Chaque année en France, les incendies domestiques provoquent près de 800 morts et 10 000 blessés et intoxiqués. En copropriété, quelle est la réglementation et quelles sont les règles de prévention et d’action pour éviter le drame ?
Toutes les deux minutes, un incendie se déclare en France, dont 70 % en journée… Mais pour ceux ayant lieu la nuit, 70 % sont mortels, faute d’avertissement sonore !
La prévention incendie s’avère donc un enjeu majeur, notamment au sein des copropriétés où la propagation des flammes peut se révéler dévastatrice.
C’est tout l’enjeu d’un arrêté du 31 janvier 1986 qui fixe les règles applicables dans les immeubles d’habitation pour limiter le risque incendie. Preuve de l’importance de la législation en la matière ? 96 % des décès ont lieu dans des immeubles non assujettis à l'arrêté en question puisqu’ils ont été construits avant sa parution...
Article paru dans les Informations Rapides de la Copropriété numéro 673 de novembre 2021
Origines et causes
Les départs de feux
Selon le rapport de la Commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, de Pierre Morange et Damien Meslot, pour la proposition de loi n° 2005-2535 du 5 octobre 2005, visant à rendre obligatoire l'installation de détecteurs de fumée dans tous les lieux d'habitation, les départs de feux se déclarent pour :
- 25 % dans les cuisines ;
- 19 % dans les caves et chaufferies ;
- 16 % dans les locaux de poubelles ;
- 12 % dans les escaliers ;
- 11 % sur les toitures et terrasses ;
- 10 % dans les chambres ;
- 6 % dans les salons ;
- 1 % dans les salles de bain.
Les causes premières
- Des installations électriques défectueuses (un incendie sur quatre a pour origine un problème électrique) ;
- l’inattention dans les activités ménagères ;
- la présence de produits inflammables près d’une source de chaleur ;
- le mauvais fonctionnement d’appareils de chauffage ;
- le désordre, tant dans les parties privatives, que dans les parties communes ;
- le non-respect des installations de protection incendie (Source : Arc).
Encadrement légal des immeubles
Pour les immeubles anciens
En matière de sécurité incendie, les immeubles ne sont pas tous égaux devant la loi. Pour les demandes de permis de construire antérieures au 31 décembre 1960, les bâtiments relèvent au mieux des dispositions du décret n° 55-1394 du 22 octobre 1955 fixant les règles générales de construction des bâtiments d’habitation. Et pour cause, il n’existait, à l’époque, aucune réglementation nationale unique.
Pour les demandes déposées entre le 1er janvier 1961 et le 29 septembre 1970, les immeubles relèvent, outre du décret du 22 octobre 1955 susvisé, de l’arrêté du 23 mai 1960 relatif à la protection des bâtiments d’habitation contre l’incendie, à la sécurité et à la sauvegarde des personnes en cas d’incendie.
Enfin, pour les demandes déposées entre le 30 septembre 1970 et le 5 mars 1987, les immeubles relèvent, outre le décret du 22 octobre 1955 susvisé, de l’arrêté du 10 septembre 1970 relatif à la protection des bâtiments d’habitation contre l’incendie.
Pour les immeubles récents
L’article 3 de l’arrêté du 31 janvier 1986 relatif à la protection contre l’incendie des bâtiments d’habitation, classe les différents types d’immeubles en quatre familles principales. Avec pour chacune d’elle, des obligations minimales de résistance au feu ; les plus élevées étant celles des habitations de la quatrième famille.
• La première famille regroupe les habitations individuelles à un étage sur rez-de-chaussée, isolées ou groupées en bandes et dont les structures de chacune d’elles sont indépendantes de celles des habitations contiguës.
• La deuxième famille regroupe les mêmes types d’habitations que pour la première famille, dès lors que les structures de chacune d’elles ne sont pas indépendantes de celles des habitations contiguës.
Sont également incluses dans cette famille les habitations collectives de trois étages maximum sur rez-de-chaussée de moins de huit mètres de haut. Toutefois, il est à noter qu’un quatrième étage duplex peut être intégré à cette famille sous réserve que le logement dispose d'une pièce principale et d'une porte palière au troisième étage, avec un plancher doté d’une résistance au feu suffisante (art. 6, arrêté du 31 janvier 1986).
• La troisième famille inclut les immeubles dont le sol du dernier logement se trouve à moins de vingt-huit mètres au-dessus du sol et facilement accessible aux engins des services de secours. Cette famille se décompose ensuite en deux classes différentes :
- Classe A, pour les immeubles possédant tout à la fois : sept étages maximum ; des logements dont la porte palière n’est pas située à plus de dix mètres de la cage d’escalier ; un stationnement d’engins de secours à moins de huit mètres de l’entrée.
