La digitalisation, un arbre qui cache la forêt ?
Les néo-syndics en font leur raison d’être. Les grands groupes y investissent des sommes considérables.
La digitalisation et la dématérialisation sont devenues l’alpha et l’omega d’une prestation qui se voit de plus en plus selon le modèle du syndic en ligne.
Les start-ups comme Bellmann, Homeland, Hello Syndic, Cotoit, sans parler de Matera, sur une voie parallèle mais sur un même principe, se construisent autour d’une plateforme technique censée «disrupter» l’«expérience client».
Et tous de gloser sur le retard de digitalisation du gros de la profession, restée prisonnière d’éditeurs de logiciels en peine de faire évoluer et de moderniser des produits vieillissants : extranets squelettiques ; retard sur des évolutions législatives, comme le fonds de travaux ; supports de traçabilité des évènements et des demandes clients rudimentaires ; outils de gestion technique ultra-basiques, etc.
Certes, offrir aux interlocuteurs du syndic des canaux de communication multiples performants fait gagner du temps et permet d’adapter la relation aux nouveaux modes de communication dont une part croissante de la population a une maîtrise désormais «native».
Certes, une digitalisation des process apporte à la fois productivité et sécurisation, gage de la qualité de service. Mais est-ce suffisant ? Et, se focaliser sur cet aspect des choses ne conduit-il pas à oublier l’essentiel, la nature de la prestation de syndic et le client ?
On en oublie surtout d’investir sur la compétence multiforme qu’exige la gestion professionnelle des copropriétés, et notamment des personnes-clés que sont les gestionnaires, qu’on appelait dans le temps, principaux de copropriété. Aujourd’hui, ils sont souvent livrés à eux-mêmes, alors qu’ils sont, ou plutôt devraient être, pleinement responsables de leur mandat, investis sur une compétence juridique, technique, relationnelle.
On en oublie d’investir dans la valorisation de ces métiers -gestionnaire, comptable, chargé de contentieux-, aujourd’hui en manque d’attractivité malgré des rémunérations plutôt correctes. La législation rend, réforme après réforme, le métier de plus en plus complexe et exigeant, alors que l’organisation des cabinets, l’encadrement, la formation et les méthodes restent largement ce qu’elles étaient il y a vingt ou trente ans.
Si l’on veut sortir du marasme d’une image médiocre et du dénigrement systématique, voilà les vraies priorités…