[N° 573] - Les travaux périlleux en copropriété

par Paul TURENNE
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Index de l'article

Lorsque des travaux ne peuvent être réalisés à l’aide d’un échafaudage classique ou d’une nacelle, la copropriété se doit de faire appel à des professionnels spécialisés dans les travaux périlleux. Un choix qui implique des règles de sécurité strictes et une organisation bien rodée.

Crédit : FLT Expertise

Si un gardien d’immeuble peut tout à fait être sollicité pour intervenir sur de petits travaux de maintenance, la réglementation est beaucoup plus stricte dès lors qu’il s’agit d’agir sur des installations électriques, des ascenseurs ou d’effectuer des travaux en hauteur, sans un matériel de sécurisation adapté.
Différents besoins peuvent justifier une intervention en hauteur. A commencer par le nettoyage des toitures, des chenaux, des façades ou des vitrages. Suivant les configurations, un nettoyeur haute pression, un canon à mousse ou des produits spécifiques peuvent être utilisés. Les émalites (verres laqués) ou les structures en aluminium nécessitent aussi parfois une rénovation pour retrouver leurs éclats originels. Enfin, la pose de pics ou de filets antivolatiles peut rarement se faire sans le concours d’un prestataire spécialisé.
Les travaux de maçonnerie ou de mise en sécurité des façades sont également relativement fréquents en copropriété, en particulier dans le cas des immeubles anciens. Réparations de fissures ou de crevasses, purges de façades, ou bien encore, réparations des épaufrures (éclats de bétons) avec des produits de mortiers fibrés sur les façades, les appuis de fenêtres, les balcons, ou les acrotères (murets situés en bordure des toitures terrasses pour permettre le relevé d’étanchéité)… Autant de travaux pour lesquels la pose d’un échafaudage n’est pas toujours rentable, mais qui n’en demeurent pas moins indispensables, la responsabilité du syndicat ainsi que celle du syndic étant engagées en cas de chutes de morceaux sur la chaussée et a fortiori, sur une personne.
Pour les travaux de peinture, de lasure ou d’imperméabilisation, même lorsqu’un échafaudage est installé, certaines parties demeurent difficilement accessibles, voire inaccessibles, comme les pignons d’immeubles, les toitures en bas de façades ou celles surmontant des courettes. L’utilisation de cordistes est alors indispensable, tout comme pour la plupart des travaux de zinguerie, tels que la pose ou le remplacement des chéneaux, des gouttières ou des descentes d’eaux pluviales.


Réglementation stricte

Pour tous ces travaux, des qualifications spécifiques (cf. qualifications Qualibat sur www.informationsrapidesdelacopropriete.fr) et un matériel de sécurisation sont exigés. En effet, à partir du moment où un salarié transite ou travaille en hauteur, il doit être protégé contre d’éventuelles chutes.
S’agissant des protections collectives, l’article L. 4121-2 du Code du travail énonce les mesures de prévention qui doivent être respectées et notamment le principe selon lequel la protection collective prime sur la protection individuelle. Les articles R4224-5 et R4224-6 imposent ,quant à eux, une protection contre les chutes pour les passerelles, planchers en encorbellement, plateformes en surélévation et leurs moyens d’accès.
Pour tout travail ou circulation à plus de 2 mètres de hauteur, une protection contre le risque de chute dans le vide doit également être mis en place au moyen de garde-corps placés entre 100 et 110 cm avec une lisse intermédiaire à mi-hauteur et de plinthes de 15 cm au moins. A défaut, lorsque la mise en place de tels dispositifs est jugée impossible, d’autres dispositifs de protection collective doivent permettre d’arrêter une personne à moins de 2 mètres (planchers, auvents, …) ou à moins de 6 mètres (filets).
Les équipements de protection individuelle (EPI) doivent, par ailleurs, avoir subi un contrôle et une vérification générale depuis moins d’un an au moment de leur utilisation, selon les articles R.4323-99 à R.4323-103 du Code du travail et un arrêté du 19 Mars 1993.

