Mesure de bon sens pour les uns, à l’intérêt discutable pour les autres, l’individualisation des frais de chauffage laisse rarement indifférent. Malgré cela, l’obligation n’en existe pas moins et les copropriétaires doivent se prononcer sur l’installation de compteurs ou de répartiteurs de chaleur. Petit tour d’horizon sur les principales mesures en la matière et le calendrier imposé par le législateur.
Les immeubles concernés.-
Sont concernés par l’obligation de procéder à la pose de compteurs ou répartiteurs de chaleur les immeubles collectifs munis d’une installation de chauffage commun (C. de l’énergie, art. L. 241-9).
Cette obligation ne s’applique pas aux établissements d’hôtellerie et aux logements-foyers ; aux immeubles dans lesquels il est techniquement impossible de mesure la chaleur consommée pour chaque local ou de poser un appareil permettant de moduler la chaleur fournie par le chauffage collectif ; aux immeubles dont l’individualisation entraînerait un coût excessif, ce qui n’est réputé être le cas que dans une seule hypothèse : la nécessité de modifier l’ensemble de l’installation de chauffage (C. de l’énergie, art. R. 241-8).
La mesure de la chaleur est techniquement impossible, notamment dans les cas suivants (arrêté du 27 août 2012, NOR ETLL1232630A) : l'émission de chaleur se fait par dalle chauffante sans mesure possible par local ; l'installation de chauffage est équipée d'émetteurs de chaleur montés en série (monotubes en série) ; l'installation de chauffage est constituée de systèmes de chauffage à air chaud ;l'installation de chauffage est équipée d'émetteurs fonctionnant à la vapeur ; l'installation de chauffage est équipée de batteries ou de tubes à ailettes, de convecteurs à eau chaude, ou de ventilo-convecteurs dès lors que chaque local ne dispose pas de boucle individuelle de chauffage.
L’emploi de l’adverbe «notamment» montre que la liste établie n’est pas limitative, de sorte qu’il est théoriquement possible d’invoquer d’autres cas d’impossibilité technique, mais à la condition de le justifier (rapport d’un professionnel, par exemple).
Une obligation complémentaire : la pose de robinets thermostatiques.-
En préalable à l’installation d’appareils de mesure, chaque radiateur doit être muni de robinets thermostatiques, lorsque cela est techniquement possible (C. de l’énergie, art. R. 241-9). La question se pose cependant de voir ce qu’il faut entendre par «techniquement possible». S’agit-il des cas définis par l’arrêté du 27 août 2012 ? Le doute est permis : ce texte ne vise que l’article R. 241-8 du Code de l’énergie, c’est-à-dire la liste des immeubles pour lesquels l’individualisation ou la pose d’appareils permettant de «moduler» la chaleur (la terminologie est importante) est techniquement impossible. Dans le même sens, l’article R. 241-9 ne fait aucune référence à cet arrêté et emploie le terme d’organes de «régulation», ce qui laisse supposer qu’il s’agit d’appareils différents.
Par conséquent, rien ne laisse supposer que l’obligation de pose de robinets thermostatiques est automatique dès lors que l’individualisation est techniquement possible. D’autres cas d’impossibilités (configuration des radiateurs par exemple) pourront être invoqués, mais il conviendra de s’appuyer sur les conclusions d’un homme de l’art.
Mise en place de l’individualisation.-
La mise en place de l’individualisation des frais de chauffage suit un calendrier qui est fonction de la performance énergétique de l’immeuble. Elle doit se faire au plus tard (C. de l’énergie, art. R. 241-10 et arrêté de 2012, précité) : le 31 mars 2017 pour les immeubles ayant avec une consommation en chauffage supérieure à 150 kWh/m2 SHAB.an (surface habitable - ndla) ; le 31 décembre 2017 pour les immeubles ayant une consommation comprise entre 120 kWh/m2 SHAB.an et 150 kWh/ m2 SHAB.an ; le 31 décembre 2019 pour les immeubles ayant une consommation inférieure à 120 kWh/m2 SHAB.an.
S’agissant de travaux obligatoires en vertu de la loi, la majorité nécessaire est celle définie à l’article 24 de la loi du 10 juillet 1965, c’est-à-dire la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents ou représentés (loi 10 juillet 1965, art. 24 II b).
La répartition des charges de chauffage.-
Il existe deux types de frais :
- les frais de combustibles ;
- les autres frais, tels ceux relatifs à l’entretien de l’installation de chauffage.
Les frais d’entretien sont répartis selon les dispositions du règlement de copropriété et la grille de répartition des charges y afférent. Les frais de combustible sont divisés en deux catégories, les frais communs, d’une part, les frais individuels, d’autre part.
Les frais communs sont déterminés en fonction d’un pourcentage appliqué à l’ensemble des frais de combustible. Ce coefficient est de 30 %, sauf pour les immeubles déjà équipés d’appareils, auquel cas le coefficient à prendre en considération est celui visé dans le règlement de copropriété ou voté en assemblée générale, compris obligatoirement entre 0 % et 50 %. Ces frais sont répartis en fonction des tantièmes de charges, conformément aux dispositions du règlement de copropriété.
Les frais individuels sont ensuite obtenus par différence entre les frais de combustible et les frais communs, et sont répartis en fonction des index fournis par les compteurs et répartiteurs.
La modification du règlement de copropriété.-
L’individualisation des frais de chauffage entraînant une modification dans la répartition des charges, il convient de modifier le règlement de copropriété. L’assemblée générale se prononcera alors à la majorité de l’article 24, par dérogation à la règle imposant normalement l’unanimité puisque cette modification est justifiée par la réalisation de travaux décidés par l’assemblée générale statuant à une majorité exigée par la loi (Loi du 10 juillet 1965, art. 11).
Cela permet également au futur acquéreur d’être clairement informé sur la répartition des frais de chauffage. A défaut, celui-ci pourrait demander à ce que seule la grille de répartition des charges figurant dans le règlement de copropriété lui soit appliquée, indépendamment de l’individualisation des frais de chauffage (Décret du 17 mars 1967, art. 4).
Sanctions.-
En cas de manquement à l’obligation d’individualisation, le syndicat encours une sanction de 1 500 €, au plus, par logement et par an, infligée par les fonctionnaires et agents publics (C. de l’énergie, art. L. 242-4).