Copropriété : Mieux sécuriser les parties communes

par Sophie MICHELIN-MAZÉRAN, journaliste juridique
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©Woraphon_AdobeStock_489490173De la présence humaine à la vidéosurveillance en passant par un éclairage adapté ou encore des systèmes anti-intrusifs, les dispositifs pour sécuriser les parties communes d’un immeuble sont légion. Certains obéissent à un cadre juridique précis à ne pas méconnaître, sous peine de s’exposer à des sanctions.
À cela s’ajoute l’incontournable sécurité incendie qui ne peut souffrir d’aucun à-peu-près. Tour du propriétaire des solutions mobilisables.

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Article paru dans les Informations Rapides de la Copropriété numéro 688 de mai 2023

Nombreux sont les syndics à déplorer une recrudescence des incivilités et des actes de vandalisme dans les copropriétés. «On peut aussi observer des dégradations plus fréquentes dans les halls d’entrée, boîtes aux lettres et cages d’ascenseur. La faute au développement des livraisons à domicile», observe François-Emmanuel Borrel, administrateur de biens à Paris.

Pour autant, face à ce constat quelque peu morose, il existe des solutions pour sécuriser son immeuble. De plus, les nouvelles technologies élargissent le champ des possibles, sans forcément alourdir le coût de la facture.

Un éclairage adapté

Un éclairage adroitement réparti dans les parties communes, intérieures et extérieures, est un premier gage de sécurité pour les copropriétaires.

Sachant que la réglementation, peu bavarde en ce domaine, fixe néanmoins un niveau d’éclairement minimum à atteindre, selon cinq zones distinctes dans la copropriété (parkings, escaliers, intérieurs des locaux collectifs…).

Au regard de la flambée des prix de l’énergie, les lampes à LED sont plus que jamais à privilégier : moins énergivores que d’autres dispositifs, elles offrent aussi l’avantage d’être résistantes et durables.

À noter qu’elles s’adaptent aux minuteries, comme aux détecteurs de mouvements. Ces derniers installés près de l’entrée de l’immeuble, au-dessus des boîtes aux lettres et devant les portes donnant accès aux étages, représentent un bon compromis entre un allumage permanent et une minuterie.

«De nuit, un éclairage continu et de faible intensité dans les parkings peut se révéler efficace pour dissuader les intrusions et rassurer les occupants», précise François-Emmanuel Borrel.

La vidéosurveillance : je t’aime, moi non plus

Autre mesure essentielle de sécurisation, le contrôle des accès à la copropriété. «Les immeubles sont désormais équipés de systèmes plus ou moins sophistiqués. On est passé en une vingtaine d’années du simple bouton poussoir, au digicode et au badge électronique, puis à l’interphone et au visiophone, dotés tous deux aujourd’hui de technologies sans fil», explique François-Emmanuel Borrel.

En cas de détériorations répétées, le recours à la vidéosurveillance (appelée «vidéoprotection» lorsque la copropriété est ouverte au public) constitue souvent l’étape d’après.

Bien que les progrès techniques et la baisse du coût de ces installations en fassent une solution efficace de dissuasion ou d’identification des fauteurs de troubles, ce dispositif n’emporte pas systématiquement l’adhésion de tous les copropriétaires.

Certains jugent, en effet, la vidéosurveillance intrusive et attentatoire à l’intimité de leur vie privée, brandissant même la menace de dérives «Big Brother».

Pourtant, installer et utiliser des caméras impose de respecter à la lettre plusieurs règles issues pour la plupart du Code de la sécurité intérieure (art. L. 223-1 et s.) et du Code pénal (art. 226-1 et s.).

Un dispositif strictement réglementé

Tout d’abord, seule l’assemblée générale des copropriétaires (et non le syndic) peut décider, à la majorité simple de l’article 24, de recourir à la vidéosurveillance.

