Engager une démarche de rénovation énergétique en copropriété implique d’effectuer des choix stratégiques, tant techniques que financiers. Face à la complexité des enjeux, les porteurs de projet ont donc tout intérêt à bien s’entourer et à impliquer au maximum les copropriétaires, pour optimiser les chances de réussite.
©DR
Economies d’énergie, factures moins élevées, amélioration du confort, augmentation de la valeur patrimoniale du bâti… Les avantages d’un projet de rénovation thermique sont nombreux, sous réserve d’agir globalement sur la copropriété. Une action collective permet en effet de démultiplier l’efficacité et les résultats en mutualisant les efforts. Et donc, in fine de réduire bien davantage les coûts en comparaison des actions au coup par coup par appartement. Pour autant, inutile d’espérer mener à bien un projet d’amélioration digne de ce nom, sans un conseil syndical motivé et une forte implication des copropriétaires et du syndic gestionnaire, avant, pendant et après sa réalisation.
Car, si les travaux à réaliser pour rendre une copropriété économe en énergie dépendent avant tout de ses caractéristiques (date de construction, localisation, état initial…), l’engagement des parties prenantes joue beaucoup. Sans compter une bonne dose de méthodologie.
Rénovation en plusieurs phases
Avant toute chose, il convient de bien préparer le projet en tenant compte des spécificités de la copropriété à rénover. Le conseil syndical aura donc tout intérêt à réfléchir de concert avec le syndic sur le projet de rénovation énergétique qu’il entend mener à bien. A ce stade, prendre contact avec un Espace info-energies s’avère bien souvent profitable, du fait des conseils dispensés par les conseillers ayant une grande expérience de ce type de travaux.
Les copropriétés dotées d’un chauffage collectif pourront également réaliser un bilan énergétique simplifié (cf. Pour aller plus loin), permettant de comparer les différentes saisons de chauffe entre elles. L’objectif est ainsi d’évaluer de possibles baisses de rendement du système de chauffage ou d’éventuelles anomalies énergivores.
Il s’agit ensuite de contacter plusieurs bureaux d’études et d’effectuer une sélection à partir des devis. Puis, le conseil syndical devra veiller à ce qu’un maximum de copropriétaires soient informés du projet et sensibilisés via des courriers, des affiches, ou des réunions.
Dans un deuxième temps, l’objectif sera de réaliser un audit énergétique visant à proposer des préconisations adaptées aux spécificités du bâti et aux priorités à mettre en œuvre.
Cet audit, étape fondamentale qui traduit la mobilisation de la copropriété et ses motivations, devra au préalable être voté en assemblée générale. D’où l’intérêt de bien sensibiliser tous les copropriétaires à son utilité. Par ailleurs, le conseil syndical, éventuellement assisté du syndic, pourra monter des dossiers de subventions, de façon à faire baisser le coût total de l’audit.
Une fois finalisé, la copropriété disposera d’un diagnostic clair du bâtiment et des travaux à réaliser.
Enfin, la dernière étape sera l’établissement d’un programme de travaux étalé sur plusieurs années, conformément aux préconisations du bureau d’études. Avec, à la clé une sélection des entreprises prestataires en fonction de leurs compétences et de leurs tarifs.
Réalisation de l’audit énergétique
La réalisation d’un audit énergétique permet donc aux copropriétaires et au syndic d’avoir une idée précise des travaux à engager pour améliorer la performance énergétique d’une copropriété.
Celui-ci se déroule généralement en quatre phases.
Avant l’intervention du bureau d’études, il s’agit tout d’abord de préparer le terrain et de rassembler les documents indispensables à la mission du prestataire. Ce dernier va ensuite visiter la copropriété et s’entretenir avec des occupants. Puis, le bureau d’études va rédiger un rapport intermédiaire et s’entretenir sur cette base avec le conseil syndical et le syndic. Enfin, à la suite à cette réunion, il finalisera son rapport et assurera une présentation finale à l’ensemble des copropriétaires lors d’une réunion d’information, voire lors de l’assemblée générale.
Rôle majeur du syndicat de copropriétaires
Au cours de ces quatre phases, le maître d’ouvrage commanditaire de l’étude, à savoir le syndicat de copropriétaires, va jouer un rôle majeur pour assurer le bon déroulement et la réussite de l’audit énergétique. Il devra, tout d’abord, de soigner la phase préalable. Ainsi, une bonne connaissance du cahier des charges lui permettra de mieux cerner la nature de la prestation à exiger du professionnel. Il veillera ensuite à remplir soigneusement la fiche descriptive de la copropriété afin que le prestataire puisse établir un devis le plus précis possible. Charge alors de choisir le prestataire en sélectionnant le mieux disant, à prestations égales.
