[N°624] - Restaurer ou remplacer les gardes-corps et les balcons ?

par Julie HAINAUT
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Ils permettent de jouir d’un espace en plein air tout en assurant la sécurité des ouvertures d’un immeuble. Les garde-corps de balcons, ainsi que les balcons eux-mêmes, doivent faire l’objet d’une attention particulière afin d’éviter qu’un de leurs éléments ne se rompe. Le point.

©Fadem

Le 15 octobre dernier, un balcon censé supporter au moins deux tonnes, a cédé sous le poids de dix-huit jeunes à Angers, faisant 4 morts et 14 blessés. Le syndic de copropriété a décidé de poser des fermetures au niveau des ouvertures dans les appartements où les balcons ont cédé, et d’installer des garde-corps dans les autres pour empêcher l’accès aux balcons, en attendant que l’enquête ouverte détermine les causes de l’effondrement. La société qui a participé à la construction de l’immeuble concerné, dénonce «une défaillance liée à une usure anormale». Cette triste actualité démontre l’intérêt de veiller à l’entretien régulier de ses garde-corps et balcons, afin de prévenir ses fragilités, et donc des chutes accidentelles.

Un garde-corps : notion imparfaite

Il s’agit d’un ensemble d’éléments formant une barrière de protection placée sur les côtés d’un escalier, d’un palier, d’un balcon, d’une mezzanine, etc. afin d’empêcher une chute accidentelle, peut-être, mortelle dans le vide. Son nom varie selon l’endroit où ils sont installés, et son type de fixation (garde-corps de palier pour sécuriser un balcon, garde-corps rampant pour l’escalier…). Il est composé d’une ossature qui permet de résister au poids des personnes prenant appui sur lui et d’éléments dits de «remplissage» qui ont pour fonction de s’opposer au passage d’une personne ou d’un objet à travers ou en dessous du garde-corps. Il est réalisé de façon à ce qu’un enfant ne puisse ni l’escalader ni glisser entre ses composants. Il est obligatoire de poser une barrière dès lors qu’il existe un risque de chute.


Impératif : entretenir régulièrement et déceler les faiblesses

Aucune corrosion de surface ne peut être évitée. Cependant, le fait d’entretenir régulièrement son garde-corps dès son installation permet de retarder la dégradation des éléments qui le constituent. Il faut veiller ainsi à laver et brosser régulièrement les éléments de ferronnerie peints et appliquer une nouvelle couche de peinture si nécessaire, au moins tous les cinq ans. Pour le reste, tout dépend du matériau du garde-corps (voir ci-après). En général, les garde-corps pleins, en béton, nécessitent moins d’entretien que ceux en bois (sensibles à l’humidité). Ceux en aluminium anodisé ou laqué réclament essentiellement un lavage régulier à l’eau savonneuse.
Lors de l’entretien, il est conseillé de vérifier la solidité des garde-corps. Il convient de repérer les éventuelles détériorations de la finition protectrice des garde-corps en acier, mais également les points d’assemblage des pièces métalliques (soudures, boulonnages…). Les problèmes les plus courants des garde-corps en aluminium concernent la corrosion ou le desserrage des pièces d’assemblage. La détection d’une fragilité peut être réalisée à l’œil nu, ou par un simple examen sonore, ou tout simplement en secouant le garde-corps. En cas de suspicion d’une faiblesse, il faudra faire appel à un professionnel pour réviser les fixations, qu’il s’agisse d’un charpentier ou d’un serrurier-métallier.


Vaut-il mieux réparer ou remplacer ?

Il n’y a pas de réponse unique. La réparation des garde-corps et balcons reste la solution la plus économique quand il n’est pas trop tard. Néanmoins, si les travaux sont envisagés pour des problèmes de sécurité, il est préférable de remplacer, le coût de la restauration étant généralement supérieur au remplacement. De plus, et contrairement au remplacement, la restauration ne permet pas de bénéficier de la garantie décennale. «Il appartient à la copropriété de faire le choix le plus adapté selon le différentiel. Au-delà de 60 % du coût de réparation, il vaut mieux remplacer que restaurer» explique Didier Rigault, gérant de la société Fadem, spécialisée dans le remplacement et la réparation des garde-corps de balcons. Après un simple examen des garde-corps, l’entreprise peut établir un diagnostic et déterminer ainsi s’il est préférable de réparer ou d’envisager le remplacement. Par exemple, si les garde-corps en acier en profilés pleins peuvent être restaurés, ceux en acier constitués de profilés tubulaires (creux) sont difficilement réparables, leur corrosion interne étant inévitable malgré un entretien régulier et minutieux. «Il conviendra néanmoins de comparer à coût global équivalent, en totalisant le prix des solutions de réparation à celui de la nécessaire remise en peinture de l’existant à intervalles réguliers» affirme Didier Rigault. Quoiqu’il arrive, c’est le souci de sécurité qui doit prédominer sur la décision de réparer ou de remplacer.


