L’évolution des technologies en matière des contrôles d’accès peut être un facteur d’inspiration pour les copropriétés. Panorama.
Article paru dans les Informations Rapides de la Copropriété numéro 698 de mai 2024
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Faire en sorte que les résidents, leurs proches mais aussi leurs employés ou encore les livreurs ou les prestataires de l’immeuble aient accès aux parties communes et ensuite aux appartements tout en évitant les intrusions : telle est la difficulté inhérente au contrôle d’accès. La difficulté est encore accrue lorsque des professions libérales sont présentes dans l’immeuble, notamment des médecins qui reçoivent un public nombreux.
La plupart des immeubles en copropriété sont dotés de claviers à code et parfois de badges électroniques permettant l’entrée des résidents et de professionnels comme les facteurs. Des platines dotées d’interphones plus ou moins sophistiqués permettent également de donner l’accès à des visiteurs extérieurs. Une bonne partie des immeubles conserve également des systèmes à clé notamment dans les portes intérieures.
Pour autant, l’évolution des technologies est telle dans le domaine du contrôle d’accès que cela pourrait inciter les copropriétés à entamer une réflexion à ce sujet, notamment lorsque la question d’une modernisation des dispositifs existants se pose, parfois à l’occasion d’une rénovation des parties communes. Ces nouvelles technologies sont pour l’instant développées dans les entreprises, l’hôtellerie ou parfois les immeubles récemment construits.
Le smartphone, la nouvelle clé
Les nouvelles technologies incluent d’abord le téléphone portable. Ce dernier devient une clé qui permet d’ouvrir facilement toutes les portes via une application sur un smartphone. Il est possible de déverrouiller sa porte d’entrée mais aussi de partager l’accès à l’immeuble de manière permanente ou ponctuelle et cela même à distance. L’intérêt de cette application est qu’il est même possible de spécifier des jours et des horaires pour la femme de ménage ou pour des amis. Le système est également pratique pour les locataires saisonniers car il est possible de créer autant de clés digitales que nécessaire et de les supprimer à tout moment.
Comme tout le monde n’est pas équipé de smartphones, ce type de système permet généralement la lecture de badges électroniques classiques. Il est également possible de doter ces systèmes de clés sécurisées. Une fois que le téléphone portable et le système d’accès sont connectés, cela ne nécessite même plus de sortir son téléphone ce qui peut s’avérer pratique lorsqu’on a les bras chargés. Le téléphone portable est détecté au fond d’un sac et déverrouille la porte. Certains systèmes fonctionnent avec des QR codes générés autant que de besoin et qui permettent de déverrouiller la porte. L’avantage est que le QR code peut être imprimé si une personne n’est pas dotée de smartphone.
Et dans les systèmes les plus sophistiqués, ce ne sont plus les Bluetooth et Wifi qui sont utilisés pour ouvrir mais la lumière. C’est notamment la solution développée par HAVR avec sa Bright lock. Le principe est d’équiper une porte avec une serrure électronique à ouverture lumineuse : lorsque la personne se positionne devant la serrure, le smartphone éclaire la serrure Bright lock et lui communique des éclairs avec une séquence bien précise pour ouvrir. La technique utilisée pour envoyer ce code est la VLC (visible light communication), une technique sans fil basée sur la lumière (Light fidelity ou Lifi). L’idée est d’établir une connexion plus sécurisée que le Bluetooth ou la Wifi car la VLC génère une code à usage unique. Le fabricant indique que ce type d’ouverture peut être doublé d’autres systèmes d’ouverture comme une clé sécurisée.
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Le corps humain, la prochaine clé ?
Autre possibilité : utiliser le corps humain. Les dernières serrures connectées peuvent, en effet, être ouvertes par l’empreinte de doigt. Le public doté de smartphone est habitué à ce type de système et il est utilisé de la même façon sur les serrures. La question à se poser est de savoir quelle est le nombre d’empreintes qu’il est possible de stocker dans le système puisque les copropriétés peuvent regrouper de nombreux appartements avec un grand nombre de personnes. Les nouveaux systèmes peuvent enregistrer plusieurs centaines d’empreintes et, là encore, les serrures sont doublées de systèmes complémentaires pour permettre aux résidents d’entrer avec un badge classique au cas où le capteur ne fonctionnerait plus.