Une fois cette sélection effectuée, il lui faudra fournir toutes les informations et documents utiles en sa possession. A commencer par les abonnements et contrats en cours, factures de combustible, d’électricité et d’eau, voire, s’ils ont été réalisés, bilan énergétique simplifié, bilan des consommations d’électricité pour les parties communes, ou des consommations d’eau. Par ailleurs, il devra également rassembler les devis et factures des travaux réalisés au cours des cinq dernières années, les devis des travaux envisagés, les plans des différents niveaux et des sous-sols éventuels, ainsi que l’ensemble des diagnostics, études et audits effectués précédemment, le carnet d’entretien de chaque bâtiment et les schémas des réseaux électriques et autres fluides. Enfin, pour les immeubles dotés de chauffage collectif, il fournira le livret de chaufferie, le carnet de maintenance et le rapport d’inspection des chaudières.
Durant la phase de réalisation de l’audit, le maître d’ouvrage devra notamment faire en sorte que le prestataire soit accompagné par les personnes impliquées au quotidien dans la gestion technique et énergétique du bâtiment audité. Qui plus est, son rôle en matière de sensibilisation sera très important à ce moment là, puisqu’il sera en charge d’impliquer l’ensemble des copropriétaires, via des réunions, des questionnaires ou des visites d’appartements.
Enfin, à la remise du rapport, il devra tout d’abord s’assurer que la prestation est bien conforme au cahier des charges et valider les hypothèses retenues en faisant le lien entre les différents acteurs concernés (syndic, Espace info-énergies, éventuel prestataire extérieur…)
Prestation d’AMO : la cerise sur le gâteau
La partie optionnelle Assistant à maîtrise d’ouvrage (AMO) de la prestation d’un cabinet d’études fait obligatoirement suite à un audit énergétique. Pour les cas les plus complexes, notamment dans le cas de travaux d’envergure, la copropriété aura ainsi tout intérêt à faire appel à un AMO. Ce prestataire aura pour mission de l’accompagner dans sa démarche et de l’aider à prendre les décisions concernant le déroulement de la phase maîtrise d’œuvre. Il l’assistera également sur le choix du maître d’œuvre et pourra proposer le suivi de ce dernier.
En fonction du projet, il peut s’agir d’une AMO travaux, d’une AMO renégociation des contrats d’énergie, ou d’une AMO garantie de performance énergétique. Cette prestation se décompose en trois temps :
• Une mission d’accompagnement au choix du programme de travaux à retenir par le maître d’ouvrage.
• Une mission d’accompagnement au choix du maître d’oeuvre,
• Une mission de suivi de la conception du projet.
Maître d’œuvre et maître d’ouvrage en copropriété
Dans une copropriété, le maître d’ouvrage est le syndicat des copropriétaires, qui peut déléguer une partie de ses prérogatives au syndic. Il a la responsabilité de faire valoir les besoins de la copropriété en matière de rénovation, de réparation ou d’extension, éventuellement en s’appuyant sur une prestation d’assistance à maîtrise d’ouvrage (AMO). Il doit, ensuite, respecter ses obligations selon les contrats établis avec le maître d’œuvre, notamment concernant les échéances de règlement, et réceptionner les travaux achevés sous la conduite du maître d’œuvre.
Le maître d’œuvre est, de son côté, responsable de la coordination et de la réalisation des travaux demandés par le syndicat de copropriétaire jusqu’à leur réception. Il se doit aussi de les valider, tant du point de vue des exigences initiales que de leur conformité vis-à-vis à la législation et aux règles de l’art.
Performance energétique : deux outils
Pour rappel, la loi Grenelle II du 12 juillet 2010 a institué deux outils majeurs afin d’améliorer la performance énergétique des bâtiments.
• Le premier dispositif concerne les petites copropriétés de moins de 50 lots, équipées d’une installation collective de chauffage ou de refroidissement. Elles ont l’obligation de réaliser un DPE (diagnostic de performance énergétique) avant le 31 décembre 2017.
