L’ordonnance de 2019 permet à certaines copropriétés dépourvues de lots à usage d’habitation de ne pas être soumises au statut de la loi de 1965.
Quels choix s’offrent alors au praticien comme aux copropriétaires ?
Eliane Frémeaux :
«Il faut saluer les perspectives qu’offrent la réforme. Si l’immeuble ne comprend aucun lot à usage d’habitation, le choix est ouvert. Les propriétaires peuvent opter pour le régime de la copropriété ou écarter le statut, même en cas de division par lots, la formule de division n’imposant plus la formule de gestion de la loi de 1965. Pour déroger au statut de la copropriété, les propriétaires doivent adopter «une convention y dérogeant expressément et mettant en place une organisation dotée de la personnalité morale et suffisamment structurée pour assurer la gestion de leurs éléments et services communs». La gestion de l’immeuble suppose la mise en place d’une ASL ou une AFUL mais on peut imaginer d’autres formes d’organisations dotées de la personnalité morale.
Pour les copropriétés existantes en l’absence de tous lots d’habitation, les copropriétaires pourront recourir à la dérogation prévue mais par une décision unanime des copropriétaires ce qui sera difficile à obtenir. Le recours à la scission dans les conditions prévues sous l’article 28 peut aussi être envisagée pour soustraire une partie de l’ensemble immobilier au statut de la copropriété. Elle requiert une décision à la majorité de l’article 25.
Ces nouvelles dispositions s’appliquent depuis le 1er juin 2020, et il faut constater une certaine effervescence autour de leur mise en œuvre pour les immeubles en cours de construction ou de division.
Il incombe aux praticiens d’imaginer, d’initier de nouvelles formules et donc de faire œuvre créatrice. L’important, c’est de ne pas laisser se créer un vide juridique qui conduirait à une absence d’organisation structurée et à un retour sanction au statut de la copropriété.»
Sébastien Maurette :
«Désormais, et sans qu’il soit nécessaire de déroger au statut d’ordre public de la copropriété en «justifiant d’une structure de gestion des éléments communs de l’ensemble immobilier», le « secteur libre » de la copropriété peut s’organiser différemment en utilisant la volumétrie pour répartir le droit de propriété.
Afin d’organiser la répartition des charges et droits de vote, une ASL (ou AFUL) régie par les dispositions de l’ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004, sera mise en place, laissant au rédacteur une grande liberté sur les règles de majorité, de convocation, de délais de recours, de notification des procès-verbaux, de modalités de tenue des assemblées générales (par visioconférence), vote par correspondance….
Pour autant, les règles prévues dans la loi du 10 juillet 1965 sont bien organisées, lisibles, protectrices des intérêts des copropriétaires et les statuts d’ASL se trouvent bien souvent empreints de nombreuses dispositions du statut d’ordre public de la copropriété.»
Sylvie Bouchet :
«Là encore la loi ELAN fait preuve de modernisme. Le statut de la copropriété peut se révéler inadapté à la situation réelle de l’immeuble.
Ici, le notaire pourra opter pour le régime de la division en volume par exemple par dérogation expresse au régime de la copropriété. Seul bémol, mais nécessaire et utile, l’obligation de mettre en place une structure juridique dotée de la personnalité morale (ASL par exemple) afin d’assurer la gestion de l’ensemble immobilier et de ses équipements nécessairement communs.»