Copropriété : Les cinq points clés à connaître pour assurer sa copropriété

par Sophie Michelin-Mazeraux, Journaliste juridique
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Alors que l’année 2020 s’inscrit dans un contexte de hausse des charges liée pour partie aux contrats d’assurance, il est essentiel de choisir avec soin son porteur de risques pour bénéficier des garanties les mieux adaptées aux besoins de chaque immeuble en copropriété. Or, la qualité d’un contrat se révèle parfois à l’occasion d’un sinistre, et dans certains cas, c’est la douche froide. Voici cinq points clés pour éviter les déconvenues.

Article paru dans les Informations Rapides de la Copropriété numéro 662 d'octobre 2020

Assurez votre copropriété : Les cinq points clés à connaître

 

Sinistres1.- Evaluer les besoins de l’immeuble

Avant toutes choses, il est indispensable d’analyser précisément les besoins de la copropriété, avant de choisir le contrat idoine au regard de la situation de l’immeuble.

La superficie, l’âge, la situation géographique, la typologie des occupants, l’état général et les équipements de la copropriété fixent ainsi le profil de l’immeuble et guident les besoins en assurance, indépendamment des garanties obligatoires que le syndic doit souscrire.

Par exemple, une présence significative de commerces dans la copropriété peut changer la donne concernant le risque incendie, et inciter au relèvement du plafond de garantie de la multirisque de l’immeuble pour ce poste. Autre cas, si le bâtiment est situé dans une zone urbaine sensible, une garantie facultative couvrant les impayés de charges peut être utile afin de ne pas mettre la copropriété en danger.

Pour être indemnisé au plus juste en cas de sinistre, il est également conseillé de demander à l’assureur de modifier le contrat dès que l’exposition aux risques évolue. «Ainsi, en cas de travaux importants dans l’immeuble, comme une surélévation, certains contrats d’assurance multirisque ne prévoient pas de maintenir la garantie considérant que leur objet n’est pas de couvrir un chantier à ciel ouvert, mais un immeuble», alerte Pascal Dessuet, chargé d’enseignement à l’Université de Paris-Est Créteil, et directeur délégué construction immobilier auprès de la direction générale d’AON France.

 

2.- Identifier les garanties à souscrire

Depuis la loi ALUR, chaque syndicat et chaque copropriétaire doivent s’assurer au titre de leur responsabilité civile. Idem, depuis le 1er juin 2020, pour les conseillers syndicaux [en cas de délégation de pouvoirs de l’assemblée générale – ndlr]. Sans oublier que la réalisation de travaux importants exige, par ailleurs, le recours à une assurance dommages-ouvrage (DO) pour les immeubles en copropriété.

Attention, le défaut de souscription d’une DO alors que des travaux d’une certaine ampleur sont effectués dans l’immeuble, et sans qu’ils portent nécessairement sur des murs porteurs, peut justifier la mise en jeu de la responsabilité civile professionnelle du syndic en cas de sinistre construction.

En cas de refus d’assurance, rappelons qu’il est toujours possible de saisir le bureau central de tarification (BCT) : www.bureaucentraldetarification.com.fr

Avec le contrat la multirisque de l’immeuble, souvent imposé par le règlement de copropriété, l’immeuble, ses parties communes et leur contenu, sont quant à elles protégés, quelle que soit la nature du sinistre (incendie, dégât des eaux, vol, etc.). Des garanties complémentaires peuvent aussi être nécessaires, comme les frais de recherche de fuite d’eau. «Il faut être plus vigilant avec ces garanties facultatives qui relèvent de la pure liberté contractuelle et bien lire ce qu’elles couvrent, et surtout ce qu’elles excluent», observe Pascal Dessuet.

Enfin, le seul montant de la prime est largement insuffisant pour apprécier un contrat. Il faut regarder de près les plafonds de garantie, les sommes qui peuvent rester à la charge de la copropriété (seuil, franchise et vétusté), ainsi que les exclusions de garantie.

 

3.- Faire appel à un courtier ?

