[N°647] - Surélévation : quand les copropriétés prennent de la hauteur - Un cadre législatif et réglementaire bien précis… mais assoupli

par Paul TURENNE
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Un cadre législatif et réglementaire bien précis… mais assoupli


Depuis l’ordonnance n° 2013-889 relative au développement de la construction de logement du 3 octobre 2013 et la loi n° 2014-366 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi ALUR, la construction de nouveaux lots, toits et terrasses se trouve facilitée.

Reste qu’avant d’entamer toute démarche de surélévation, il convient de s’assurer que le projet est rigoureusement conforme aux règles prévues par les prescriptions locales. En particulier, celles figurant dans le plan local d’urbanisme : règles de hauteur, de volume, de gabarit, relatives à l’aspect extérieur, sans compter les caractéristiques architecturales du bâtiment existant.

Pour ce qui concerne les immeubles existants, de nombreuses dérogations aux règles d’urbanisme en vigueur sont prévues. Elles peuvent, par exemple, porter sur les règles définissant le gabarit, fixées par le règlement du PLU, et permettent ainsi de déroger à la hauteur maximale de construction. Toutefois, pour s’appliquer, le projet doit concerner la surélévation d’un bâtiment construit depuis plus de deux ans, respecter les objectifs et orientations du plan d’urbanisme, répondre aux objectifs de créations d’unités de logement et de mixité sociale, mais aussi s’intégrer harmonieusement dans la façade sur la rue et le milieu urbain environnant, proche et lointain.

À noter  
> si le Règlement du plan d’occupation des sols (Pos) n’est pas précis quant aux immeubles visés, qu’ils soient anciens ou neufs, les travaux de surélévation ne méconnaissent pas les dispositions du POS (Conseil d’État, 5e et 4e chambres réunies, 1e juin 2016, n° 387794).



Les points essentiels de la réforme de la loi ALUR concernant la surélévation

L’alinéa 1er de l’article 35 de la loi de 1965 imposait l’unanimité pour décider la surélévation ou la construction de nouveaux bâtiments aux fins de créer des nouveaux locaux à usage privatif. Un copropriétaire défavorable à la surélévation pouvait donc bloquer le vote d’une résolution allant dans ce sens. Une telle décision peut désormais être prise à la majorité de l’article 26, soit à la majorité des membres du syndicat représentant au moins les 2/3 des voix. De ce fait, toute clause du règlement de copropriété exigeant la majorité absolue ou l’unanimité est réputée non-écrite.

Par ailleurs, dès lors que le bâtiment est situé dans un périmètre sur lequel est institué un droit de préemption urbain, l’aliénation de ce droit de surélévation par le syndicat des copropriétaires, relève de la majorité de l’article 25.

Enfin, l’accord des copropriétaires de l’étage supérieur n’est plus requis en cas de surélévation par le syndicat ou par un tiers bénéficiant de la cession du droit de surélévation. Toutefois, les copropriétaires de l’étage supérieur bénéficient d’un droit de priorité sur les nouveaux locaux, créés ou pouvant potentiellement être créés, lors de la vente de nouveaux lots, ou lors de la cession du droit de surélever. Ce droit de priorité est prévu par l’article 35 de la loi du 10 juillet 1965 : «Préalablement à la conclusion de toute vente d’un ou plusieurs lots, le syndic notifie à chaque copropriétaire de l’étage supérieur du bâtiment surélevé l’intention du syndicat de vendre, en indiquant le prix et les conditions de la vente». Cette notification vaut vente pendant deux mois à compter de sa notification.


Redressement des combles ou surélévation ?

La jurisprudence définit la surélévation comme un «exhaussement de la panne faîtière centrale» ou, pour le dire autrement, de la ligne de faîtage du toit. Ainsi, en cas de simple redressement des combles, avec aménagement de ces derniers, la surélévation sera considérée comme «partielle» (Cass. 3e civ., 6 mars 1991, n° 89-18.758) et ces travaux privatifs affectant les parties communes devront être votés à la majorité de l’article 25.

À noter  
> Lorsque la copropriété est composée de plusieurs immeubles, l’article 35 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit que le vote de l’assemblée générale s’accompagne d’une «confirmation par une assemblée spéciale des copropriétaires des lots composant le bâtiment à surélever statuant à la majorité [de l’article 26]».
> La loi ALUR a supprimé l’obligation de respecter un coefficient d’occupation des sols (COS) qui conditionnait l’octroi d’un permis de construire. A Paris, cette suppression des règles de densité a ouvert des droits à construire complémentaires sur un nombre important de parcelles parisiennes. Des possibilités de surélévation qui se retrouvent, en particulier, dans les 60 000 parcelles comportant des bâtiments construits avant 1940 et majoritairement constitués de logements. Pas moins de 40 000 nouveaux logements devraient ainsi voir le jour à Paris, si la Ville atteint son objectif de surélever 12 % des immeubles, avec un à cinq niveaux supplémentaires selon les cas. Soit plus de 11 000 immeubles au total.