[N° 593] - Décider des travaux d’amélioration, de transformation ou d’addition

par Catherine BLANC-TARDY
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Les travaux d’amélioration, de transformation ou d’addition sont soumis à un régime particulier : d’une part, de tels travaux doivent être compatibles avec la destination de l’immeuble et ne pas porter atteinte aux droits des copropriétaires sur leurs parties privatives ; d’autre part, ils doivent être votés par l’assemblée générale à la double majorité de l’article 26 de la loi du 10 juillet 1965. Ces dispositions sont complétées par celles de l’article 30 de la même loi.

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Cet encadrement strict est directement issu de la conception originelle de la copropriété. Sous le régime de la loi du 28 juin 1938, à moins d’une disposition particulière incluse dans le règlement de copropriété, l’amélioration de l’immeuble se révélait impossible, sauf autorisation exceptionnelle aux frais des copropriétaires demandeurs. «L’immeuble doit, en principe, être maintenu tel quel… Pour les travaux d’embellissement, il faudra l’unanimité !» ; tel était le discours de M. Cautru rapporteur de la loi ancienne à la Chambre. Un des grands progrès de la loi du 10 juillet 1965 a été d’avoir rendu possible les améliorations.


Définition des travaux d’amélioration

S’il n’y a pas de définition légale des travaux d’amélioration, l’article 30 de la loi du 10 juillet 1965 en donne toutefois une liste non exhaustive, incluant la transformation d’un ou plusieurs éléments d’équipement existants, l’adjonction d’éléments nouveaux, l’aménagement de locaux affectés à l’usage commun ou la création de tels locaux.

En cas de contestation sur la qualification des travaux, il appartiendra aux juridictions, dans leur souverain pouvoir d’appréciation, de désigner ceux qui relèvent d’un entretien nécessaire (article 24) et ceux qui relèvent d’une amélioration (article 26 - Cass. 3e civ., 10 juil. 1967, D. 1967, somm. 101 ; Cass. 3e civ., 22 oct. 1970, JCP 1971, II, 16580). Les travaux d’amélioration sont ceux qui apportent des éléments supplémentaires de confort et d’habitabilité par rapport aux aménagements préexistants et procurent, de ce fait, une valorisation certaine de l’immeuble (JCl. Copropriété, Fasc. 94, n° 9 ; CA Aix-en-Provence, 4e ch., 30 mars 1999, D. 1999, somm. p. 317, note C. Atias).

Par exemple, la simple modification d’un élément d’équipement existant (par éléments d’équipement, on entend les installations de chauffage, les ascenseurs, les appareils de production et de distribution d’eau chaude et froide) ou son remplacement, si l’élément est irréparable car vétuste, relève d’une décision à prendre à la majorité simple de l’article 24. Leur coût est supporté par tous les copropriétaires selon les règles posées pour les charges communes (article 10, loi du 10 juillet 1965).
En revanche, la mise en place d’un élément d’équipement nouveau pour remplacer l’ancien, encore en état de fonctionner, constitue une amélioration qui relève d’un vote à la double majorité de l’article 26. Leur coût est reparti en proportion des avantages qui en résultent pour chaque propriétaire. Les copropriétaires qui s’y opposent peuvent obtenir le bénéfice de la participation différée (L. 1965, article 33).

Les tribunaux retiennent que, substituer une installation moderne, plus fiable, plus performante, plus économique, relève des travaux d’entretien (article 24), même s’il y a objectivement une “amélioration” par rapport à l’installation ancienne. Ainsi, la cour d’appel de Paris a pu juger que les travaux de remplacement, rendus nécessaires par l’usure des éléments d’équipement communs, constituent des travaux d’entretien relevant de l’article 24, même s’ils ne sont pas effectués à l’identique. Ils ne constituent pas une amélioration dès lors que, depuis les travaux précédents, la technique et la réglementation ont évolué. Maître Jean-Robert Bouyeure précise, dans ses observations relatives à cette décision, que «l’élément déterminant à prendre en compte est le fait générateur des travaux : si le remplacement est rendu nécessaire par la vétusté, le mauvais fonctionnement ou l’usure de l’installation d’origine, il s’agit bien, pour le tout, de travaux d’entretien relevant de l’article 24 et ce, quelle que soit la modification apportée».