- Classe B, pour les immeubles de moins de vingt-huit mètres de haut ne satisfaisant pas aux obligations précédentes, et dont les logements sont situés à moins de cinquante mètres d’une voie ouverte à la circulation.
• La quatrième famille, enfin, regroupe les immeubles dont le plancher bas du niveau le plus haut est situé à cinquante mètres maximum au-dessus du niveau du sol utilement accessible aux engins des services de secours, et qui ne relèvent pas des trois autres familles d'habitation. Par ailleurs, si le bâtiment comporte des locaux à usage autre que ceux d’habitation, au-delà de vingt-huit mètres de haut, il sera classé en Immeuble de grande hauteur (IGH). Avec des contraintes bien plus importantes à la clé.
Détecteurs de fumées : jamais dans les parties communes ! - Les détecteurs autonomes avertisseurs de fumée (DAAF) sont particulièrement recommandés dans les parties privatives, au plafond dans le couloir qui mène aux chambres, voire un par chambre. Plusieurs études ont, en effet, montré qu’il permettrait d’éviter 80 % des décès en cas d’incendie. En revanche, installer des DAAF dans les parties communes des immeubles est une très mauvaise idée. En cas d’incendie, les habitants qui sortiraient sur le palier seraient alors exposés aux fumées toxiques et feraient entrer de l’air, ce qui raviverait l’incendie.
Cas des immeubles de grande hauteur
Dès lors que le plancher bas du niveau le plus haut est situé à plus de cinquante mètres au-dessus du niveau du sol, un immeuble d’habitation va être classé IGH. Il est alors soumis à une réglementation plus restrictive avec, comme texte principal, l’arrêté du 18 octobre 1977 modifié par les arrêtés du 22 octobre 1982, du 16 juillet 1992 et du 30 décembre 2011.
Chaque niveau doit ainsi être recoupé en plusieurs volumes - à la surface inférieure ou égale à celle du niveau – séparés par des éléments coupe-feu, de degré une heure, et avec des blocs-portes pare-flammes, de degré trente minutes, équipés de ferme-porte.
Par ailleurs, la distance mesurée entre tout poste de travail ou appartement et le dispositif d’évacuation le plus proche, doit être au maximum de trente-cinq mètres.
En outre, chaque compartiment de l’immeuble doit, comporter un service local de personnel de sécurité ayant pour missions de déclencher l’alarme et l’alerte en cas de danger, d’organiser l’évacuation du compartiment ou encore de rendre compte de la situation au poste central de sécurité.
Le syndicat des copropriétaires d’un IGH à usage d’habitation doit également s’assurer que des vérifications réglementaires sont bien effectuées par des personnes ou organismes compétents agréés par le ministère de l’intérieur. Doivent ainsi être vérifiés :
- tous les six mois, le fonctionnement des ascenseurs et monte-charge ;
- une fois par an, les moyens de secours, de détection, de prévention contre l’incendie ;
- tous les trois ans, les installations électriques des parties communes ;
- tous les cinq ans, les paratonnerres.
Éteindre les feux
Extinction : les consignes à retenir
Un feu nécessite, pour prendre, la combinaison de trois éléments : un combustible, de l’air et une source de chaleur. On parle ainsi de «triangle du feu». Il suffit donc de supprimer un seul de ces trois éléments pour en venir à bout. Mais à chaque type de feu ses solutions pour l’éteindre :
• Feux secs ou solides (classe A).- Issus de la combustion du bois, du papier, du carton ou de tissu, ces feux peuvent être éteints par étouffement avec une simple couverture humide, en cas de feu localisé uniquement. Une couverture anti-feu fera également l’affaire. Pour plus de sécurité, un extincteur sera requis en attaquant bien les flammes par le bas. Ce dernier peut être à base d’eau pulvérisée associée à un additif à poudre AB, ou bien de poudres polyvalentes ABC.
• Feux gras (classe B).- Souvent rencontrés dans les parkings, voire les cages d’ascenseurs, ces feux ont lieu lorsque des huiles, essences ou graisses s’enflamment. Ils peuvent s’éteindre par étouffement avec des projections de sable, de terre, ou via une couverture humide. Mais il ne faut jamais utiliser de l’eau seule car cela contribuerait à déplacer l’incendie. Des extincteurs à poudres polyvalentes, avec de l’eau pulvérisée associée à un additif, ou bien à C02 (gaz carbonique), peuvent également en venir à bout. En l’occurrence, le dioxyde de carbone contenu sous forme liquéfiée et gazeuse va refroidir, diminuer la teneur en oxygène et créer un effet de souffle.
