[N°616] - Elaborer le budget prévisionnel avec le syndic

par Julie Hainaut
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Acte d’importance majeure dans la gestion d’un syndicat de copropriétaires, le budget prévisionnel doit répondre à des normes bien précises. Rappel des règles à respecter.
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L’article 14-1 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 oblige les syndicats de copropriétaire à voter chaque année un budget prévisionnel « pour faire face aux dépenses courantes de maintenance, de fonctionnement et d’administration des parties communes et équipements communs de l’immeuble », à l’exclusion des dépenses pour travaux dont la liste est fixée par décret en Conseil d’Etat (article 14-2). Ces dépenses reviennent régulièrement, à chaque exercice, et ne connaissent généralement pas de variations inattendues.

Les dépenses concernées
Nul copropriétaire ne saurait se soustraire à l’obligation de contribuer aux charges. Les travaux de maintenance portent sur l’entretien courant et sont « exécutés en vue de maintenir l’état de l’immeuble ou de prévenir la défaillance d’un élément d’équipement commun », comme les menues réparations. Les travaux de remplacement d’éléments communs (chaudière par exemple), s’ils sont compris dans les contrats de maintenance ou d’entretien conclus par le syndicat et les vérifications périodiques des éléments d’équipement communs, font également partie des dépenses courantes. Tout comme les dépenses engagées pour régler les honoraires du comptable, de l’architecte ou de tout autre professionnel qui serait intervenu à la demande du conseil syndical. Selon l’article 45-1 du décret du 17 mars 1967, les provisions de l’article 14-1 précité ne peuvent être confondues avec les charges qui « sont les dépenses incombant définitivement aux copropriétaires, chacun pour sa quote-part ». Elles se différencient également des avances, qui sont « des fonds destinés, par le règlement de copropriété ou une décision de l’assemblée générale, à constituer des réserves, ou qui représentent un emprunt du syndicat auprès des copropriétaires ou de certains d’entre eux ».
Font donc partie des dépenses courantes : le salaire du gardien, les frais de nettoyage des parties communes, les honoraires du syndic, les primes d’assurances… En sont exclues : les études techniques, la surélévation d’immeuble, la création de nouveaux locaux communs…

La préparation et le vote
Préparé et établi par le syndic, le budget prévisionnel doit être voté chaque année, pour chaque exercice comptable. La 13ème recommandation de l’ancienne Commission relative à la copropriété préconisait que le conseil syndical soit associé à sa préparation. Un souhait rendu obligatoire par la loi ALUR qui précise désormais que le syndic doit établir le budget prévisionnel « en concertation avec le conseil syndical ». Le règlement de copropriété ne peut contrevenir à cette règle impérative : le contenu du budget prévisionnel, sa périodicité et sa force exécutoire sont déterminés par la loi. Seule l’assemblée générale peut prendre une décision dérogatoire, mais seulement pour fixer les modalités de détermination des provisions sur le budget, différentes de celles résultant de l’article 14-1, alinéa 2, de la loi. Une fois établi, le budget prévisionnel est notifié aux copropriétaires au plus tard en même temps que l’ordre du jour de l’assemblée appelée à l’approuver (à la majorité de l’article 24). Il doit être voté dans les six mois qui suivent le dernier jour de l’exercice comptable précédent et avant la fin de l’exercice précédent. La jurisprudence a précisé que ce délai de six mois n’était pas prescrit à peine de nullité de l’assemblée. S’il ne peut être voté avant le début de l’exercice, le syndic peut, avec l’autorisation de l’assemblée générale, appeler deux provisions trimestrielles.

Le montant et l’exigibilité
L’article 14-1 précise que « les copropriétaires versent au syndicat des provisions égales au quart du budget voté. Toutefois, l’assemblée générale peut fixer des modalités différentes ». Une souplesse mise en œuvre pour le cas des immeubles regroupant des résidents aux revenus modestes ou des petites copropriétés à faibles charges. La loi de 1965 indique aussi que « la provision est exigible le premier jour de chaque trimestre ou le premier jour de la période fixée par l’assemblée générale ». Avant cette date, le syndic adresse à chaque copropriétaire, par lettre simple, un avis indiquant le montant de la provision exigible. Seul le syndic régulièrement élu et en exercice peut réclamer le paiement des provisions. L’article 19-2 de la loi précitée affirme qu’en cas de non-paiement de l’une des provisions, les suivantes, bien que non encore échues, « deviennent immédiatement exigibles », par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. La « déchéance du terme » affectant les provisions ultérieures est encourue faute de paiement dans les trente jours du lendemain de la première présentation de la lettre au domicile du copropriétaire débiteur. Celui-ci est donc dans l’obligation de payer en avance ce qu’il n’aurait dû avoir à payer qu’ultérieurement. Le président du tribunal de grande instance pourra condamner le débiteur défaillant en constatant simplement le vote du budget et la déchéance du terme. Le copropriétaire débiteur pourra invoquer l’exception de compensation (si des sommes lui sont dues) ou contester la qualité du syndic pour agir au nom du syndicat. Dans ce dernier cas, il peut être établi que le budget voté inclut des sommes ne relevant pas des dépenses de maintenance, de fonctionnement ou d’administration et que le vote est donc irrégulier. Le syndicat peut se faire allouer une indemnité lorsqu’un copropriétaire refuse de payer les charges (si le préjudice subi est établi).

Les recours
Selon la jurisprudence (Cass. 3e civ., 24 mars 2009, n° 08-12.278), « l’annulation de la décision ayant approuvé les comptes empêche l’imputation à chaque copropriétaire de sa part définitive de charges et de dépenses communes, mais les copropriétaires restent tenus au paiement des provisions au titre du budget prévisionnel voté en assemblée ». De plus, le syndicat des copropriétaires peut être condamné, pour abus de procédure, à réparer le préjudice causé à un propriétaire, s’il lui a réclamé le paiement de charges sans être en mesure de justifier de la réalité de sa créance.



• La loi ALUR, qui a renforcé le rôle des syndicats de copropriétaires, précise que le syndic d’une copropriété de plus de quinze lots est dans l’obligation d’ouvrir un compte bancaire séparé à son nom (1965, art. 18).

• La Loi ALUR prévoit la mise en place d’un fonds de travaux à partir du 1er janvier 2017 pour faire face à certaines dépenses, lequel sera constitué sur la base de cotisations annuelles des copropriétaires. Il sera néanmoins possible de reporter cette mesure « à l’issue d’une période de cinq ans suivant la date de la réception des travaux ». Les immeubles neufs en copropriété sont donc exclus de cette obligation pendant les cinq années qui suivront leur achèvement, ainsi que les copropriétés de moins de 10 lots ayant pris la décision de ne pas instituer de fonds de travaux – par un vote à l’unanimité – et celles dont le diagnostic global technique révèle l’absence de besoin de travaux au cours des dix prochaines années.