Dans chaque cas, selon Jacques Lafond et Jean-Marc Roux (Code de la copropriété, édition Litec 2012, p. 356 et s), il faut rechercher si les travaux de transformation l’emportent sur ceux de remise en état pure et simple (dans ce cas l’article 26 est applicable) ou si les transformations ne représentent qu’une partie assez faible des réparations et ne peuvent être évitées (dans ce cas, l’article 24 est applicable). Il convient de se référer, pour différencier les travaux d’amélioration et les travaux d’entretien, à la distinction entre le “principal” et “l’accessoire”. «Des travaux répondent à la notion d’amélioration lorsqu’ils tendent à substituer une installation nouvelle à un élément d’équipement encore en l’état de fonctionner, ou à remplacer un élément vétuste ou défectueux par un équipement plus onéreux que celui qui aurait été techniquement suffisant pour fournir des prestations ou services équivalents» (JCP, copropriété, fascicule 94, n° 110). Par exemple, substituer un ascenseur moderne à un appareil ancien, encore en état de marche, s’analyse comme travaux d’amélioration.

Photo : La mise en place d’un élément d’équipement nouveau pour remplacer l’ancien, encore en état de fonctionner, relève d’un vote à la double majorité. © Okofen


Le vote des travaux d’amélioration

Les travaux d’amélioration sont adoptés par l’assemblée générale à la double majorité en nombre et en voix de l’article 26. En nombre, il est exigé que la moitié plus un des copropriétaires soient obtenue en assemblée générale. En voix, cette majorité devra rassembler un total de voix représentant au moins les deux-tiers des voix de l’ensemble des copropriétaires de l’immeuble, soit 667/1000e, c’est-à-dire que les copropriétaires, présents ou représentés, doivent voter avec un total de voix correspondant au minimum à 667/1000e. Lorsque cette double majorité n’a pas été obtenue en première assemblée générale, l’article 26 permet de réunir une deuxième assemblée générale, à convoquer ultérieurement. Cette possibilité ne peut jouer que lorsque la décision soumise au vote de l’assemblée générale concerne des travaux d’amélioration. Il faut, dans ce cas là, que la décision votée en première assemblée générale ait recueilli les deux-tiers des tantièmes de la majorité des copropriétaires ou représentés et non les deux-tiers des tantièmes des copropriétaires constituant le syndicat. Lors de la deuxième assemblée, la décision d’exécuter les travaux d’amélioration sera adoptée si elle réunit la moitié plus une voix des membres du syndicat votant aux deux-tiers des voix des copropriétaires présents ou représentés.


Les conditions de validité du vote

Pour que le vote soit valide, le syndic doit avoir notifié, en même temps que la convocation et l’ordre du jour, des documents qui permettront aux copropriétaires de se déterminer en connaissance de cause (article 11, décret du 17 mars 1967), à savoir, notamment, un projet de résolution sur la réalisation des travaux projetés, un projet de résolution sur la répartition des coûts, un projet de résolution sur les conditions essentielles du marché (un devis et/ou des notes techniques d’un bureau d’étude, d’un architecte seront joints).

Il est recommandé pour des travaux très importants (changement de système de chauffage ou d’ascenseur), de procéder en deux étapes :
• Première étape : une assemblée générale régulièrement convoquée, vote la réalisation des travaux et donne une délégation de pouvoir au syndic et au conseil syndical, assistés éventuellement par un professionnel, tel un architecte ou un bureau d’étude spécialisé, par exemple, en matière d’ascenseur. Ensemble, ils analysent les études techniques, les devis et préparent un financement du projet ;
• Deuxième étape : une deuxième assemblée générale se prononce sur le marché à conclure en faisant le choix d’une entreprise et d’un devis. Elle votera également la résolution relative à la répartition du coût des travaux et des dépenses ultérieures d’entretien et de fonctionnement.

S’agissant de travaux d’amélioration, ils ne sont pas immédiatement réalisables. L’article 42, alinéa 2, de la loi de 1965 contient un délai suspensif de deux mois à compter de la notification du procès-verbal au cours duquel les copropriétaires opposants ou défaillants peuvent engager une action judicaire pour faire annuler, par le tribunal, la décision ayant ordonné les travaux d’amélioration.

Photo : Leur coût est reparti en proportion des avantages qui en résultent pour chaque propriétaire. © Levage Moderne Ferronnerie