Copropriété : Avantages de la procédure "accélérée" de recouvrement des charges

par Pierre-Edouard Lagraulet, Avocat au barreau de Paris, Docteur en droit
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CE MOIS-CI DANS LA CHRONIQUE : LE CONTENTIEUX DU MOIS

Généralités.- Les copropriétaires doivent les charges. C’est une obligation fixée par l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965 que le syndic a le pouvoir de faire exécuter. A défaut d’y parvenir de manière amiable, il peut engager, de sa propre initiative une action judiciaire en recouvrement des charges impayées (art. 55, d. 1967), . L’article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965 lui permet d’agir, ès qualité, selon une procédure de faveur dite «accélérée au fond».

Article paru dans les Informations Rapides de la Copropriété numéro 684 de décembre 2022

Conditions.- Le copropriétaire doit avoir été mis en demeure. Cela suppose que lui ait été notifiée une mise en demeure de payer ses charges, par LRAR papier ou, s’il a donné son accord préalable, par notification électronique (art. 64 et s., d. 1967). La mise en demeure doit, ensuite, être restée infructueuse pendant au moins 30 jours, le point du départ était celui du lendemain du jour de la première présentation de la LRAR au domicile du destinataire (art. 64, d. 1967). Malgré l’annulation de l’article 750-1 du CPciv. par le Conseil d’Etat (22 sept. 2022, n° 436939), on ne pourra qu’inviter les syndics à conserver sur la mise en demeure la mention invitant le débiteur à un règlement amiable du litige.

Avantage n° 1 : déchéance du terme.- En cas de défaut de paiement, passé le délai de trente jours, l’application de l’article 19-2 emportera déchéance du terme des autres provisions non encore échues, tant en application de l’article 14-1 que de celui de l’article 14-2 de la loi du 10 juillet 1965. En outre, l’ensemble des sommes restant dues au titre des exercices précédents après approbation des comptes deviennent également immédiatement exigibles. Le syndicat pourra donc recouvrer tant le passif que ses créances qui n’étaient encore que futures. Le mécanisme permet ainsi d’anticiper la défaillance du débiteur et la durée de la procédure.

Avantage n° 2 : rapidité de la procédure.- Le syndicat des copropriétaires doit saisir le président du tribunal judiciaire (TJ) du lieu de situation de l’immeuble, selon la procédure accélérée au fond. La procédure sera ainsi traitée dans un circuit de référé, quoique le magistrat statue au fond et rendra donc une décision contradictoire et revêtue de l’autorité de la chose jugée et ayant force de chose jugée une fois les voies de recours expirées.

Avantage n° 3 : limitation de la sanction.-  Le président du TJ, selon la lettre du texte de l’article 19-2, devra «constater» la défaillance du copropriétaire ainsi que l’approbation par l’assemblée du budget prévisionnel, des travaux ou des comptes. Cela suppose de rapporter ces éléments de preuve par le syndic. Le cas échéant, toujours d’après la lettre du texte, le président du TJ «condamne ce dernier au paiement des provisions ou sommes exigibles». Cela semble impliquer que le juge n’a pas ici de pouvoir d’appréciation sur la sanction qu’il ne peut moduler. Le texte paraît ainsi déroger au principe de l’article 1343-5 (C. civ.) relatif aux délais de paiement.

Néanmoins, c’est heureux, il pourra constater le caractère partiellement ou totalement injustifié de la créance du syndicat. On rappellera toutefois que face à une inexactitude du montant des sommes réclamées, le juge ne peut rejeter en bloc la demande. Il doit statuer et liquider la créance, quitte à diminuer le montant de la condamnation sollicitée en application du principe de l’article 4 du Code civil (V° en ce sens, Cass. 3e civ., 5 févr. 2013, n° 11-28.300).

 

Pierre-Edouard Lagraulet / ©Sebastien Dolidon / Edilaix

 Pierre-Edouard Lagraulet, Avocat au barreau de Paris, Docteur en droit

 
©Sébastien Dolidon / Edilaix