Enfin, même si elles rappellent encore les films de science-fiction, les techniques avec reconnaissance faciale se développent. Elles consistent à reconnaître le visage de quelqu’un pris en photo par une caméra de surveillance à l’entrée de l’immeuble et à lui donner accès ou à le lui refuser en fonction des autorisations fournies préalablement. Un logiciel repère les traits du visage afin de comparer avec celles d’une base de données. Attention, ces techniques sont cependant très encadrées en France et la CNIL, qui analyse les conséquences des innovations technologiques et des usages émergents sur la vie privée et les libertés, indique que ce type de technologie nécessite une «analyse d’impact relative à la protection des données» (AIPD) avant de pouvoir être installée.
Une délibération de la CNIL n° 2019-001 du 10 janvier 2019 précise d’ailleurs le cadre dans lequel ce type de technologie peut être utilisé. Si dans l’espace privé (derrière des interphones ou des portes), ces technologies sont acceptées mais encadrées, dans l’espace public, la reconnaissance faciale n’est pas autorisée. Pour l’instant, en raison de son coût mais aussi des risques liés à l’utilisation des données, ce type de technologie est de toutes façons très peu utilisé en copropriété. Même si ces outils semblent éloignés des systèmes actuels de contrôle d’accès et des préoccupations des copropriétaires, cela pourrait pourtant se diffuser dans les années à venir. Qui aurait pensé, en effet, il y a encore quelques années qu’un téléphone portable pourrait ouvrir une porte !
Si la copropriété est confrontée à une réflexion de ce type, outre le coût, il est important de penser aux modalités pratiques. Par exemple, la copropriété devra-t-elle automatiquement prendre un prestataire chargé d’actualiser la liste et les autorisations des résidents en cas de déménagement ou bien un copropriétaire, par exemple membre du conseil syndical, qui s’y connait en informatique peut-il réaliser ce travail ? Autre question à se poser en amont : quels sont les coûts d’une réparation en cas de panne ? Ces systèmes sophistiqués peuvent être fragiles et il sera intéressant de se pencher notamment sur l’intérêt d’un contrat d’entretien.
Autre sujet à garder à l’esprit : une copropriété rassemble un nombre important de personnes d’âge et de ressources variés ce qui implique de conserver des systèmes de contrôle d’accès permettant à tout le monde de rentrer chez lui sans encombre. Plusieurs systèmes de contrôle d’accès doivent cohabiter et être compatibles. Enfin, les nouvelles technologies nécessitent généralement des remises à niveau du matériel que ce soit le réseau électrique des parties communes ou encore la porte elle-même. Certains fabricants assurent que le matériel peut être adapté à des portes ou des éléments plus anciens mais ce n’est vrai que dans une certaine mesure. Il faut donc examiner tout ce que les changements impliquent comme travaux additionnels et donc comme coûts.
La vidéosurveillance
Autre élément connexe au contrôle d’accès : la vidéosurveillance. Devenue courante dans les immeubles résidentiels, elle consiste à installer des caméras de sécurité dans des espaces communs pour surveiller et enregistrer les activités. L’objectif principal de la vidéosurveillance en copropriété est de dissuader les comportements délictueux tels que le vol, le vandalisme et les intrusions. En cas d’incident, les enregistrements peuvent également servir de preuve pour aider à identifier les auteurs qui peuvent être poursuivis. Attention, sauf dans les très grandes copropriétés dotées de moyens particuliers, la surveillance n’est pas continue, le gardien n’est pas posté en permanence devant ses caméras. Mais quand un incident se produit, il est possible d’aller chercher les images afin de voir ce qui s’est passé.
C’est souvent à la suite de vandalisme, de cambriolage que les copropriétés décident de passer à ce type de solution. Le coût de l’installation pour chaque caméra est de 600 à 1 000 euros mais les installateurs notamment Sistel indiquent que cela peut être plus élevé lorsqu’on prend en considération le matériel de stockage des images, le câblage, et la configuration. Pour installer un système efficace, il est essentiel de choisir les bons emplacements pour installer les caméras de sécurité. Ces emplacements stratégiques incluent généralement les zones d’accès, telles que les entrées principales, les ascenseurs, éventuellement les couloirs et les parkings. Autrement dit, il s’agit de protéger les zones sensibles de l’immeuble.
