Plusieurs innovations dans les réformes successives depuis quelques années devraient amener les syndics professionnels à revoir leur vision de leur métier. L’une d’entre elles est passée sous les radars alors qu’elle est loin d’être anodine.
Article paru dans les Informations Rapides de la Copropriété numéro 703 de novembre 2024
Une retouche de l’article 14 de la loi de 1965 a enrichi l’objet du syndicat des copropriétaires à l’«amélioration de l’immeuble» au lieu de le limiter à sa conservation et son entretien. En fait, il s’agit d’une nouvelle responsabilité pour le syndic qui, dans son devoir de conseil, doit proposer aux copropriétaires non seulement les actions visant à maintenir l’état de l’immeuble dans sa conception d’origine mais aussi de l’adapter à l’évolution des besoins, naturellement à la réglementation, mais aussi à son environnement urbain.
Ce petit ajout incite à voir l’immeuble non plus comme un objet immuable mais comme un «produit», a minima à maintenir dans son marché, et si possible à valoriser pour le «positionner» de manière plus favorable. Cela s’est fait bien-sûr au fil du temps, car sans cela les immeubles des siècles précédents seraient devenus inhabitables. Mais l’inscrire dans la loi n’est pas neutre, et nous pourrions voir à l’avenir, des copropriétaires faire valoir contre le syndicat et le syndic, un préjudice si leur immeuble a perdu de la valeur pour ne pas avoir effectué en temps utile ce travail d’adaptation. A fortiori si la copropriété l’a laissé se dégrader…
Une autre réforme est en train de bousculer les copropriétés, sans qu’on en ait encore suffisamment pris la mesure : l’obligation de passer d’une approche des travaux au coup par coup à l’obligation d’une programmation pluriannuelle, qui embarque du même coup la rénovation énergétique. Ne sous-estimons pas l’ampleur de cette révolution culturelle qui prend les copropriétaires à rebrousse-poil, et met les gestionnaires de copropriété dans une situation délicate. Une occasion serait manquée de rehausser la profession s’ils se laissent entraîner par leurs copropriétaires à mettre en œuvre la réforme a minima au lieu d’en défendre le bien-fondé. Mais encore faudrait-il qu’ils s’en convainquent eux-mêmes !
Une autre perche leur est tendue enfin avec le statut de «syndic d’intérêt collectif», qui leur donne une chance de ne pas laisser les copropriétés en difficulté aux seuls bailleurs sociaux. La saisiront-ils, et avec elle l’occasion de se donner une dimension RSE à bon compte ?
Alain Papadopoulos, Secrétaire général de l’Association QualiSR