Copropriété | Estelle Baron, résolument engagée

par Sophie Michelin-Mazéran, journaliste juridique
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Estelle BaronLa copropriété a attrapé Estelle Baron à la sortie de ses études de sociologie. Depuis plus de quinze ans maintenant, son engagement contre le logement indigne, la précarité et la paupérisation des copropriétés ne se dément pas. Avec comme mantra, le sens du terrain et du collectif.

Cette quadragénaire œuvre aujourd’hui pour un grand réseau associatif dédié à l’amélioration de l’habitat.

Article paru dans les Informations Rapides de la Copropriété numéro 702 d'octobre 2024
©DR

C’est en plein cœur de l’été que l’échange se déroule avec la chaleureuse et sérieuse (l’un n’empêchant pas l’autre) Estelle Baron. D’ailleurs, son rire communicatif ponctuera à plusieurs reprises l’interview qui nous emmènera des copropriétés en difficulté en passant par les territoires, jusqu’au philosophe Jean-Paul Sartre.

Entrée en copropriété, oserait-on dire, comme d’autres entrent religion, E. Baron fait ses premières armes en 2007 au sein de l’Association des responsables de copropriétés (ARC) alors pilotée par Bruno Dhont, une figure tutélaire pour la jeune sociologue qu’elle est alors. Elle découvre, à la faveur notamment d’enquêtes sociales sur le terrain, qu’il existe beaucoup de copropriétaires en dessous du seuil de pauvreté, en particulier des familles monoparentales au RSA, pire des enfants malades à cause de logements insalubres. «Contrairement aux idées reçues, c’est souvent dans le parc privé qu’il y a le plus d’habitants fragiles, entre autres parce que l’offre de logement social est insuffisante. J’ai été témoin de situations très difficiles», confie Estelle Baron. Elle se spécialise alors dans les copropriétés en difficulté comme chargée de mission, avant de devenir, quelques années plus tard, la directrice opérationnelle de l’ARC, sans jamais s’éloigner des réalités locales, car comme lui assénait son directeur de l’époque : «Ce métier s’apprend avec ses pieds, et tout ce qui vient du terrain est légitime».

Cette capacité à faire le lien entre les besoins réels des copropriétaires et les actions des spécialistes, entre l’hyper-technicité qu’impose la gestion d’un immeuble collectif et la nécessaire vision globale qu’il convient d’en avoir, Estelle Baron l’exerce ensuite chez Soliha Grand Paris qu’elle intègre en 2017. Toujours le secteur associatif donc, mais à une autre échelle puisque cette entité est un acteur-clé de l’amélioration de l’habitat au niveau francilien, tout en étant membre du réseau national Soliha («Solidaires pour l’habitat»). 

La directrice du pôle Conduite de projets de territoire de Soliha Grand Paris explique : «A la tête d’une équipe d’une cinquantaine de collaborateurs, mon service accompagne les collectivités territoriales dans la définition et la mise en place de programmes de rénovation du parc privé, essentiellement collectifs. Il peut s’agir de lutte contre l’habitat indigne, de traitement de l’habitat dégradé, voire de «simples» opérations d’amélioration énergétique d’immeubles. Pour ce faire, nous répondons régulièrement à des marchés publics». Écouter toutes les parties prenantes, agir au plus près des habitants, faire dialoguer les pouvoirs publics et les acteurs privés en vue de regénérer un immeuble, telles sont les missions galvanisantes de cette cheffe d’orchestre.

Comme elle a pu l’exposer lors de son audition au printemps dernier dans le cadre de la mission sénatoriale sur la paupérisation des copropriété, E. Baron milite pour que les immeubles en difficulté ne soient pas traités uniquement sous un prisme technique ou social. «Travailler au redressement du fonctionnement de la copropriété et de sa situation financière, avec l’aide des syndics, est tout aussi important», souligne-t-elle. Et de compléter : «Il convient également de sensibiliser les copropriétaires à bien penser le collectif, en lien avec l’ensemble des résidents, y compris les locataires. Comment pérenniser une action publique si tous les occupants ne s’approprient pas un projet global de rénovation qui s’est déroulé parfois sur plus de cinq ans ?», s’exclame-t-elle avec une passion non feinte.

Celle-ci qui lit le soir à ses enfants Le Petit Prince d’Antoine de Saint-Exupéry, ne veut donc pas seulement convaincre par la raison, mais aussi persuader avec le cœur !