[N° 577] - Contrats de performance énergétique et audits : La course à l’efficacité - Entretien : «L’investissement a été entièrement financé par les économies d’énergie garanties»

par Paul TURENNE
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Entretien : «L’investissement a été entièrement financé par les économies d’énergie garanties»

Laurence Bouqueau-Durupt, directeur adjoint de Gdf-Suez Énergies France entreprises et collectivités

La résidence de Lattre de Tassigny, située à Angers, a choisi de moderniser en profondeur sa chaufferie avec Provalys, marque de GDF SUEZ notamment spécialisée dans l’accompagnement énergétique des copropriétés. Le point sur les modalités pratiques et les économies réalisées.

 

Vue d’ensemble de la copropriété de Lattre de Tassigny à Angers. ©Cédric Helsly

Quel a été le point de départ des travaux d’économies d’énergie engagés au sein de la copropriété de Lattre de Tassigny ?
Comptant 200 appartements de standing répartis sur 4 immeubles, cette résidence, construite en 1972 et dont 60 % des logements sont occupés par leurs propriétaires, disposait d’une chaufferie assez vieillissante. L’exploitant a donc alerté le syndic et les copropriétaires de la nécessité de réaliser des travaux de rénovation. Ces derniers étaient d’ailleurs relativement sensibilisés aux questions environnementales et à l’efficacité énergétique. Après avoir longuement discuté avec le conseil syndical, assisté à plusieurs réunions de copropriétaires et échangé avec le syndic, avec lequel nous avions déjà travaillé, nous avons alors proposé un montage. Il s’agissait d’apporter une solution complète à la fois énergétique et financière, en assurant le suivi des travaux et l’installation d’éléments de comptage permettant d’optimiser et de concrétiser l’efficacité énergétique. Le tout pour un montant global de 210 000 euros HT.

Il s’agit tout de même d’une somme importante…
Oui ; pour autant l’engagement financier annuel moyen de chacun des copropriétaires n’a pas été modifié. Cet investissement a, en effet, été financé par les économies d’énergie générées, garanties en premier lieu par la réduction de la facture de gaz (P1 Gaz – cf. classification Inf. Rap. Copr. n°568 p.24), à hauteur d’environ 15 % par rapport aux factures des sept dernières années. Soit 113 tonnes de CO2 en moins par an. Par ailleurs, nous avons pu générer des certificats d’économie d’énergies en recourant à plusieurs éléments : chaudières collectives à condensation, d’une part, avec 21 Wh Cumac (ndlr : énergie finale CUMulée et ACtualisée sur la durée de vie du produit, soit la quantité d’énergie qui aura été économisée grâce aux opérations d’économies d’énergie mises en place). Mais aussi, 680 MWh Cumac, grâce à l’isolation complète du réseau hydraulique de chauffage très étendu. Enfin, 3,5 GWh Cumac avec l’installation d’un système de comptage individuel sur chacun des radiateurs. Autant de certificats d’énergie qui viennent également en déduction de la facture totale.

La valorisation des CEE n’est-elle pas complexe à mener en copropriété ?
Non, pas vraiment. Il faut savoir que nos équipes et nos ingénieurs, disposant d’un haut niveau de technicité, ont fait appel à un bureau d’études indépendant, choisi à la fois par le syndic et le conseil syndical, très impliqué dans ce projet. D’autre part, nous disposons d’une équipe dédiée et sommes très affûtés concernant les fiches d’opérations standardisées d’économies d’énergie qui précisent les économies potentielles réalisables en fonction de la capacité du matériel et du secteur géographique*. Notre expérience et notre présence sur le terrain, avec plus de 400 personnes, nous permettent ainsi de proposer les travaux les plus pertinents pour réaliser ces économies.
Il convient, par ailleurs, de noter que nous intervenons en qualité de chef d’orchestre pour assurer le montage de l’opération, les chaudières restant au final la propriété de la copropriété (ndlr : les chaudières demeureront parties communes). Concrètement, cette dernière deviendra pleinement “propriétaire” du matériel dans huit ans, durée de retour sur investissement de l’emprunt total.

Comment vous rémunérez-vous sur ce type d’opération ?
Pendant huit ans, nous avons l’assurance d’effectuer des livraisons régulières de gaz grâce à un engagement contractuel de la copropriété. Or, la fidélisation de nos clients est vraiment notre créneau avec, en parallèle, la fourniture de services. Lors de ma dernière visite sur place, j’ai ainsi pu constater une grande proximité entre nos collaborateurs et les personnes du conseil syndical car ils ont porté le projet ensemble. Les copropriétaires savent, par ailleurs, qu’ils vont bénéficier des ressources techniques d’une entité interne, nommée Services à l’habitat (SAH). C’est aussi la force d’un groupe comme le notre d’apporter une palette de solutions tant dans la réflexion, la conception que dans la réalisation et l’accompagnement, avec toute la partie contractualisation financière et juridique. Sans oublier le suivi par la suite.

Les deux chaudières installées par Provalys. ©Cédric Helsly

L’individualisation des charges de chauffage dans ce cadre est-elle indispensable selon vous ?
On peut difficilement envisager une installation de ce genre sans individualisation des charges de chauffage, j’en suis intimement persuadée. Il faut que tous les acteurs soient sensibilisés, à commencer par les occupants individuels. Des actions de sensibilisation et de formation au sein de la copropriété sont ainsi indissociables de l’installation en tant que telle. J’ai assisté, l’autre jour, à une passe d’armes au cours d’une réunion de copropriétaires où l’un d’entre eux s’est fait vertement rabrouer quand il a demandé que les logements soient chauffés à 23° C. Avec de la sensibilisation, ce genre d’exigences ne passe plus. Et les systèmes de comptage incitent encore plus à adopter un comportement vertueux. D’ailleurs, nous avons même décidé que si les économies d’énergie générées étaient supérieures à 2 %, elles reviendraient entièrement à la copropriété, car cela signifierait que les copropriétaires ont fait un effort plus que louable pour y parvenir.

Constatez-vous une montée en puissance de ces demandes en copropriété ?
Globalement oui. Il y a une forte appétence des syndics pour cette problématique, y compris dans le logement social. Nous avons plusieurs gros projets à l’étude sur d’importantes copropriétés dans la région parisienne, mais aussi dans la banlieue de Lille. Dans le logement social, la sensibilisation individuelle des occupants doit être particulièrement importante pour la réussite du projet. Et de manière générale, pour qu’un tel projet réussisse, il est nécessaire de disposer d’une majorité de copropriétaires engagés et mobilisés. Il s’agit quand même de montages qui sont assez chronophages et impliquent un grand nombre d’acteurs, ce qui complexifie les choses. Il faut donc être extrêmement pédagogue et transparent, avec une bonne préparation en amont. A ce titre, le syndic joue un rôle fondamental dans la réussite du projet.

* Pour consulter l’ensemble des fiches d’opérations standardisées d’économies d’énergie : www.developpement-durable.gouv.fr/1-le-secteur-du-batiment