[N°623] - La médiation pour désamorcer les conflits

par Julie HAINAUT
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Elle permet d’éviter les joutes judiciaires et les procédures bien souvent trop longues, complexes et coûteuses. Mais comment y recourir ? Le point.

Il s’agit d’un mode de règlement amiable des conflits permettant de rétablir des relations tendues et faciliter l’information en cas de litige par le biais d’un tiers neutre, indépendant et impartial : le médiateur.
La médiation intervient dans de nombreux domaines : famille, entreprise… et celui de la copropriété - problèmes de voisinage, différends entre le syndic et les copropriétaires, difficultés entre ces derniers et des tiers (professionnels de la construction, par exemple).

L’article 21 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995, modifiée par l’ordonnance n° 2011-1540 du 16 novembre 2011 portant transposition de la directive européenne n° 2008-52/CE du 21 mai 2008 sur certains aspects de la médiation civile et commerciale, définit la médiation comme «tout processus structuré, quelle qu’en soit la dénomination, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l’aide d’un tiers, le médiateur, choisi par elles ou désigné, avec leur accord, par le juge saisi du litige». Cette définition entraîne une véritable souplesse dans la mise en œuvre du processus.

La possibilité pour tout consommateur de recourir à un médiateur

Depuis le 1er janvier 2016, tout consommateur peut recourir à un médiateur. Une ordonnance du 20 août 2015 et un décret du 30 octobre 2015, pris en application de cette même ordonnance, transposent la directive du 21 mai 2013 relative au «règlement extra judiciaire des litiges de consommation» et impose à chaque professionnel de la consommation - et donc les acteurs de l’immobilier - de proposer un service de médiation, indépendant et gratuit (sauf éventuels frais d’expertise) à ses clients. Le but est de permettre au consommateur d’éviter un règlement judiciaire de son litige et de désengorger les tribunaux. Chaque professionnel a l’obligation de communiquer au consommateur les coordonnées du ou des médiateurs compétents dont il relève, sur les documents commerciaux ou sur son site Internet. Quel que soit le médiateur choisi ou concerné, la procédure est unique. Le consommateur (donc un copropriétaire) doit prouver avoir tenté de résoudre directement son litige par une réclamation écrite, en amont. Le médiateur a trois semaines pour préciser si le litige en question relève ou non de sa compétence. Si tel est le cas, il devra alors donner une solution dans les 90 jours. Mais, en cas de difficultés particulières, le délai peut être allongé, auquel cas le médiateur devra en informer le consommateur. Chacune des deux parties pourra, à tout moment, quitter le processus de médiation et porter l’affaire devant les tribunaux. C’est le professionnel qui devra régler la facture. Tout peut se faire en ligne.

Cette avancée ne concerne pas les syndicats de copropriétaires, car ils n’ont pas la qualité de consommateur (Cass. 1e civ., 4 juin 2014, n° 13-13.779 et 13-14.203), mais vise notamment les bailleurs et les copropriétaires pris individuellement.

L’ordonnance du 20 août 2015 confie à la commission d’évaluation et de contrôle de la médiation de la consommation (CECM) l’évaluation stricte du bon fonctionnement de la médiation des litiges de consommation. Aujourd’hui, le dispositif n’est pas encore totalement opérationnel. «Les textes ne sont pas assez explicites pour une telle mise en œuvre, le CECM a été saisi par l’UNIS, mais à ce jour, nous n’avons pas encore de réponse sur nos demandes de précisions» affirme Renaud Franchet, administrateur de l’Union des syndicats de l’immobilier (UNIS).

Des sites dédiés

Le 16 février dernier, Martine Pinville, secrétaire d’Etat chargée de la consommation, a annoncé l’ouverture du site Internet de la médiation de la consommation sur le portail du ministère de l’économie. «Le site de la médiation est le point d’entrée pour tous les Français qui souhaitent résoudre un litige avec un professionnel suite à l’achat d’un produit ou d’un service qu’ils estiment défectueux. Son lancement simultané avec celui de la plateforme européenne permet, dès aujourd’hui, à chaque consommateur de pouvoir trouver facilement et gratuitement une solution amiable. La liste des médiateurs sera complétée, secteur par secteur, dans les meilleurs délais avec pour objectif une couverture totale des marchés de consommation à terme».