Les matériaux : l’aluminium a le vent en poupe

Le bois est de moins en moins prisé, puisqu’il présente de nombreux désavantages : dégradation rapide, hypersensibilité à l’humidité, sujet aux attaques d’insectes… Il peut résister dans le temps si, et seulement si, il est correctement et régulièrement traité (couche de vernis, lasure ou masticage recouvert de peinture). Si vous choisissez ce matériau noble et naturel, il est préférable de choisir un bois de Classe 4 certifié imputrescible comme le bois exotique ipé, le sapin, le mélèze ou le pin sylvestre autoclave - un bois autoclave a subi un traitement profond le protégeant ainsi des agressions biologiques (insectes ou champignons).
Le verre séduit également pour son côté épuré et son écran protecteur des rayons UV. On peut le choisir opaque pour préserver l’intimité ou transparent.
Mais ce sont les garde-corps en métal qui ont le plus de succès.
L’inox séduit pour son design minimalisme - son côté avant-gardiste se fond aussi bien dans une décoration moderne que rustique - et sa haute qualité. Il peut être brut, brossé ou poli. La plupart sont conçus en version brossée. Si les particules de poussières de l’air se posent sur l’inox et provoquent sa corrosion, formant ainsi une rouille superficielle, il est aisé de l’éliminer à l’aide de produits adaptés (dont les produits Innosoft® et Innoprotect®, par exemple) afin d’éviter une rouille définitive. «L’Inox est un matériau de qualité mais finalement rarement utilisé en copropriété car il est très cher. De plus, il n’existe aucun choix de couleur, contrairement aux autres matériaux» précise Didier Rigault.
Les deux principaux matériaux utilisés restent cependant l’acier et l’aluminium. Traditionnellement, c’est l’acier inoxydable qui est préconisé. Sa matière hautement sécuritaire permettant de faire face aux attaques climatiques et autres chocs. Or, l’aluminium, longtemps considéré comme un métal mou et donc fragile et peu sécurisant, peut devenir aussi dur que le fer lorsqu’il est bien travaillé, et constituer alors un appui solide. «Le rapport qualité-prix de l’aluminium surpasse aujourd’hui celui de l’acier, qu’il faut entretenir régulièrement à la peinture. L’aluminium dure plus dans le temps et nécessite moins d’entretien» note le gérant. L’aluminium cumule les avantages : il supporte mieux les chocs climatiques, ne rouille pas, est esthétique, pratique - en cas de choc, l’élément détérioré peut être démonté et remplacé sans difficulté aucune et sans soudure -, et léger (pour 15 kilos au mètre linéaire pour le garde-corps en acier, il faut compter 3 kilos pour son équivalent en aluminium, avec remplissage en tôle perforée). «Lorsqu’il convient de remplacer un garde-corps, la solution de l’aluminium s’impose dans la majorité des cas. Ils sont alors composés d’éléments assemblés avec de la visserie inox. Les pièces moulées d’assemblage reçoivent un traitement de laquage par poudres polyester cuites au four. Les profilés extrudés en aluminium peuvent être soit anodisés soit thermo laqués : autant d’atouts pour un produit durable, quasi sans entretien, offrant le meilleur rapport qualité/prix avec une couverture décennale» explicite Didier Rigault.


Combien coûte un garde-corps ?

Les tarifs varient selon la taille, le modèle, la marque, la longueur, le prix de la pose, le matériau utilisté et l’utilité finale du garde-corps (fenêtre, balcon, mezzanine, escalier…). Seul un devis pourra révéler un tarif précis et exact. Il est d’ailleurs conseillé de demander des devis à plusieurs entreprises, puis de les comparer. D’une manière générale, on considère que les garde-corps en bois se négocient à partir de 60 € le mètre linéaire, tandis que ceux en verre peuvent grimper jusqu’à 400 €, ceux en fonte jusqu’à 500 €, ceux en fer forgé s’élèvent généralement à 150 € et ceux en inox peuvent aller de 200 à 400 €.


