[N° 539] - Confort d’été : Vers une climatisation écologique - Le regard d’un spécialiste de l’énergie

par Maud PHILIBERT
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Le regard d’un spécialiste de l’énergie 

“L’Agence Locale de l’Energie aide les professionnels et les syndics à se former à la Qualité Environnementale des Bâtiments”

L’Agence Locale de l’Energie peut renseigner toute personne du conseil syndical ou syndic de copropriété décidé à engager des travaux d’amélioration énergétique sur son bâtiment... Nous avons demandé à Aurélie PELADE, Chargée de missions - Habitat / Energies renouvelables de l’Agence Locale de l’Energie de l’agglomération lyonnaise quelques conseils en matière de climatisation écologique.

Comment travaillez-vous avec les cabinets d’études et les architectes à l’amélioration thermique du logement résidentiel? Quelles sont les principales contraintes auxquelles il faut faire face ?

En ce qui concerne les professionnels type Bureau d’étude ou architecte, l’Agence Locale de l’Energie peut les aider à se former à la Qualité Environnementale des Bâtiments. Elle peut apporter des informations et conseils sur les divers champs de la Qualité Environnementale des bâtiments en s’appuyant sur la documentation dont elle dispose et sur les expériences déjà réalisées en la matière sur le territoire du Grand Lyon.
L’ALE peut aider à développer, au sein des structures, des outils et des méthodes permettant d’appliquer des démarches de Qualité Environnementale à l’ensemble des projets. Elle peut aussi  les accompagner dans l’application des référentiels (habitat et tertiaire durable) du territoire du Grand Lyon. 
Pour le domaine de la copropriété, L’Agence Locale de l’Energie peut renseigner toute personne du conseil syndical ou syndic de copropriété. L’ALE aide à la réalisation d’un cahier des charges, la diriger vers les bureaux d’études et autres professionnels du bâtiments compétents, la renseigner sur les diverses aides possibles et l’aider à monter les dossiers de demandes de subvention auprès de la Région Rhône-Alpes et de l’ADEME.

Concrètement, quels sont les conseils que l’on peut donner aux copropriétaires désireux de disposer d’un confort thermique l’été qui soit respectueux de l’environnement ?

Empêcher la chaleur d’entrer est la façon la plus simple de se protéger des surchauffes estivales. Le problème actuel est que beaucoup de bâtiments récents n’ont pas de bonnes protections contre la chaleur, avec des surfaces vitrées surdimensionnées sans aucune  protection solaire comme des stores ou des volets.
Ajouté au fait que les murs n’amortissent pas les variations de température extérieure, tout cela concorde pour mener à un échauffement rapide et important.
Des techniques relevant du bon sens permettent de limiter les effets néfastes des températures estivales. Entre autres, fermer les volets en journée et fermer les fenêtres dès que la température extérieure est supérieure à la température intérieure et lors des fraîcheurs nocturnes, penser à les rouvrir pour évacuer la chaleur stockée par le bâtiment.Un travail d’amélioration des protections solaires et d’isolation du bâtiment doit donc être mené lorsque l’on souffre de surchauffe estivale.

“Beaucoup de bâtiments récents n’ont pas de bonnes protections contre la chaleur, avec des surfaces vitrées surdimensionnées”

On parle beaucoup d’inertie thermique  comme solution à privilégier pour le confort d’été de jour. Pouvez-vous nous expliquer de quoi s’agit-il ?

L’inertie thermique d’un bâtiment est sa capacité à stocker de la chaleur dans ses murs, ses planchers, etc. Plus l’inertie d’un bâtiment est forte, plus il se réchauffe et se refroidit lentement. Plus les murs sont épais et les matériaux lourds (béton, pierre, brique pleine, terre crue, etc.), plus l’inertie est grande. Une forte inertie est un atout pour le confort d’été de jour, en l’absence de climatisation : elle amortit les pics de surchauffe. Une bonne ventilation la nuit devra permettre d’évacuer la chaleur accumulée pendant la journée.

Quelles sont les solutions techniques simples à mettre en œuvre dans l’existant ?

Des alternatives à la climatisation sont possibles lorsque l’on souffre de surchauffe estivale.
Les protections solaires sont les premiers remparts face à la chaleur. La pose de volets (s’ils ne sont pas déjà présents) ou de stores extérieurs peut être envisagée. Cette solution peut tout aussi bien être appliquée en habitat individuel, qu’en collectif, le tout étant de savoir ce qui est réalisable dans votre copropriété en fonction de son règlement.
Ensuite, il est nécessaire d’améliorer l’isolation de votre bâtiment. L’isolation est un facteur qui apportera autant de confort en hiver qu’en été. Une bonne isolation thermique par l’extérieure permettra d’augmenter de manière significative l’inertie de votre bâtiment. L’isolation de la toiture empêchera la chaleur de s’enfuir en hiver et de rentrer en été. En outre, un bon brassage de l’air permet d’améliorer le confort de manière notoire, ce dernier peut se faire grâce à des ventilateurs portables ou des ventilateurs de plafonds. Le puits canadien, système passif permettant de rafraîchir l’air en été peut être mis en place (cf. question suivante).

“L’isolation est un facteur qui apporte autant de confort en hiver qu’en été”

En dernier recours un système de climatisation peut être mis en place.
Les systèmes de climatisation sont des machines frigorifiques. Comme dans un réfrigérateur, ces appareils captent la chaleur d’une pièce pour en faire baisser le niveau et la rejeter vers l’extérieur. Sachez que si les préconisations précédentes sont suivies, le besoin de faire appel à une climatisation ne devrait pas se faire sentir et cela permettra de ne pas augmenter votre consommation électrique estivale.

Les appareils électroménagers participent eux-aussi au réchauffement intérieur, il faut donc veiller à s’équiper d’appareils économes (surtout réfrigérateur et congélateur) en les choisissant grâce à  leur étiquette énergie et à limiter l’utilisation des appareils de cuisson.

Les systèmes type puits canadien sont-ils facilement intégrables par un architecte ? À quel coût ? Les avez-vous déjà expérimentés ?

Le puits canadien, également appelé puits provençal, est un système passif permettant de préchauffer l’air neuf en hiver et de le rafraîchir en été, en utilisant le potentiel thermique du sol : sa température à 2 m de profondeur est d’environ 5°C en hiver et 13°C en été.
Pour cela l’air extérieur circule, à l’aide d’un ventilateur, dans des canalisations enterrées ayant un diamètre et une longueur adaptés, avant d’être insufflé dans le bâtiment. En hiver l’air froid se réchauffe au contact du sol pour atteindre, une température de 2 à 5°C tandis qu’en été l’air extérieur profite de la fraîcheur du sol pour diminuer sa température et arriver dans le bâtiment entre 13 et 20°C.

Cette technique permet de rafraîchir des locaux neufs ou existants situés dans des régions où le climat présente des températures estivales supérieures à 30°C. Ce procédé permet aussi de tenir un bâtiment hors-gel, ce qui est très intéressant pour les résidences secondaires.
Enfin le puits canadien consomme très peu d’électricité, seul le système de ventilation en consomme, participe à la réduction de la consommation d’énergie du bâtiment.

Le coût d’un puits provençal ou canadien dépend essentiellement du coût de terrassement, donc si vous profitez d’autres travaux de terrassement dans le jardin, le surcoût pour creuser une tranchée de 1,50m sur 30m sera de l’ordre de 150 euros. En conséquence nous conseillons vivement que l’installation du puits soit faite pendant les travaux de fondation du bâtiment.