• Le deuxième instrument concerne les grandes copropriétés. «Dans les bâtiments à usage principal d’habitation d’un immeuble ou d’un groupe d’immeubles en copropriété de cinquante lots ou plus, quelle que soit l’affectation des lots, équipés d’une installation collective de chauffage ou de refroidissement et dont la date de dépôt de la demande de permis de construire est antérieure au 1er juin 2001», un audit énergétique (Code de la construction et de l’habitation, art. R. 134-18) doit être réalisé avant le 1er janvier 2017. Il permet de faire une analyse globale de la consommation énergétique de chaque immeuble et de dégager des préconisations d’optimisation de l’utilisation, de l’exploitation et de l’installation collective de chauffage notamment, ainsi que des propositions de travaux pour améliorer la performance énergétique du bâtiment.
Contenu du rapport d’audit
Un rapport d’audit doit comporter des informations bien précises et se divise généralement en trois parties :
• Un état des lieux des consommations énergétiques par usage (chauffage, ventilation, eau chaude sanitaire, éclairage) ;
• Des préconisations d’actions et travaux portant sur l’enveloppe du bâti (fenêtres, murs, toiture, etc.), sur les équipements (ventilation, chauffage, ECS, éclairage, auxiliaires) et une étude d’opportunité énergies renouvelables. Ces préconisations améliorant la performance énergétique de la copropriété doivent être adaptées aux priorités du bâti et des copropriétaires ;
• Enfin, des scénarios ou bouquets de travaux combinant plusieurs actions et travaux.
Pour aller plus loin
•“Audit énergétique en copropriété : comment obtenir un audit efficace ?”, à lire sur le site de l’UNARC : www.unarc.asso.fr
• Bilan énergétique simplifiée (BES) : outil de suivi des consommations d’énergie en tenant compte des conditions climatiques et des consommations d’eau chaude. Disponible gratuitement sur le site de l’UNARC (boîte à outils de la maîtrise des charges en copropriété www.unarc.fr/f2ud )
• Bilan initial de copropriété (BIC) : le cahier du BIC permet au conseil syndical de recenser les informations nécessaires à la réalisation d’un premier état des lieux de la situation de la copropriété, aussi bien du point de vue de la gestion, de son fonctionnement, de ses équilibres financiers, que du point de vue technique et de ses besoins de travaux. Disponible gratuitement sur www.planete-copropriete.com
• Espace info-énergie. Coordonnées sur le site www.infoenergie.org
• Agence parisienne du climat : www. apc-paris.com
Focus sur une rénovation énergétique de grande ampleur
Situé dans le 15ème arrondissement de Paris, l’immeuble Super Montparnasse était une vraie passoire énergétique. Ce bâtiment en béton de 30 étages pour 260 logements possédait plus de 80 % des fenêtres en simple vitrage et une façade non isolée. Le chauffage et l’eau chaude sanitaire (ECS) collectifs était assurés par réseau de chaleur, avec plus de 15 000 m² chauffés. «Les façades non isolées étaient très dégradées et nos factures d’énergie étaient en forte hausse. On ne pouvait plus attendre !», précise Tania Waeselynck, présidente du conseil syndical. «Nous avons pris conscience de l’utilité d’agir maintenant pour baisser nos charges et aussi pour valoriser notre patrimoine.»
-70% des consommations d'énergie - Crédit : ©Cabinet Paziaud
L’opération des travaux aura duré quatre ans au total. La première année a été consacrée à la préparation du projet et à la réalisation d’un bilan énergétique simplifié. La deuxième, à l’audit énergétique, pour un total de 15 000 €. Grâce à des subventions de l’Ademe, de la ville de Paris et de la Région Ile-de-France (programme «Copropriétés : objectif climat !»), 70 % du montant HT ont pu être déduits, soit, au final, un coût très modique de 20 € par lot. La réussite de l’opération est aussi passée par le bureau d’études qui a fait preuve de pédagogie lors de la présentation du rapport d’audit. De quoi dégager plus facilement des priorités sur les travaux envisagés, leur montant étant estimé à 11,5 millions d’€ HT.
Les travaux ont ensuite débuté la troisième année, en deux phases. Au cours de la première, les solutions les plus rapides et les moins coûteuses ont été mises en place. A commencer par une baisse du chauffage la nuit, qui a permis de réaliser une économie de 12 000 € par an ! Trois compteurs d’Eau chaude sanitaire (ECS), deux compteurs calorifiques et une pompe de circulation d’ECS ont également été installés. Enfin, une isolation thermique par l’extérieur des façades a été réalisée.
Schéma d’économies d’énergie Super Montparnasse - Crédit : ©Cabinet Paziaud
La seconde phase, au cours de la quatrième année, a permis d’effectuer un achat groupé de fenêtres afin de diminuer les coûts, et de remplacer les extracteurs d’air (VMC).
Schéma d’économies de charges Super Montparnasse - Crédit : ©Cabinet Paziaud