Portrait : Valérie Tartacède-Bollaert, décalée, mais bien à sa place

par Sophie MICHELIN-MAZÉRAN, journaliste juridique
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Valérie Tartacède-BollaertCe n’est pas parce que l’on appartient à une profession réglementée investie d’une mission d’intérêt général, à savoir «dire la propriété» en fixant les limites des biens fonciers, que la fantaisie et l’humour sont hors-jeu.

La preuve avec Valérie Tartacède-Bollaert, une figure à part dans le milieu assez méconnu des géomètres-experts, ces acteurs pourtant incontournables de la copropriété, et précieux alliés des syndics, des avocats et des notaires, pour ne citer qu’eux.

Dès les premières minutes d’entretien, on comprend que Valérie Tartacède-Bollaert, géomètre-expert DPLG, œuvrant tout particulièrement en milieu urbain, trace un chemin singulier entre rigueur et décontraction.

Étudiante, elle aspirait à embrasser une carrière de médecin. Mais l’atavisme familial rattrape cette scientifique et la guide vers l’Institut, aujourd’hui disparu, de topométrie, une entité rattachée au Conservatoire national des arts et métiers.

Sortie major de sa promotion en 1990, excusez du peu, elle intègre le cabinet de géomètre de son père comme salariée, avant d’en devenir associée, trois ans plus tard. Elle le fait évoluer ensuite, avec son époux, en SCP Cabinet Tartacède-Bollaert en 1999, date à laquelle elle effectue sa prestation de serment devant ses pairs. Vous avez dit une vraie histoire de famille ?

«C’est une grande fierté d’avoir fait grandir le cabinet familial, qui est passé de trois à quarante collaborateurs, avec des bureaux parisiens et franciliens, mandatés récemment pour la mise en copropriété des immeubles du futur village des athlètes des jeux Olympiques de Paris 2024», confie-t-elle. Une réussite d’autant plus méritoire quand on sait que la profession reste majoritairement masculine : sur les quelques 1 860 géomètres-experts inscrits au tableau de l’Ordre, seuls 14 % sont des femmes.

Travailleuse invétérée, cet ingénieur affable impose un style inédit et gouailleur, avec pour ambition de mieux faire connaître les différentes facettes de sa profession, qui participe notamment au bon fonctionnement d’un immeuble en copropriété, à construire ou déjà construit.

En effet, le géomètre-expert joue un rôle important lors de la mise copropriété d’un immeuble. Délégataire de prérogatives de puissance publique, il va, par exemple, garantir les superficies des parties privatives et des parties communes. «D’ailleurs, la Cour de cassation vient de rappeler dans une importante décision que le plan annexé aux actes de copropriété, comme l’état descriptif de division, relève du monopole du géomètre-expert en ce qu’il délimite les droits fonciers. Et c’est heureux car nous sommes tenus de souscrire des assurances obligatoires en responsabilité civile professionnelle et décennale en cas de fautes éventuelles dans l’exercice de nos fonctions», souligne Valérie Tartacède-Bollaert.

Quant à la mise en copropriété d’un immeuble en l’état futur d’achèvement, l’intervention du géomètre-expert est tout aussi décisive, notamment pour viser les plans de l’architecte.

Face à la complexification croissante du droit de la copropriété, ce gardien de la mesure se trouve également investi d’un devoir de conseil, qui peut trouver à s’appliquer lors de l’établissement d’un modificatif du règlement de copropriété rendant nécessaires des mises à jour de calculs et de répartition des charges.

«Certains modificatifs imposent même une refonte globale des actes de copropriété. Durant trois ans, nous avons ainsi accompagné la restructuration d’un immeuble de bureaux des années 70 en un hôtel de luxe parisien, situé avenue George V», glisse Valérie Tartacède-Bollaert.

Membre de la Chambre nationale des experts en copropriété, Chartered Surveyor RICS et élue au sein de la principale caisse de retraite des professions libérales (la Cipav) pour représenter, entre autres, les intérêts des géomètres-experts et des architectes, elle met non seulement en lumière sa profession, mais œuvre en faveur du dialogue interprofessionnel. Un engagement salutaire en ces temps de repli sur soi.