[N° 592] - Video-protection des parties communes

par Paul TURENNE
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En quelques années, la vidéosurveillance – ou plutôt vidéoprotection selon la dénomination officielle – a connu de nombreuses évolutions technologiques. Le point sur les possibilités techniques en copropriété et sur les règles juridiques à respecter. ©Credit fotolia 

Lire également l'étude de Gilles Rouzet : [N° 590] - Vidéoprotection et copropriété : la problématique (Pour les non-abonnés : achat à l'unité)

 

Depuis maintenant quelques années, la vidéoprotection vit une petite révolution. Tout comme pour la télévision, le numérique a succédé à l’analogique… sans pour autant le remplacer. Car les technologies IP (Internet Protocole) restent encore chères avec un choix restreint. Chaque copropriété devra donc peser le pour et le contre de ces deux technologies en fonction de ses besoins.


Caméra factice : 20 à 30 €
caméra sans fil : environ 150 €
Caméra filaire IP : de 100 € à 600 €
Caméra filaire analogique : de 40 € à 800 €
Outre le coût en lui-même des caméras, la copropriété devra prévoir des frais d’installation qui varieront en fonction du type de solutions choisies et de la  configuration. Ainsi, un système de vidéoprotection filaire impliquera des travaux supplémentaires pour faire passer les câbles ; d’où des coûts de main d’œuvre pouvant se révéler importants.
Si aucun réseau informatique ne préexiste, les coûts d’installation pour des solutions IP se révéleront beaucoup plus élevés que pour des systèmes analogiques. A contrario, les frais seront faibles, un simple paramétrage étant alors nécessaire.
Enfin, il convient également de prévoir les frais de maintenance, en moyenne autour de 150 € par an.


Avant la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement (ENL), «les travaux à effectuer sur les parties communes en vue de prévenir les atteintes aux personnes et aux biens» étaient votés à la double majorité de l’article 26, difficile à obtenir. Désormais, l’installation et les travaux nécessaires à la mise en place de caméras sont votés à la majorité absolue des voix de tous les copropriétaires, soit la moitié des voix plus une (article 25 n de la loi du 10 juillet 1965). Par ailleurs, si la majorité requise n’est pas réunie, un second vote immédiat ou, par une autre assemblée peut avoir lieu à la majorité de l’article 24, sous conditions.

 


Transmission des enregistrements à la police :
Des règles strictes
Intéressant au premier chef les bailleurs sociaux, la transmission des images aux forces de l’ordre est aujourd’hui régie par la loi Loppsi 2 qui a ajouté un point p à l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965. Cet article précise que «l’autorisation de transmettre aux services chargés du maintien de l’ordre les images réalisées en vue de la protection des parties communes» doit être adoptée à la majorité des voix de tous les copropriétaires.

L’article L. 126-1-1du CCH précise les modalités de cette transmission. Ainsi, cette dernière ne doit se faire en temps réel que «lors de circonstances faisant redouter la commission imminente d’une atteinte grave aux biens ou aux personnes». Elle doit être strictement limitée au temps de l’intervention des forces de l’ordre et faire l’objet d’un affichage d’information. Enfin, les images susceptibles d’être transmises ne doivent concerner ni l’entrée des habitations privées, ni la voie publique.

De plus, une convention indiquant les conditions et modalités de ce transfert doit avoir été signée entre le gestionnaire de l’immeuble et la préfecture du lieu de situation de l’immeuble (décret n° 2012-112 du 27 janvier 2012). Le formulaire ad hoc peut être retiré auprès des services de la préfecture du département, téléchargé sur le site internet du ministère de l’intérieur (cerfa 13806*03), ou être rempli en ligne sur le site : https://www.televideoprotection.interieur.gouv.fr.
L’article R. 127-8 du CCH précise le contenu de cette convention qui doit être transmise à la commission départementale de vidéoprotection. Conclue pour une durée maximale d’un an, renouvelable par reconduction expresse, elle porte notamment sur :
• l’indication du service chargé du maintien de l’ordre, destinataire des images ;
• les modalités de transmission et de conservation des images et les mesures de sécurité afférentes ;
• la nature des événements faisant redouter l’imminence d’une atteinte grave aux biens ou aux personnes et pouvant justifier la transmission des images ;
• les modalités d’affichage et d’information du public concernant la possibilité de transmission des images à un service chargé du maintien de l’ordre, ainsi que les modalités d’accès aux images pour les personnes ayant fait l’objet d’un enregistrement ;
• la durée de transmission et de conservation des images dans la limite d’un mois à compter de leur transmission, sans préjudice des nécessités de leur conservation pour les besoins de la procédure pénale ;
• les modalités de financement du transfert des images.


• Les systèmes de vidéoprotection installés dans les lieux privés sont soumis à la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, dite “loi informatique et libertés”.
• Cette loi a été modifiée par la loi
n° 2004-801 du 6 août 2004 relative à la protection des personnes physiques à l’égard des traitements de données à caractère personnel. Les parties communes des immeubles sont des lieux privés relevant du régime juridique des lois précitées.
• Ces systèmes de vidéoprotection dépendent du contrôle de la Commission nationale informatique et liberté (CNIL) qui a vu ses pouvoirs renforcés par la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, dite Loppsi 2. Cette loi a par ailleurs choisi le terme de “vidéoprotection” en remplacement de “vidéosurveillance”.
• Décret n° 96-926 du 17 octobre 1996, modifié par le décret n° 2009-86 du 22 janvier 2009 relatif à l’autorisation préfectorale, modifié par le décret n° 2012-112 du 27 janvier 2012 ajoutant des précisions sur le transfert des images (contenu de la convention).
• Arrêté du 3 août 2007 relatif aux normes du matériel utilisé (annexe technique publiée au J.O. du 25 août 2007).

Par ailleurs, dans le rapport n° 131, déposé le 10 décembre 2008, le Sénat a émis onze recommandations en matière de vidéoprotection.


• La décision d’installer un système de vidéoprotection engage l’ensemble des copropriétaires, même ceux qui s’y sont opposés. Une présomption de consentement pesant sur tous les copropriétaires, les “opposants” ne peuvent se prévaloir de la protection pour atteinte à la vie privée.
• Les caméras doivent être placées dans les parties communes d’immeuble et ne pas être dirigées vers les parties privatives (comme les portes d’entrée des appartements, par exemple).
• Les enregistrements de vidéosurveillance sont considérés comme des informations nominatives soumises à la loi “informatique et libertés”, pouvant être utilisés pour la constitution de fichiers nominatifs et, à ce titre, soumis à une déclaration préalable à la CNIL.
• Le syndicat des copropriétaires ne peut s’exonérer de ses responsabilités concernant les démarches à accomplir auprès de la CNIL (réponse ministérielle du 8 décembre 2009 : AN,
n° 54207).
• En cas d’installation d’un système de vidéo-surveillance dans un parking non ouvert au public, la déclaration préalable à la CNIL n’est pas obligatoire. Un panneau d’information à l’attention des usagers des lieux et du personnel d’entretien éventuel, doit toutefois être apposée à l'entrée du parking.