Pas de responsabilité engagée pour le conseil syndical : oui mais…
Eu égard, justement, au statut bénévole de la fonction de conseiller syndical et du fait qu’il l’exerce très majoritairement dans l’intérêt collectif de la copropriété, la responsabilité de l’un d’entre eux peut difficilement être engagée dans le cadre de son mandat. Ainsi, quand bien même il aurait pris des «décisions malheureuses» ou qu’il aurait mal contrôlé les comptes, le conseiller syndical bénéficie d’une quasi-immunité, dès lors qu’il a agi dans le cadre de sa fonction. À savoir, assister le syndic, contrôler sa gestion et conseiller le syndicat sur des questions de tous ordres, comme l’a rappelé le ministère de la Justice dans une réponse au sénateur Yves Détraigne, le 27 août 2020.
Gare, toutefois : un membre du conseil syndical qui outrepasserait ses fonctions peut très bien se voir condamné à titre personnel. Ainsi, un conseiller syndical a-t-il été condamné en 2007, par la cour d’appel de Poitiers, au paiement de 3 800 euros de dommages et intérêts pour avoir tenu des propos diffamatoires à l’encontre du gardien de sa résidence (CA Poitiers, 3e ch. civ., 17 janv. 2007, n° 06/01197). Tandis qu’un autre, par ailleurs président de conseil syndical, a été condamné en 2015 à verser in solidum avec son syndic 4 000 euros de dommages et intérêts pour avoir poursuivi un «intérêt strictement personnel» (CA Nancy, 17 nov. 2015, n° 15/02361).
Mais c’est une décision très récente du tribunal judiciaire de Nanterre (TJ de Nanterre, 1er févr. 2021, n° 17/06746) après un conflit au sein d’un immeuble de Boulogne-Billancourt, qui va, à n’en pas douter, faire date… En l’occurrence, les juges ont très lourdement condamné la présidente d’un conseil syndical qui avait contribué à faire démolir, par voie de justice, une véranda installée sur la terrasse de ses voisins au dernier étage ; ceci dans l’intention manifeste de leur nuire, puisqu’elle savait que cet équipement avait, plusieurs années auparavant, été autorisé par la copropriété, et non été construit en toute illégalité comme elle l’affirmait. Or, le syndic – faute d’avoir contrôlé les dires de cette présidente, présente dans l’immeuble depuis ses débuts en 1972 – avait initié une procédure de démolition ; et ce, alors que la simple consultation du procès-verbal de l’époque aurait pourtant permis de déterminer que la construction de cette véranda avait été autorisée par l’assemblée générale… notamment avec le vote favorable de la présidente du conseil syndical en question !
Les juges ont ainsi estimé que «la démarche fautive de la présidente du conseil syndical consistant à demander au syndic d’inscrire une résolution à l’ordre du jour de l’assemblée générale du 1er décembre 2013, portant habilitation de ce dernier à agir en justice pour remettre en cause un droit acquis de ces derniers, ne s’inscri[vait] pas dans la mission habituelle d’un membre du conseil syndical, mais apparaî[ssait] par sa gravité, détachable de sa mission habituelle, engageant pleinement sa responsabilité».
Ils ont ainsi condamné in solidum la présidente du conseil syndical et le syndic de cet immeuble à verser 158 000 euros au couple de copropriétaires lésés. Soit 145 000 euros en réparation de la perte de valeur du bien immobilier, 8 000 euros pour le préjudice moral et 5 000 euros pour les frais de justice et les dépens. Une somme importante qui s’explique par le fait que les fautes cumulées du syndic et de la présidente du conseil syndical ont entraîné une perte de valeur d’un bien immobilier situé dans une commune de l’Ouest parisien où le prix du m² s’avère élevé.
⇓ À retenir : la responsabilité civile des conseillers syndicaux sera rarement retenue, sauf si les juges estiment qu’ils ont agi de mauvaise foi, en connaissance de cause et avec l’intention de nuire, ou bien qu’ils ont outrepassé leur fonction en commettant une faute grave, telle une collusion frauduleuse avec le syndic.