Copropriété | Didier Mignery, valoriser l’existant

par Sophie Michelin-Mazéran, journaliste juridique
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Didier Mignery - CopropriétéFaire avec le «déjà-là», donner une image à des bâtiments qui en étaient dépourvue, tel est le crédo de l’architecte et startupeur Didier Mignery.

Sans attendre l’objectif du zéro artificialisation nette, ce chantre de la densification douce développe des projets de surélévation depuis près de 20 ans, notamment dans les copropriétés. À l’heure du dérèglement climatique, il ne s’agit plus de produire du neuf, mais de valoriser l’existant.

Article paru dans les Informations Rapides de la Copropriété numéro 703 de novembre 2024
©DR

Au collège, en trois jours de stage dans une agence d’architecture, Didier Mignery a su qu’il en ferait son métier. Il faut dire que son environnement familial, placé sous les bons auspices d’un père officiant chez un bailleur social et d’une mère œuvrant dans un bureau de contrôle technique, n’est sans doute pas étranger à son goût pour l’architecture et la construction de manière plus générale.

Mais pas n’importe laquelle, celle qui répare et valorise le bâti. Car celui qui a fait ses études à l’École nationale supérieure d’architecture de Lyon ainsi qu’à l’École polytechnique fédérale de Lausanne en Suisse s’est distingué de ses confrères en travaillant d’emblée et essentiellement sur la surélévation de bâtiments à une époque où ce mode constructif était embryonnaire.

«Cette culture du patrimoine construit m’a habitée très tôt», confie ce collectionneur de disques vinyle. Dès la fin de ses études, Didier Mignery fonde en 2002 l’agence parisienne ZoomFactor Architectes. Sa première surélévation est le fruit d’un pari audacieux : il propose au propriétaire d’un immeuble situé face à son agence, rue de la Sablière dans le 14e arrondissement, d’y adjoindre trois étages supplémentaires. En échange des travaux réalisés, à ses frais, il conserverait un des logements nouvellement créés. «Le deal a été accepté. D’ailleurs, j’y habite toujours !», raconte-t-il amusé.

Après ce fait d’armes, cet entrepreneur dans l’âme passe à la vitesse supérieure et donne naissance en 2017, via une levée de fonds, à la filiale à UpFactor, un bureau d’études spécialisé dans l’assistance à maîtrise d’ouvrage pour des projets de surélévation.

«De plus en plus de collectivités nous mandatent pour identifier leur potentiel de foncier aérien, outre la faisabilité et la réalisation effective des opérations. Je pense à la ville de La Rochelle, du Mans ou encore aux métropoles de Strasbourg et de Nice», explique-t-il. Rien qu’à Nice, 5 000 bâtiments seraient éligibles à la surélévation, dont 500 immédiatement, c’est-à-dire sans modification des règles d’urbanisme. Une aubaine dans un territoire où la pression immobilière est forte, face à un foncier disponible qui se raréfie.

«Les bailleurs sociaux, également à la recherche de nouveaux logements ne s’y sont pas trompés. Ils s’engagent progressivement dans la voie de la surélévation, d’autant qu’ils maîtrisent la réalisation de travaux en milieu occupé», souligne l’architecte.

Côté copropriété, la démarche est plus hésitante bien que prometteuse, la cession du droit de surélever à un promoteur permettant de financer des travaux de rénovation énergétique et donc de faire baisser le montant des charges. «Nous avons plusieurs opérations en cours dans des copropriétés, notamment en montagne», précise ce Roannais d’origine.

Désormais, les freins à la surélévation en copropriété ne sont plus d’ordre juridique (suppression du droit de veto des copropriétaires du dernier étage, assouplissement des règles de majorité ou encore multiplication des dérogations aux règles du plan local d’urbanisme). Ils sont plutôt à chercher du côté de l’industrie immobilière dont l’appareil productif est en inadéquation avec ces marchés de petite taille. Les projets de surélévation consistent généralement en la création d’un ou de deux étages supplémentaires.

«Faute de combattants en nombre suffisant pour porter ces projets d’extension verticale, nous sommes en train de mettre sur pied Upper, la foncière du dernier étage, qui pourrait voir le jour fin 2024», confie Didier Mignery.

Les immeubles n’ont donc pas fini de grandir.