[N° 561] - Quelques questions à Isabelle Rougier, directrice générale de l’agence nationale de l’habitat (ANAH)

par Edilaix
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Isabelle Rougier, directrice générale de l’agence nationale de l’habitat (ANAH) revient sur les missions et les enjeux à relever, suite à sa nomination le 14 avril dernier.

Quelle feuille de route suivez-vous actuellement ?

La feuille de route nous a été donnée par Benoist Apparu, secrétaire d’Etat au logement et à l’urbanisme, lors du conseil d’administration du 5 mai dernier. Il s’agit d’opérer une réorientation profonde de l’intervention de l’Anah autour des objectifs suivants : la lutte contre l’habitat indigne et très dégradé, le rééquilibrage des interventions en faveur des propriétaires occupants modestes, un plus grand ciblage de l’aide aux propriétaires bailleurs sur les opérations où l’effet de levier de l’Anah est le plus significatif, et, enfin, une meilleure prise en compte de l’enjeu de rénovation thermique des logements.
Il s’agit tout d’abord d’apporter une réponse aux enjeux qui caractérisent aujourd’hui le parc privé comme la persistance d’un parc résiduel très dégradé souvent loué à des ménages pauvres et la difficulté des propriétaires occupants à faible revenu à assurer l’amélioration de leur logement. Mais aussi, dans le même temps, de prendre en compte les nouvelles missions confiées à l’Anah : la lutte contre la précarité énergétique, la requalification des quartiers anciens dégradés en articulation avec l’agence nationale de rénovation urbaine (ANRU).
Le parc privé cristallise toujours de nombreux enjeux sociaux. 19 % des locataires du parc privé sont considérés comme pauvres. Cela représente 1,2 million de ménages, contre 1,1 million dans le parc public. Du côté des
propriétaires occupants, on compte également 1 million de ménages pauvres, ce qui va à l’encontre de l’idée reçue que le propriétaire serait nécessairement un privilégié.

Quels sont les chantiers que vous comptez mener dans ce contexte ?

Nous menons de front deux chantiers prioritaires :
Premièrement, la réforme du régime des aides de l’Anah pour répondre aux objectifs fixés par le ministre.
Cette réforme doit en outre s’accompagner d’une simplification d’un régime aujourd’hui complexe, résultant de réglementations successives. Les nouvelles règles devraient être approuvées fin septembre par le conseil
d’administration de l’Agence, pour une entrée en vigueur au 1er janvier 2011.
Deuxièmement, la mise en œuvre du programme d’aide à la rénovation thermique, financé dans le cadre du « grand emprunt » de l’Etat et confié à l’Anah. Ce programme vise à améliorer les conditions de logement de
300 000 propriétaires occupants, d’ici 2017, en situation de précarité énergétique. Il sera engagé dès cette année.

Pouvez-vous revenir sur le rôle renforcé du Conseil d’administration ?

Le Conseil d’administration est doublement renforcé :
- Dans sa dimension partenariale, d’une part, avec l’entrée d’Action logement, financeur de l’Anah, et le renforcement de la représentation des collectivité territoriales. C’est un réel atout pour conduire la réflexion sur les modes d’intervention de l’agence ;
- Dans ses missions, d’autre part, le conseil est désormais chargé de fixer le niveau maximal des aides annuelles pouvant être engagées ainsi que le montant des enveloppes régionales.

Quels sont les objectifs de l’Anah pour l’année qui s’annonce ?

L’objectif prioritaire de l’Anah pour cette année est de mener à bien les deux chantiers qui nous ont été confiés : la réforme du régime des aides et le lancement du programme d’aide à la rénovation thermique des logements privés.

Ces deux chantiers vont mobiliser très fortement l’agence, dans toutes ses composantes, tout au long de cette année.
Il s’agit avant tout de préparer les conditions juridiques et techniques de mise en place d’un nouveau régime d’aide au premier janvier prochain, de communiquer en direction des acteurs locaux sur les orientations prises, de former les services instructeurs. Un dialogue devra s’engager, sur chaque territoire, avec les collectivités territoriales pour préparer au mieux la réorientation 2011, en s’articulant au mieux avec les politiques locales de l’habitat.

Parallèlement, sont définies les modalités de mise en œuvre du programme d’aide à la rénovation thermique qui va pouvoir commencer à se déployer dans les départements à compter de l’automne.

Quelles sont les pistes qui se profilent à l’avenir ?

L’Anah est un formidable outil d’intervention sur le parc privé et la réorientation de ses missions qui est aujourd’hui engagée, constitue une opportunité unique pour améliorer l’efficacité de cet outil.
Les enjeux sont multiples : il s’agit de mieux aider les propriétaires occupants modestes, de cibler l’aide aux propriétaires bailleurs là où elle est vraiment nécessaire en mettant fin à certains effets d’aubaine, de poursuivre de manière plus systématique un objectif de performance énergétique, de garantir l’efficacité sociale des aides de l’Anah. L’Agence sortira demain définitivement d’une logique de guichet pour privilégier l’analyse des besoins. Son action devra mieux s’inscrire dans une approche globale des différents leviers d’intervention en faveur du parc privé.
La notion « d’ensemblier » de la boîte à outil du parc privé, au service des politiques locales de l’habitat, est sans doute ce qui définit le mieux le rôle que nous souhaitons faire jouer demain à l’Anah.