Alors que le chauffage représente 66 % des consommations d’énergie dans l’habitat, l’optimiser apparaît comme une nécessité pour limiter les frais, sans même parler de l’intérêt environnemental pour tout un chacun… Le point sur les solutions existantes et les bonnes pratiques pour concilier confort, économies et écologie à l’approche de l’hiver.
Payer en fonction de ce que chaque appartement a réellement consommé, et non en fonction des tantièmes ou au prorata de la surface : l’idée paraît de simple bon sens. Tel est le principe de l’individualisation ou de la répartition des frais de chauffage qui présente l’avantage d’offrir une meilleure équité… sous réserve de prendre en compte la situation de chaque appartement au sein de l’immeuble.
Et pour cause, tout le monde n’est pas logé à la même enseigne en la matière. Ainsi, selon que l’on soit situé en rez-de chaussée, à mi-hauteur ou sous les toits, orienté plein sud ou nord-ouest par exemple, les contraintes de chauffage vont varier. D’où la nécessité, en cas de grande hétérogénéité des logements, d’appliquer des coefficients correcteurs pour ne pas dévoyer le système. Par ailleurs, une part fixe de 30 % permettra d’atténuer les différences de consommation d’énergie entre logements si ceux-ci ne sont pas isolés les uns par rapport aux autres.
Les solutions de comptage
Deux grands types d’appareil peuvent être installés pour permettre le comptage :
- Dans le cas d’une distribution horizontale de chaleur (par boucle fermée), les compteurs individuels d’énergie thermique (CET) doivent être privilégiés car ils permettent aux occupants de suivre leurs consommations. Placés à l’entrée de chaque logement, ils affichent en effet la consommation réelle de chauffage.
- Dans le cas d’une distribution verticale de chaleur (par colonne), ou s’il est techniquement impossible ou non rentable d’installer des CET, des répartiteurs de frais de chauffage (RFC) peuvent alors être mis en place. Placés sur chaque radiateur du logement, ils vont calculer la quantité de chaleur consommée en mesurant les différences de température entre le radiateur et la pièce
L’individualisation des frais de chauffage est imposée dans certains cas
Consommation annuelle de chauffage de l’immeuble (en kWh/m2) |
> 120 kWh/m2 |
Compris entre 80 et 120 kWh/m2 |
< 80 kWh/m2 |
Obligation d’individualiser les frais de chauffage | Oui, depuis le 31 décembre 2017 sans aucune exemption* | Oui, au plus tard le 25 octobre 2020 |
Pas d’obligation |
* De manière générale, la réglementation prévoit toutefois des cas d’impossibilité technique : émission de chaleur par dalle chauffante sans mesure possible par local ; distribution de chaleur par monotubes en série entre chaque émetteur ; installation de chauffage constituée de systèmes de chauffage à air chaud non réversibles ; émetteurs fonctionnant à la vapeur ; installation de chauffage équipée de batteries ou de tubes à ailettes, de convecteurs à eau chaude, ou de ventilo-convecteurs dès lors que chaque local ne dispose pas de boucle individuelle de chauffage.
L’article 71 de la loi ELAN modifie et assouplit les obligations en matière d’individualisation des frais de chauffage. La réglementation qui en découle définit les modalités d’application :
- décret n° 2019-496 du 22 mai 2019 modifiant les articles R. 241-6 à R. 241-14 ;
- arrêté du 6 septembre 2019 modifiant l’arrêté du 27 août 2012 relatif à la détermination individuelle de la quantité de chaleur et de froid et à la répartition des frais de chauffage et de refroidissement dans les immeubles collectifs à usage d’habitation ou à usage professionnel et d’habitation [cf. l’étude juridique, cette revue, p. 43].
Comptage ou non, il convient que chaque radiateur dispose de robinet thermostatique, pour que les occupants puissent facilement régler le chauffage chez eux. Il convient également de veiller à ce que le système soit bien équilibré (pour une meilleure répartition de la chaleur entre les logements) et désemboué, afin que celle-ci puisse se diffuser de manière optimale.