Partie privative ou partie commune ?

Les balcons, parce que réservés à l’usage privé du titulaire d’une lot, sont généralement classés parmi les parties privatives (Cass. 3e civ., 28 mars 1990). Toutefois, certaines juridictions les classent dans les parties communes au motif qu’ils font partie du gros œuvre de l’immeuble, ou encore qu’ils contribuent à son harmonie (lorsqu’il s’agit de balcons ornementaux). D’autres juridictions mettent à part les structures et le système d’étanchéité des balcons qui ne peuvent être assimilés à des revêtements de sols affectés à usage privatif de chaque copropriétaire (tels des carrelages, caillebotis en bois ou dalles en gravillons). Ils constituent alors un élément du gros œuvre et sont à ce titre parties communes (CA Riom, 3 mars 2011, n° 10/00545). Tout dépend du règlement de copropriété qui peut en faire des parties intégralement communes (Cass. 3e civ., 3 nov. 1975) ou des parties communes à jouissance privative (Cass. 3e civ., 28 octobre 1985). Les balcons relèvent aussi inévitablement des parties communes s’agissant du gros œuvre. En cas de remplacement des garde-corps, le syndicat de copropriétaires peut décider de faire appel à un maître d’œuvre, ou de s’en passer s’il n’y a pas de maçonnerie à prévoir et si le ravalement de façade n’est pas programmé en même temps. Cependant, certains assureurs exigent le recours à un maître d’œuvre.


Voter les travaux et attribuer les coûts

La majorité simple de l’article 24 suffit pour les travaux de reprise ou de remplacement des garde-corps sur un immeuble en copropriété s’ils sont effectués à l’identique. La majorité absolue de l’article 25 sera nécessaire s’ils font l’objet, par exemple, d’une injonction administrative ou correspondent à des travaux d’amélioration.
La répartition du coût des travaux entre copropriétaires diffère selon que les garde-corps sont rangés en parties communes ou privatives. Dans le premier cas, les frais devront être imputés soit en charges générales, soit en charges spéciales par bâtiment concerné. Dans le second cas, chacun des copropriétaires devra payer sa propre note. Si le règlement de copropriété n’est pas clair, c’est à la justice qu’il reviendra de trancher le litige.
En cas de changement de façade (ajout d’une barrière sur le garde-corps pour plus de sécurité par exemple), il conviendra d’obtenir l’autorisation des services de l’urbanisme, par la dépose d’une déclaration préalable de travaux. Cette autorisation peut être refusée si l’immeuble relève des bâtiments remarquables d’un point de vue historique ou architectural.
Il peut arriver qu’un copropriétaire refuse de payer un remplacement intégral des garde-corps, alléguant du bon état de ses propres garde-corps. Or, la jurisprudence précise que, lors d’un ravalement de façade, il est possible d’obliger les copropriétaires à réaliser des travaux dès lors que «l’harmonie générale de la façade et la bonne réalisation des travaux imposent qu’ils soient effectués de manière concomitante» (CA Paris, 12 juin 98 n° 97/06750). Évidemment, la participation de chaque copropriétaire dépendra des garde-corps qu’il comptabilise, alors que les travaux de ravalement seront répartis en charges générales.


Vérifier la conformité du garde-corps

Le garde-corps doit respecter les critères définis par la norme NF P 01-012 (qui énonce les règles de sécurité relatives aux dimensions des garde-corps et rampes d’escaliers) ou par la NF en Iso 14122-3 (concernant les garde-corps destinés à sécuriser les toitures terrasses non accessibles), ou encore ceux de définis par la NF P 01-013 (qui expose les méthodes et critères d’essais des garde-corps). Tout garde-corps doit avoir une hauteur minimale de un mètre - 90 cm pour les rambardes d’escalier - et une zone de sécurité située entre 0 et 45 cm doit être aménagée en bas du garde-corps. Il est conseillé de faire poser son garde-corps par un professionnel, la pose étant encadrée par des procédures strictes. En cas de chute, la responsabilité de l’accident est imputée à la personne qui aura installé le garde-corps sans suivre les normes.