A noter : en cas d’incendie domestique (feu de friture ou de poêle), il faut placer un couvercle ou une serpillière humide sur l’appareil pour étouffer les flammes.
• Feux de gaz (classe C).- Issus de l’enflammement de butane ou de propane, ces feux ne peuvent être traités qu’en coupant l’arrivée de gaz, que ce soit au compteur pour du gaz de ville ou au robinet pour une bouteille. Le risque d’explosion est très important, d’où l’importance de n’intervenir que si l’on est sûr de pouvoir éteindre le gaz immédiatement. Il convient, en outre, de ne pas fumer et d’éviter tous risques d’étincelles, notamment via un interrupteur électrique ou un appel téléphonique.
De manière générale, il faut toujours :
• appeler les sapeurs-pompiers avant de débuter la lutte contre un incendie ;
• quitter les lieux après avoir fermé toutes les portes et fenêtres pour retarder la propagation des flammes, mais aussi avoir placé des chiffons humides sous les portes pour empêcher la pénétration des fumées ;
• avertir les autres occupants de l’immeuble encore sur place ;
• s’engager dans les couloirs ou escaliers ne comportant pas de fumée ;
• avancer vers les issues de secours, sans revenir sur ses pas.
Extincteurs : les règles à connaître
Les extincteurs doivent obligatoirement être mis à disposition dans les parkings et les chaufferies.
Les articles 95 et 96 de l’arrêté du 31 janvier 1986 imposent ainsi l’installation d’un extincteur pour quinze voitures, ainsi que la présence d’une caisse de 100 litres de sable et d’une pelle à chaque niveau de parking. Attention, des systèmes d'extinction automatique à eau (sprinklers) sont obligatoires, dès lors que le parking dépasse trois niveaux.
S’agissant des chaufferies, les obligations varient en fonction du mode de chauffage. Pour une chaufferie fioul, deux extincteurs par brûleur doivent être présents dans la chaufferie (avec un maximum de quatre). Il faut aussi prévoir un extincteur supplémentaire au sein du local de stockage du fioul s’il n’est pas au même endroit.
Pour ce qui est d’une chaufferie gaz, il suffit d’un extincteur à poudre polyvalente ABC «de classe minimum 5A-34B accompagné d’un panneau précisant "Ne pas utiliser sur flamme gaz"».
* La maintenance est réglementée par les dispositions du « guide pour la maintenance des extincteurs mobiles » du Comité national du matériel d'incendie et de sécurité (CNMIS) et de la « règle d’installation R4 » de l’Assemblée plénière des sociétés d’assurances dommage (Apsad).
Elle consiste en :
• une vérification de l’aspect physique : emplacement, numérotation, fixation, état de la peinture et de la sérigraphie, état du flexible ;
• une vérification mécanique : sécurité et plombage individuel, date de mise en service, contrôle de la cartouche (extincteurs pression auxiliaire) par pesée, vérification des joints, de l’agent extincteur (fluidité de la poudre ou propreté de l’eau), des organes d’émission (lance, gâchette, etc). A l’issue de la vérification, le prestataire doit apposer un nouveau plomb.
Éclairage et blocs de secours
Obligatoire dans les escaliers des immeubles de troisième et quatrième familles, les éclairage de secours peuvent prendre différentes formes. Ainsi, si pour les immeubles de quatrième famille, la loi impose la présence de blocs autonomes, la dérivation d’une ligne électrique issue du tableau principal dans les escaliers protégés (cf. encadré : Escaliers protégés : quézaco ?), est possible pour des immeubles de la troisième famille, dès lors qu’elle est directe, protégée et qu’elle évite les sous-sols.
En revanche, l’éclairage de sécurité n’est pas imposé pour les escaliers à l’air libre (escalier dont la paroi donnant sur l’extérieur est ouverte sur au moins la moitié de sa surface sur toute sa longueur).
S’agissant des parkings enterrés ou aveugles, un éclairage de secours composé de couples de foyers lumineux - l’un situé en partie haute, l’autre en partie basse à un demi-mètre maximum du sol - doit obligatoirement être installé. Objectif ? Rendre suffisamment visibles des inscriptions ou signalisations («sans issue» ou «sortie», par exemple), avec au moins une heure de fonctionnement dans les parcs de stationnement.
Placés le long des allées de circulation et près des issues, ces blocs autonomes sont alimentés par un groupe électrogène.
Escaliers protégés : quézaco ?
- Ces escaliers sont tout à la fois desservis à chaque niveau par une circulation horizontale protégée, avec laquelle ils ne communiquent que par une seule issue, et ils ne comportent que des canalisations d’éclairage, des canalisations métalliques d’eau et colonnes sèches ou des canalisations de gaz.