Copropriété : Syndic professionnel : l’irrésistible mue ? - Qu’est-ce qu’un syndic professionnel ?

par Sophie MICHELIN-MAZÉRAN, journaliste juridique
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Qu’est-ce qu’un syndic professionnel ?

La question peut paraître incongrue, alors que cette profession existe depuis 85 ans. «Elle apparaît officiellement en 1938 à la faveur de la loi tendant à régler le statut de la copropriété, avant d’être réglementée par la loi Hoguet du 2 juillet 1970 sur l’exercice des professions immobilières et par la loi du 10 juillet 1965 sur la copropriété», expliquent Gaétan Brisepierre et Claire Juillard, sociologues, en charge d’un projet de recherche sur les mutations contemporaines du métier de syndic.

À ces textes fondateurs, s’ajoutent les lois ALUR de 2014, et ELAN de 2018, ainsi que l’ordonnance du 30 octobre 2019, qui sont venues modifier les équilibres en place dans le sens d’un élargissement des missions du syndic et d’un contrôle plus exigeant de ses activités (contrat-type, rémunération forfaitaire, compte bancaire séparé…).

«Malgré cela, l’activité de syndic, dans toute sa richesse et sa complexité, demeure méconnue : par exemple, certains copropriétaires confondent les charges et les honoraires du syndic !», lance l’administrateur de biens lyonnais Renaud Franchet, co-gérant et associé de Franchet & Cie.

Une profession réglementée.- Pourtant, les conditions d’exercice de la mission de syndic sont réglementées. «Pour pouvoir exercer, le syndic doit être titulaire d’une carte professionnelle, délivrée par la chambre de commerce et d’industrie pour une durée de trois ans renouvelables», indique l’administrateur de biens, Guillaume de Coëtlogon, président du cabinet parisien Saint-Germain.

L’obtention de cette carte impose au syndic de justifier de sa moralité, d’un niveau de compétences minimal (diplôme ou équivalence en expérience professionnelle), d’une assurance de responsabilité civile professionnelle, mais aussi d’une garantie financière destinée à rembourser les fonds perçus en cas de défaillance.

«Les syndics professionnels sont également soumis à une obligation de formation continue de 42 heures, réparties sur une période de trois ans», complète Renaud Franchet.

Dépourvue d’instance de régulation.- En revanche, et contrairement à d’autres professions réglementées, les syndics ne relèvent pas d’un ordre chargé de réguler l’exercice de la profession.

Et si la loi ELAN a créé une commission de contrôle des activités de transaction et de gestion immobilières, elle n’est jamais entrée en fonction. En bref, il n’existe pas d’instance ordinale dotée d’un pouvoir disciplinaire direct pour sanctionner les pratiques irrégulières de certains acteurs.

Certes, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) procède à des contrôles réguliers auprès des syndics, mais ceux-ci restent imparfaits. 

«En réalité, ce sont les opérateurs de garantie financière qui jouent ce rôle de régulation en exerçant un contrôle sur les fonds qu’ils assurent, via un audit, annuel ou bisannuel, selon les volumes financiers en jeu. Seulement, tous ne s’emparent pas de cette mission», relève Renaud Franchet.

Cette absence d’instance supérieure de contrôle est-elle à l’origine de la mauvaise image dont souffrent les syndics à qui l’on reproche, classiquement, un défaut de transparence, des facturations abusives, un manque de réactivité, voire de diligence… ? Sans doute, mais pas seulement. 

«Bien souvent, les copropriétaires nous voient comme des collecteurs d’impôts, des porteurs de mauvaises nouvelles issues d’obligations réglementaires renforcées, pas toujours bien comprises, tels que le plan pluriannuel de travaux ou le fonds travaux pour ne citer qu’eux», déplore Guillaume de Coëtlogon. 

«Il est vrai que le syndic représente pour les pouvoirs publics une porte d’entrée vis-à-vis des copropriétés. Et en cela, on lui fait peser beaucoup de responsabilités, quand il n’est pas le bouc émissaire de toutes les difficultés rencontrées dans les immeubles», analysent Gaétan Brisepierre et Claire Juillard.