fumée, tenue du livret, prévention de l’embouage, etc. Le contrat peut prévoir des prestations annexes, telles que la garantie et le renouvellement du matériel (P3), le financement (P4) ou la fourniture d’énergie (P1).
Le rendement d’un appareil de chauffage ancien est le plus souvent bien inférieur à celui d’un modèle récent et performant. Pour l’améliorer et obtenir des répercussions positives sur la facture énergétique générale, une copropriété peut ainsi envisager de remplacer la chaufferie collective de son immeuble. «Les chaudières à condensation améliorent de 10 à 25 % les performances des chaudières standard», précise l’ADEME. Le remplacement d’une chaudière de plusieurs centaines de kilowatts peut coûter très cher, entre 50 000 et 300 000 € selon la taille de la copropriété. De nombreuses solutions de financement peuvent permettre de réaliser cet important investissement, sans trop impacter les copropriétaires.
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Renfort de l'isolation
La lutte contre les déperditions de chaleur et la réduction de la facture énergétique des copropriétaires passent aussi par le renforcement de l’isolation. Murs, façades, toitures, gaines et tuyaux sont, à ce titre, les premiers concernés. L’isolation par l’extérieur consiste à recouvrir les murs extérieurs d’un immeuble avec une couche d’isolant résistant aux intempéries et aux flux de chaleur. Elle permet de rénover les façades et s’accompagne de l’isolation de la toiture et des combles non aménagées, des parties communes non chauffées ainsi que du remplacement de leurs portes et parois vitrées. Ces travaux peuvent, facilement et à moindre coût, être bonifiés par le calorifugeage des canalisations du réseau de chauffage collectif et d’eau chaude. La pose d’un isolant thermique autour des tuyaux maintient la température des fluides. Ils se décident rapidement puisqu’il s’agit de simples travaux d’entretien et sont éligibles, sous conditions, aux aides de l’Etat, notamment aux certificats d’économie d’énergie (CEE).
Le législateur a entrepris en outre de faire baisser la consommation d’énergie des logements en rendant obligatoire l’isolation dans les copropriétés. Cette obligation s’appuie sur les travaux embarqués, c’est-à-dire des travaux de rénovations importants (ravalement ou réfection de toiture) qui doivent embarquer le volet isolation thermique. Elle est exclue si les travaux altèrent la solidité du bâti et fragilisent la structure de l’immeuble, ou modifient l’aspect extérieur et l’harmonie de l’immeuble, ou encore ne sont pas rentables à dix ans.
Chauffage collectif à coup individualisé
Dans les bâtiments collectifs chauffés collectivement, lorsque cela est techniquement possible et que les coûts sont maîtrisés, chaque logement doit être équipé, depuis le 25 octobre 2020, d’un compteur ou d’un répartiteur individuel de calories, appareil permettant de connaître et de réguler sa consommation d’énergie. Il s’agit de l’individualisation des frais de chauffage, dont l’objectif est de faire payer à chaque résident ce qu’il consomme réellement. Si l’installation est techniquement impossible - par exemple, l’émission de chaleur par dalle chauffante sans mesure possible par logement - ou entraîne des coûts excessifs au regard des économies d’énergie attendues, des répartiteurs de frais de chauffage installés directement sur les radiateurs, ou d’autres méthodes doivent être mis en œuvre. Enfin, si la consommation en chauffage est inférieure à 80 kWh/m² par an, il n’y a pas d’obligation d’installer des appareils d’individualisation des frais de chauffage (art. R. 241-7 et R. 241-8 du Code de l’Energie).
La décision relève d’un vote de la majorité des voix de tous les copropriétaires (art. 25, loi 10 juillet 1965) et les frais d’installation sont à la charge des copropriétaires de l’immeuble. La copropriété peut, sous certaines conditions, bénéficier d’un éco-prêt à taux zéro. Selon des études européennes et l’expérience, 15 à 20 % de la consommation initiale sont économisés dans chaque immeuble, et jusqu’à 35 % pour les familles les plus vertueuses.
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