Une résolution amiable avant tout litige obligatoire

Le décret n° 2015-282 du 11 mars 2015 relatif à la simplification de la procédure civile, à la communication électronique et à la résolution amiable des différends, modifie, dans son article 18, les articles 56 et 58 du Code de procédure civile. Ainsi, depuis le 1er avril 2015, les parties se doivent d’observer une phase préalable de rapprochement amiable avant tout litige. Ainsi, «sauf justification d’un motif légitime tenant à l’urgence ou à la matière considérée, en particulier lorsqu’elle intéresse l’ordre public», il convient de préciser dans l’acte de saisine «les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige». A défaut de justification de cette tentative, le juge pourra nommer un médiateur ou un conciliateur (le nouvel article 127 du Code de procédure civile). Cela risquerait de ralentir la procédure. En pratique, c’est la médiation qui est le plus souvent proposée, le médiateur favorisant l’apparition de solutions communes venant des personnes elles-mêmes, sans chercher à trancher le conflit à leur place ni les contraindre à un accord (ce qui est le cas de la conciliation). Cette obligation de justifier, dans l’acte introductif d’instance, d’une tentative de résolution amiable du litige, ne comprend donc pas de véritable sanction en cas de manquement. Il s’agit davantage d’une mesure incitative. L’acte ne sera pas nul pour autant. Certains juristes et avocats pointent du doigt le “trop plein” de médiation. «Trop de médiation ne finirait elle pas par nuire à la médiation ?» expriment Pierrette Aufière (avocat honoraire à la cour d’appel de Toulouse et médiatrice familiale formatrice) et Françoise Housty (médiateur judiciaire) dans une tribune intitulée « Le Chemin d’épines de la médiation » (Village justice, 3 juin 2016). De son côté, Christophe Courteau, conciliateur de justice près le tribunal d’instance de Versailles, prévient : «attention de ne pas trop “psychologiser” voire “psychiatriser” le règlement des litiges au risque de pousser aux oubliettes, l’état de droit, garant de nos droits et libertés fondamentaux», avant de préciser qu’il ne faut recourir à la voie amiable ni trop tôt, ni trop tard. «Plus le temps passe entre l’apparition du conflit et la demande de recours à un tiers pour tenter un règlement amiable, plus cela sera difficile voire impossible, car le conflit se sera cristallisé et les positions de l’une ou des parties radicalisées empêchant toute discussion. Dans notre pratique de conciliation conventionnelle notamment en matière de troubles de voisinages, litiges à forte dimension relationnelle, 1 personne sur 2, voire 2 sur 3, refusent de venir discuter avec la partie adverse lors d’une réunion de conciliation tripartite.»
(source village-justice.com)

Les avantages de la médiation

- Elle repose sur le principe du gagnant-gagnant, contrairement à un jugement ; aucune partie ne sera donc lésée.
- Elle rétablit les relations harmonieuses entre les copropriétaires, contrairement à un jugement qui peut les tendre. Elle préserve, ainsi, la bonne entente au sein de la copropriété.
- Elle est moins onéreuse et plus rapide qu’une action en justice. - Le médiateur est librement choisi par les parties.

Face aux impayés, les syndics d’Ile-de-France relance la médiation
Face à la résurgence des litiges liés aux impayés pour les travaux en copropriété, la “Commission de conciliation, de médiation et d’arbitrage” reprend du service et rénove son règlement. Mise en place il y a douze ans par la Chambre FNAIM du Grand Paris, la FFB du Grand Paris et l’UNIS Ile-de-France pour régler à l’amiable les litiges entre les syndics, les copropriétaires et les professionnels du bâtiment, cette commission était beaucoup moins active ces dernières années. Mais la hausse des réclamations liées aux impayés pour travaux et le manque de moyens alloués par l’Etat aux juridictions civiles,w incitent à davantage recourir aux solutions de médiation.

Les liens utiles :
- Medimmoconso, site de l’association des médiateurs de la consommation de la Fédération des Promoteurs Immobiliers. http://medimmoconso.fr/

- MCCA, la Médiation du Commerce Coopération et Associé. www.mcca-mediation.fr

- Médiation de la consommation, un site qui permet d’être mis en relation avec un médiateur compétent en ligne. www.mediation-conso.fr