Déterminer la consommation de chauffage d’un immeuble en trois étapes :
1. Calculer la moyenne des consommations annuelles de combustible ou d’énergie à partir des factures de la copropriété sur les trois dernières années ;
2. Retrancher la part d’énergie utilisée pour la production d’eau chaude sanitaire. On obtient alors la consommation moyenne de chauffage de l’immeuble en kWh/an ;
3. Diviser ce résultat par la surface habitable (SHAB) pour obtenir la consommation de chauffage en kWh/m²SHAB.an.
Les températures idéales pour allier confort et économies d’énergie
Une température de 19° C en moyenne dans un appartement est recommandée, et figure d’ailleurs dans l’article R. 131-20 du Code de la construction. Dans les chambres en journée ou les pièces inoccupées, elle peut être descendue à 17° C, via les robinets thermostatiques installés sur les radiateurs, tandis qu’elle peut être montée à 22 ou 23° C dans la salle de bain lors de la toilette.
Bien évidemment, il s’agit d’un cas général et ces températures peuvent être revues à la baisse ou à la hausse en fonction de l’isolation du logement et de la typologie des occupants. Une personne âgée dans un logement mal isolé avec un effet paroi froide aura par exemple toutes les chances d’être mal à l’aise à 19° C… Reste que passer de 20° C à 19° C, va entraîner une baisse de 7 % de la consommation de chauffage.
Les sources d’énergie et les chaudières
Des sources d’énergie plus ou moins adaptées
Gaz naturel.- Incontestablement, le gaz naturel occupe le haut du pavé en matière de chauffage en copropriété. Certes, il s’agit d’une énergie fossile moins écologique que le bois par exemple, mais il offre un bon compromis entre confort, compétitivité prix et performance du rendement. De fait, ce dernier peut dépasser les 100 % avec une chaudière à condensation reliée à un réseau de chauffage basse température ! Très souvent délivré en milieu urbain, le gaz ne nécessite que rarement un stockage au niveau de l’immeuble.
Fioul.- Bien que disposant d’un rendement autour de 90 à 100 % meilleur que celui du bois, le fioul est en perte de vitesse. Bien plus polluant que le gaz, il doit en plus faire face à des fluctuations importantes de son prix qui le rendent peu attractif sur le moyen terme. Enfin, l’installation d’une cuve de stockage est indispensable.
Bois-énergie.- Écologique et procurant un confort de chauffage certain, le bois est surtout adapté au chauffage collectif des copropriétés situées en milieu rural, du fait de la grande capacité de stockage nécessaire et de son approvisionnement plus difficile en ville. Son rendement ne dépasse jamais les 80 %, sachant que les meilleures performances sont atteintes avec des granulés (plus chers que les bûches).
Électricité.- Particulièrement chère et amenée à augmenter fortement en France1, l’électricité ne nécessite toutefois aucun espace pour le stockage, par définition. Elle peut alimenter un chauffage d’appoint dès lors que l’isolation du bâti est optimisée.
Quels générateurs de chauffage choisir en copropriété ?
Chaudière à condensation.- Alimentée par la combustion du gaz de ville, elle possède un bien meilleur rendement énergétique qu’une chaudière classique. Coût : de 4 000 à 7 000 euros.
Chaudière basse température.- Permet de réaliser jusqu’à 20 % d’économie par rapport à une chaudière gaz classique. Coût : de 3 000 à 6 000 euros.
Chaudière à granulés de bois (ou pellets).- Économique sur le moyen terme et écologique, elle prend toutefois plus de place au niveau du sol du fait du stockage du bois-énergie. Coût : de 17 000 à 19 000 euros.
Pompe à chaleur géothermique.- L’énergie thermique est extraite via un forage ou un réseau de captage au niveau du sol avant d’être envoyée dans le chauffage central. L’efficacité énergétique est optimale, mais cette solution est chère et ne peut être mise en place partout. Coût : de 18 000 à 20 000 euros.
Pompe à chaleur air-eau.- L’énergie thermique est extraite de l’air extérieur avant d’être injectée dans l’eau du chauffage central. Coût : de 11 000 à 13 000 euros.
Pompe à chaleur air-air.- L’énergie thermique est extraite de l’air extérieur avant d’être distribuée dans les différents logements à l’aide d’un ventilo-convecteur. L’efficacité énergétique est bien moindre. Coût : de 6 000 à 10 000 euros.
Radiateur électrique à inertie.- Si l’investissement est peu élevé, cette solution implique une excellente isolation pour éviter l’explosion des factures d’électricité (amenées à augmenter significativement ces prochaines années). Coût : de 500 à 1 200 euros.