Naviguer en solitaire sur le marché de l’assurance pour garantir une copropriété s’apparente à une traversée périlleuse, compte tenu de son organisation singulière, des risques de responsabilité encourus par ses différents organes et des particularités propres à chaque immeuble.

Sans compter que le nombre d’entreprises proposant une multirisque de l’immeuble est pléthorique.

Pour assurer une copropriété, il est par conséquent préférable de contacter un courtier spécialisé dans ce type d’assurances, en capacité de trouver la solution qui convient le mieux à la copropriété, tant du point de vue des garanties que des primes.

D’autant que son rôle ne se limite pas à sélectionner et à négocier des contrats adaptés, mais à suivre la copropriété au cours de ses évolutions, tout en défendant ses intérêts en cas de sinistre.

Quand bien même les comparateurs d’assurances sembleraient séduisants et moins onéreux qu’un intermédiaire, cette option ne devrait pas apporter la même qualité de service. En effet, ces interlocuteurs dématérialisés analysent le marché en se fondant uniquement sur les éléments basiques du contrat (prime, plafond et franchise), sans se livrer à une étude sur-mesure. Et certains de ces comparateurs ne sont pas aussi neutres qu’ils veulent bien le prétendre.

 

4.- Choisir un assureur de la place

Attention aux contrats d’assurance alléchants avec des conditions de souscription allégées et des primes avantageuses : ils peuvent se révéler dangereux. Les défaillances de sociétés d’assurance basées dans l’Union européenne (le plus souvent sous le régime de la libre prestation de services) en offrent une illustration récente en matière d’assurance construction.

Les syndics ayant souscrit des assurances DO auprès de ces compagnies pour les travaux de construction ou de rénovation des immeubles qu’ils gèrent se trouvent ainsi fortement pénalisés. D’une part, si l’assureur disparaît, la copropriété ne dispose d’aucun recours et ne sera pas indemnisée en cas de sinistre. D’autre part, elle devra souscrire un nouveau contrat et donc payer deux primes pour le même chantier.

De nombreux assujettis se sont ainsi vus contraints de saisir le BCT en 2019 afin de garantir ce risque lié à la défaillance des entreprises d’assurance.

Aussi, «il est essentiel de ne travailler qu’avec des assureurs, titulaires d’une notation financière qui ne saurait être inférieure à A, ou avec une mutuelle notoirement reconnue, afin de s’assurer de leurs capacités respectives à rembourser leurs clients/sociétaires en cas de sinistre», conseille Pascal Dessuet. Pour accéder à ces notations, il faut consulter les sites des sociétés Moody’s, Standard and Poor’s ou Fitch, leaders mondiaux de la notation financière. A nouveau, l’assistance d’un courtier peut se révéler précieuse pour ce type de recherches.

 

5.- Mettre régulièrement l’assureur en concurrence : oui, mais…

Revisiter le marché pour mettre l’assureur en concurrence tous les trois à cinq ans apparaît souvent comme une stratégie gagnante, en particulier si la copropriété a dû faire face à des augmentations de primes, alors que sa sinistralité est demeurée stable.

«Toutefois, cette mise en concurrence peut être à double tranchant», alerte Pascal Dessuet. «Aujourd’hui, chaque fois qu’un assureur réécrit les conditions générales d’une police d’assurance, comme la multirisque de l’immeuble, cela va rarement dans le sens d’une extension des garanties», complète-t-il.

Et en cas de souscription d’un nouveau contrat, il est impératif de remplir avec exactitude et sincérité le questionnaire de déclaration des risques. «La moindre erreur, même sans rapport avec le sinistre, peut justifier de la part de l’assureur une baisse significative de l’indemnisation, voire un refus pur et simple de la garantie», rappelle Pascal Dessuet.

Une alternative à la mise en concurrence : il est possible de faire le point avec son assureur sur ses garanties, ses plafonds de prise en charge, ainsi que sur ses franchises, en vue d’une renégociation, à condition d’afficher un faible taux de sinistralité sur les trois dernières années.

 

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