Ensuite, les caméras doivent filmer exclusivement les parties communes (hall d’entrée, cour, local vélos, portes d’ascenseur…) aux fins d’assurer la sécurité des biens et des personnes. En clair, il ne s’agit pas de scruter les va-et-vient des résidents ou des visiteurs.

Par conséquent, tout copropriétaire qui installerait une caméra filmant des parties communes, sans le consentement des autres copropriétaires, serait hors-la-loi (Cass. 3e civ., 11 mai 2011, n° 10-16.967).

«Cette hypothèse est loin d’être un cas d’école avec la prolifération des Airbnb dans les immeubles. Certains propriétaires placent des caméras au niveau de leur porte d’entrée, avec une vue sur le palier, pour surveiller la valse de leurs locataires», glisse l’administrateur parisien.

En outre, si l’immeuble est accessible au public (en cas de locaux professionnels, par exemple), une autorisation préfectorale est requise. Aucune formalité n’est, en revanche, nécessaire lorsque l’accès à la copropriété est restreint, à l’exception d’un affichage visible et explicite dans l’immeuble signalant que celui-ci est placé sous vidéosurveillance.

Quant aux personnes habilitées à visualiser les images (en direct ou enregistrées), la CNIL désigne le syndic, les membres du conseil syndical ou le gardien. Sachant que la durée de conservation des images ne doit pas excéder un mois.

Si le dispositif de vidéosurveillance ne respecte pas ces règles, le service des plaintes de la CNIL peut être saisi, avec des sanctions à la clé, notamment pécuniaires.

S’agissant des tarifs pour la mise en place d’une vidéosurveillance, ils dépendent de nombreux critères (location ou achat des caméras, nombre et type de caméras installées, superficie de la copropriété, frais de maintenance…), et s’établissent généralement à quelques euros par mois pour chaque copropriétaire.

Le gardien, un allié précieux

Toutes ces avancées techniques ne sauraient faire oublier le rôle important que peut jouer un gardien dans la prévention des incivilités, actes de malveillance et vols.

«Un gardien vigilant, qui surveille régulièrement les allées et venues dans l’immeuble et s’assure du bon respect des parties communes, représente un atout indéniable pour une copropriété», considère le professionnel. Et de poursuivre : «les vols dans les parkings ainsi que les cambriolages dans les logements ont d’ailleurs souvent lieu durant les heures de repos du gardien».

Il est également possible de solliciter un agent de sécurité au coup par coup, par exemple pour surveiller un parking, ouvert à tous les vents, pour cause de porte de garage provisoirement hors-service.

Et, selon sa taille et son standing, la copropriété peut faire appel de manière pérenne à un vigile, chargé d’effectuer des rondes de nuit pour sécuriser les parties communes, intérieures et extérieures. Cette solution reste toutefois coûteuse, s’élevant généralement à plusieurs milliers d’euros par an.

Attention à la sécurité incendie

Selon la date de construction de l’immeuble, sa hauteur, la présence de commerces en rez-de-chaussée…, des règles différenciées s’appliquent, notamment en matière d’affichage des plans d’évacuation, de portes coupe-feu, d’éclairage de secours ou encore de présence d’extincteurs, avec une obligation d’entretien pour l’ensemble de ces équipements.

Cependant, le syndicat des copropriétaires peut décider, en assemblée générale d’aller, au-delà des exigences réglementaires pour se prémunir au mieux contre le risque incendie.

François-Emmanuel Borrel souligne un point important : «il est interdit d’installer des détecteurs de fumée dans les parties communes car cela risquerait de mettre en danger les occupants de l’immeuble, comme l’explicite une réponse ministérielle. Entendant l’alarme, les occupants seraient tentés de sortir de leur logement, créeraient un appel d’air et prendraient le risque d’inhaler des fumées toxiques, voire pire, de se diriger vers le départ de feu».

À ces règles, s’ajoutent des mesures de bon sens, à savoir ne pas gêner l’accès aux issues de secours sur les paliers, ne pas stationner sur l’emplacement réservé aux pompiers ou encore ne pas entreposer des produits inflammables dans les box.