Les contrats d’exploitation et de maintenance
Signés entre le gestionnaire de l’immeuble et une entreprise qualifiée, les contrats englobent quatre grands types de prestations, combinables entre elles (P1+P2 a minima) :
• Gestion de l’énergie (P1) dans lequel un professionnel fournit le combustible ou l’énergie ;
• Entretien courant (P2) où le professionnel se charge des tâches courantes de conduite et de maintenance ;
• Renouvellement et gros entretien (P3), également appelé «garantie totale», qui comprend la prise en charge des grosses réparations ;
• Financement et travaux par l’exploitant (P4), le remboursement de ce financement faisant l’objet d’un terme spécifique de facturation.
La durée, les matériels concernés, le type de tâches effectuées, la périodicité des visites et les délais d’intervention doivent impérativement y être mentionnés.
De manière générale, mieux vaut privilégier les contrats de résultat qui engagent la responsabilité directe de l’exploitant sur des enjeux de disponibilité technique et économique. En effet, en cas d’inexécution de l’obligation, l’exploitant, souhaitant se soustraire à sa responsabilité, devrait apporter la preuve d’une cause étrangère ne lui étant pas imputable.
A noter que l’exécution de ces contrats est limitée à seize ans s’ils comportent un poste P3, huit ans s’ils comportent une clause de paiement des combustibles forfaitaire et indépendante des conditions climatiques, et cinq ans, dans les autres cas.
De l’intérêt de soigner les PV de prise en charge pour éviter les mauvaises surprises
Attention à bien soigner les procès-verbaux de prise en charge lors de la signature du contrat d’exploitation ! Ainsi, ce dernier doit-il fixer précisément l’état des matériels et équipements à l’entrée dans les lieux. En cas de non-conformité ne permettant pas de garantir les engagements contractuels, il convient de le préciser et de lister les travaux de remise en état que la copropriété doit financer.
Le PV doit, en outre, reconnaître la prise en charge des installations, le devoir de conseil et les préconisations préalables de l’exploitant. Ceci avant la signature du contrat, mais aussi pendant son exécution.
Les évolutions réglementaires postérieures à la signature étant à la charge de la copropriété, il faut également s’assurer de la bonne conformité de l’installation en matière de sécurité et de réglementation, ainsi que des conditions de chiffrages.
Objectif : éviter de mauvaises surprises en cas de remises à niveau survenant en cours de contrat.
Enfin, mieux vaut prévoir des photos de l’installation, à même de donner des indications quant à l’âge et la vétusté du matériel au titre des engagements P2. Sans oublier une programmation prévisionnelle sur la durée du contrat pour les gros renouvellements (P3).
Quid des clauses à vérifier ?
C’est bien connu, le diable se niche dans les détails, et la présence (ou l’absence) de certaines clauses peuvent avoir un impact important pour les finances de la copropriété.
Il est ainsi vivement conseillé de veiller à la présence d’une clause imposant à l’exploitant la remise annuelle d’un rapport d’exploitation comportant notamment le solde de chaque compte (en particulier le bilan P1 et le renouvellement et gros entretien P3). Ceci afin que la copropriété puisse conserver une visibilité sur l’ensemble des actions menées.
A vérifier également, et à faire ajouter le cas échéant, une clause de pénalités en cas de manquement aux engagements pris par l’exploitant (délais d’intervention, de la coupure de chauffage pendant un certain nombre d’heures etc.)
En ce qui concerne le P3, il est conseillé de demander l’ajout d’une clause d’évolutivité prévoyant que l’exploitant ne privilégie pas automatiquement un remplacement par du matériel à l’identique. La copropriété pourra ainsi, le cas échéant, négocier et bénéficier de nouvelles technologies, voire moduler la puissance, dans une logique d’optimisation du fonctionnement et d’économies d’énergies.
Des contrôles aussi pendant le contrat
Prévoir c’est bien, vérifier c’est mieux… La copropriété aura ainsi tout intérêt à contrôler régulièrement les températures ambiantes délivrées (19° C) ou, bien encore, la bonne application du ralenti de nuit pour éviter une surconsommation.
Elle pourra également faire appel à un professionnel indépendant, notamment avant l’échéance du contrat, afin qu’il vérifie la bonne tenue des engagements contractuels de l’exploitant et qu’il fournisse d’éventuelles pistes d’amélioration.