Photo : Travaux sur pignon inaccessible - Crédit Etna


Les lignes de vie

Permettant une protection individuelle totale, une ligne de vie peut être installée sur les toitures quelle que soit leur inclinaison, sur les terrasses, aux plafonds ou sur les murs. Ce support, soit horizontal (il est alors soumis à la norme EN 795), soit vertical (norme EN 353-1) est constitué par un câble d’assurage, fixé à des ancres fixes, sur lequel coulisse le mousqueton relié à l’EPI de la personne assurée.
Deux types de lignes de vie peuvent être utilisées. Les premières, dites “à câble” sont constituées d’un câble d’un diamètre de 8 ou 10 mm en acier inoxydable, d’ancrages d’extrémités et intermédiaires, ainsi que d’absorbeurs d’énergie pour limiter l’impact des forces chocs sur la structure en cas de chutes. Les points d’ancrages doivent correspondre à la norme EN795, classe A.

Photo : Ligne de vie autoportante - Crédit KeeSafety


S’ils peuvent être installés sur des structures en béton, métalliques, ou bien encore en bois, les points d’ancrage posés sur structure béton doivent être testés à l’arrachement à l’aide d’un extractomètre.
Les secondes dites “à rail” sont constituées d’un rail relié à la structure à intervalles réguliers et d’un coulisseau pouvant être autobloquant dans le cas d’une ligne verticale.
Quoi qu’il en soit, le salarié qui progresse ainsi en hauteur n’est pas dispensé de porter les EPI obligatoires : harnais, longes, antichutes à enrouleur et casque.
L’entreprise qui procède à l’installation d’une ligne de vie doit, par ailleurs, effectuer une étude approfondie puis remettre, à la réception de l’équipement, un dossier technique spécifique détaillant l’ensemble des caractéristiques de l’installation. ●

Photo : Extractomètre numérique - Crédit DR

Paul TURENNE


Les normes applicables…
…pour les dispositifs d’ancrages

Le dispositif fixe ou mobile est défini par la norme EN 795 qui distingue 5 classes :
- Classe A : Points d’ancrage fixes (A1: ancre structurelles prévues pour être fixées verticales, horizontales ou inclinées, A2 : ancre prévues pour toitures inclinées.
- Classe B : Points d’ancrage provisoires transportables : poutres, clavette, trépied, sangles,
- Classe C : Assurages flexibles horizontaux (lignes de vie),
- Classe D : Rails d’assurage rigides horizontaux,
- Classe E : Ancres à corps mort.
Tous ces dispositifs subissent des essais de résistance pour obtenir l’appellation CE de Type EN 795. Pour les ancrages de la classe A et C il est recommandé de soumettre l’ancre en place à une force de traction de 5 kN, pendant 15 secondes.
La ligne de vie verticale, bien qu’étant proche des systèmes relatifs à la norme EN 795, dépend de la norme EN 353 :
EN 353/1 : Antichute mobile incluant un support d’assurage rigide.
EN 353/2 : Antichute mobile incluant un support d’assurage flexible.

… pour les échafaudages

- NF EN 1298 : Échafaudages roulants de service. Règles et grandes lignes pour la préparation d’un manuel d’opération,
- NF P 93-520 : Équipement de chantier. Échafaudages roulants préfabriqués de faible hauteur,
- NF HD 1000 : Échafaudages de service en éléments préfabriqués. Matériaux, dimensions, charges de calcul et exigences de sécurité,
- NF HD 1004 : Échafaudages roulants de service en éléments préfabriqués. Matériaux, dimensions, charges de calcul et exigences de sécurité..


A savoir

Le vote des travaux
Lorsque les travaux envisagés dépassent un certain montant décidé par l’assemblée générale, le syndic a l’obligation de faire établir plusieurs devis. Une mise en concurrence qui s’impose aussi bien pour les travaux d’entretien que pour ceux plus importants.
Par ailleurs, si l’ouverture du chantier y est conditionnée, le syndic peut tout à fait demander une provision aux copropriétaires avant d’avoir pu recueillir leur accord, dès lors qu’il s’est concerté avec le conseil syndical. La provision ne doit toutefois pas dépasser le tiers du montant du devis estimatif des travaux.