Explorer les 1 001 nuances de la copropriété par le prisme du droit, telle est la quête qui anime Nathalie Brocard, juriste discrète, voire secrète, œuvrant depuis 2020 dans un organisme professionnel notarial.
Article paru dans les Informations Rapides de la Copropriété numéro 692 d'octobre 2023
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Le droit de la copropriété est-il en train de devenir insaisissable ? Nathalie Brocard, consultante juridique au Centre de recherches, d’information et de documentation notariales (CRIDON) de Paris, n’est pas loin de le penser.
La preuve : sur les 25 consultants spécialisés que compte cet organisme professionnel indépendant chargé de renseigner les notaires de son ressort quand ces derniers sont confrontés à un problème juridique (qu’il s’agisse de droit de la famille, de fiscalité, d’immobilier…), deux consultants sont dédiés à 100 % au droit de la copropriété, avec principalement le traitement de questions relatives aux annexions de parties communes et à l’affectation des lots.
Ce n’est pas rien au regard des quelques 16 000 demandes adressées au CRIDON de Paris en 2022, dont près d’un tiers concerne le droit immobilier, l’urbanisme et la construction.
«Le flux législatif et réglementaire, pour ne pas dire le flot, est si nourri ces dernières années que nous sommes régulièrement saisis pour éclairer les notaires dans leur pratique professionnelle face à ces changements incessants» explique Nathalie Brocard, elle-même titulaire du Diplôme supérieur de notariat. «D’autant que si les textes sont de
plus en plus bavards, ils s’avèrent peu diserts sur la sémantique employée», regrette-t-elle.
Et la production jurisprudentielle n’est pas en reste pour contribuer à l’évolution du droit de la copropriété. «Aujourd’hui, il y a rarement de solutions préconçues à apporter aux interrogations des notaires. Il faut savoir sonder plusieurs codes, consulter la doctrine universitaire, se pencher sur les préconisations du Groupe de recherche sur la copropriété [GRECCO - ndla], tout en gardant un œil sur la jurisprudence, avant d’argumenter une ou plusieurs analyses», affirme ce membre de la Chambre nationale des experts en copropriété (CNEC).
D’une grande exigence intellectuelle, elle avoue même ne jamais partir en vacances sans son ordinateur pour scruter de près l’activité des tribunaux.
Ce travail de quasi-spéléologue n’effraie pas cette juriste qui maîtrise nombre de facettes de la copropriété, pour avoir été responsable juridique dans une association de copropriétaires, avant de collaborer avec un important cabinet de géomètres-experts, parisien.
Sans oublier qu’en parallèle de sa carrière professionnelle, Nathalie Brocard est également chargée d’enseignement en droit de la copropriété pour le Master 2 «Droit immobilier» de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. «J’essaye d’expliquer à mes étudiants que cette matière s’apparente en quelque sorte à la montagne Sainte-Victoire d’Aix-en-Provence, c’est-à-dire un édifice qu’il convient d’apprivoiser pas à pas pour en saisir toutes les couleurs, comme Paul Cézanne à travers ses nombreux tableaux», commente-t-elle.
Et de poursuivre : «par-delà la métaphore, et inspirée en cela par une échappée de deux ans aux États-Unis, je m’emploie à adopter une approche pragmatique de mon enseignement en recourant à des schémas, des tableaux et des dessins pour rendre le droit de la copropriété le plus intelligible possible à mes étudiants.»
Cet enthousiasme pour l’immobilier n’a pas été spontané. Nathalie Brocard visait, au départ, un parcours dans le champ alors émergent de l’écologie, auréolée d’un diplôme d’études supérieures en droit de l’environnement.
«Je voulais contribuer à garantir un avenir durable aux générations futures», confie-t-elle. Finalement, ce souhait de transmission est exaucé, mais de manière détournée par ses fonctions d’enseignante, alors même que les considérations environnementales imprègnent toujours un peu plus l’immeuble en copropriété.