En fonction de la configuration de l’immeuble et des besoins, les tarifs peuvent donc être différents. En ce qui concerne les caméras elles-mêmes, la technologie a fait des progrès non négligeables. Les caméras offrent des fonctionnalités avancées telles que la résolution haute définition ou une vision nocturne. Elles peuvent être équipées d’un détecteur de mouvement, à capacité panoramique, d’inclinaison ou de zoom et être connectées en Wifi à un réseau sans nécessiter un câblage. Les images peuvent être stockées sur un enregistreur vidéo en réseau (NVR) ou un serveur local. Certains systèmes de vidéosurveillance offrent même des fonctionnalités de stockage cloud pour une sauvegarde sécurisée des données et une consultation à distance. Les installations les plus sophistiquées offrent même des fonctionnalités avancées telle que l’analyse vidéo intelligente qui permet de détecter des comportements suspects ou des évènements anormaux. Les installateurs sont nombreux mais il est préférable de choisir un professionnel accrédité par l’AFNOR ou encore certifiés Vidéosurveillance SVDI par le bureau Véritas.
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L’encadrement de la vidéosurveillance
Par ailleurs, l’utilisation de la vidéosurveillance est strictement encadrée. Ainsi, la CNIL indique que les images et les enregistrements ne doivent pas être librement accessibles à l’ensemble des habitants. Seuls, le syndic, les membres du conseil syndical, le gestionnaire de l’immeuble ou le gardien peuvent avoir accès aux images. Ces dernières peuvent être consultées seulement en cas d’incident et non pour surveiller les allers et venues.
La durée de conservation des images ne doit pas dépasser un mois. En revanche, si des incidents surviennent, les images liées à ces derniers sont extraites et peuvent être conservées plus longtemps. Les personnes filmées doivent être informées qu’elles se situent dans un espace placé sous vidéosurveillance notamment au moyen d’un pictogramme. De plus, les caméras ne doivent pas filmer les parties privatives, c’est-à-dire les appartements. Des informations sont données au public notamment le nom et les coordonnées du responsable (généralement le syndic) comme le prévoit l’article 13 du RGPD et l’article 104 de la loi Informatique et libertés.
La décision de poser de la vidéosurveillance se prend en assemblée générale : cela relève de travaux relevant de la sécurité des occupants et donc de la majorité de l’article 24, c’est-à-dire la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance (24, a).
Toutefois, si les lieux ne sont pas ouverts au public : c’est-à-dire les espaces auxquels on accède par des digicodes, des portes d’accès etc, aucune déclaration n’est à réaliser. En revanche, si les lieux sont ouverts au public, il faut faire une demande d’autorisation auprès du préfet de département car cela revient à filmer l’espace public.
Enfin, le syndic doit tenir un registre de vidéosurveillance qui centralise les données liées aux caméras, à leur entretien et au stockage des images.
La question des contrôles d’accès se pose tout particulièrement en cas de présence dans l’immeuble de professions telles des médecins, des avocats ou encore de commerces et de bureaux. Depuis l’ordonnance du 30 octobre 2019, les modalités d’ouverture des immeubles sont passées de la majorité de l’article 26 à la majorité de l’article 25 (g). Dans tous les cas, lorsqu’il existe des activités dans l’immeuble, les modalités d’ouverture doivent être compatibles avec cette activité. Lorsque l’immeuble est fermé mais qu’il est possible d’ouvrir à distance, le système de contrôle d’accès est considéré comme compatible avec l’activité. Ainsi en a jugé la Cour de cassation dans un arrêt du 3 février 2004 (n° 02-17.377). En revanche, s’il s’agit d’un système qui ne permet pas d’ouverture à distance, il faut se mettre d’accord sur des horaires pendant lesquelles l’immeuble reste ouvert. Et si le système de contrôle d’accès pose un préjudice réel, le contrôle d’accès doit alors être voté à l’unanimité. Il est donc important de bien réfléchir le contrôle d’accès en amont.