La lecture d’un contrat d’assurance, composé de conditions générales, de conditions particulières, voire d’annexes, relève bien souvent du casse-tête chinois.
Sans compter l’usage habituel de termes abscons dans la police d’assurance que seuls les initiés maîtrisent. L’assurance de la copropriété, souscrite au nom du syndicat des copropriétaires par le syndic, n’échappe pas à cette règle.
Alors que les différentes offres disponibles sur le marché comportent, pour la plupart, des garanties socles semblables (couverture dommages, responsabilité civile et protections complémentaires), il est capital pour le syndic d’être attentif aux zones grises du contrat.
En particulier, les modes d’indemnisation, les exclusions à la couverture, les plafonds de garantie et les montants de franchise.
C’est là que se jouent les équilibres du contrat d’assurance de la copropriété ouverts à la libre négociation.
Assurance et copropriété : de quoi parle-t-on ?
Depuis 2014, la loi ALUR impose au syndicat des copropriétaires de s’assurer contre les risques de responsabilité civile (RC) dont il doit répondre, par exemple le défaut d’entretien des parties communes. Cette garantie RC de la copropriété a pour but d'indemniser les dommages matériels ou corporels causés par le bâtiment lui-même ou encore par les personnes affectées au service de l’immeuble. Elle peut donc s'avérer précieuse si, par exemple, un locataire glisse et se blesse dans la cour intérieure de l’immeuble en raison du gel, ou encore si le gardien fait chuter accidentellement un tiers dans l’escalier.
Parallèlement, et bien que ce ne soit pas une obligation légale, la plupart des règlements de copropriété imposent au syndic de souscrire une assurance de dommages qui permet à la copropriété d'être indemnisée en cas de sinistre subi par l’immeuble, au même titre que le contrat multirisque habitation du propriétaire d'un bien individuel. Les événements classiquement couverts par cette assurance de dommages de la copropriété sont l’incendie, la foudre, l’explosion, les dégâts des eaux, les actes de terrorisme, le bris de glaces, la tempête, la grêle, la neige sur les toitures, le vol et les catastrophes naturelles ou technologiques (tous les contrats d’assurance de biens couvrent obligatoirement les dommages matériels dus à ces événements dès lors qu’un arrêté de catastrophe est pris).
La Fédération française de l’assurance (FFA) recommande d’inscrire au contrat d’assurance de la copropriété deux dispositions, jugées essentielles. D’une part, le contrat doit stipuler que la société d’assurances qui couvre la copropriété ne se retournera pas contre le copropriétaire responsable d’un sinistre ni contre le syndic. Cette clause peut être étendue à tous les occupants de l’immeuble (par exemple, les locataires). D’autre part, les copropriétaires doivent être considérés par le contrat d’assurance comme des tiers entre eux en cas de dommages aux biens de l’un d’eux. À défaut, l’assureur n’interviendrait pas, car la garantie de responsabilité civile ne couvre pas les dommages subis par l’assuré. Or, dans l’assurance collective, chaque copropriétaire a la qualité d’assuré. Autrement dit, si un copropriétaire est victime d’un dommage dont la copropriété est responsable, il pourra tout de même être protégé et indemnisé grâce à la stipulation de cette clause au contrat.
En quoi la souscription de garanties complémentaires au contrat de base peut-elle se révéler utile ?
Le contrat d’assurance de la copropriété peut inclure diverses options susceptibles de faire la différence en cas de sinistre. Ainsi, peuvent être pris en charge des frais, dits «annexes», dont le coût peut se révéler en réalité fort conséquent. Il s’agit notamment, des honoraires de l’expert mandaté par l’assureur, des frais de recherche de fuites en cas de dégât des eaux, des frais de relogement en cas d’incendie, etc. Toujours en option, les garanties de l’assurance de la copropriété peuvent également s’appliquer à l'ensemble des aménagements extérieurs : parking, portails, digicodes et espaces verts.
Il n’est pas non plus inutile d'inclure une garantie de protection juridique au sein de l'assurance de la copropriété, en particulier si la fonction de syndic est assurée à titre bénévole. L’assureur garantit alors au syndicat des copropriétaires l’assistance pour tout litige amiable ou en cas de procédure judiciaire devant le tribunal compétent, que la copropriété soit à l’initiative de la réclamation, ou qu’elle soit assignée par un tiers. Cette assurance ne joue pas, en revanche, contre un copropriétaire. Avec cette garantie complémentaire, les frais et honoraires d’expert, d'huissier ou d'avocat sont pris en charge dans la limite des montants visés au contrat. En cas de désaccord entre la copropriété et l’assureur sur les mesures à prendre pour régler un différend, l’assuré peut recourir à la procédure d’arbitrage prévue à l’article L. 127-4 du Code des assurances ou, à défaut, saisir le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés. Cette assurance peut être proposée dans un contrat autonome ou en garantie accessoire.
Toutes les combinaisons de garanties sont possibles au sein de la police d’assurance de la copropriété, à condition que le contrat contienne a minima deux couvertures indispensables : «incendie et événements assimilés» et «dégât des eaux».
Les intermédiaires en assurance (courtiers, agents ou mandataires) conseillent en général au syndic d’aller vers des formules complètes, comme le contrat multirisque habitation afin de couvrir un maximum de risques.
Valeur de reconstruction ou valeur à neuf : quelle option privilégier ?
Lors de la signature du contrat d’assurance de la copropriété, il convient de choisir avec soin entre la valeur de reconstruction ou la valeur à neuf. En effet, celle-ci détermine le montant de l’indemnisation en cas de sinistre, un incendie par exemple. La valeur de reconstruction se calcule à partir de la valeur réelle de l’immeuble, c’est-à-dire son prix de reconstruction, vétusté déduite. Le taux de vétusté est lui-même fonction de l’ancienneté du bâtiment, de son usage ou encore de son niveau d’entretien. Dans le cas d’une garantie en valeur de reconstruction, c’est l’expert missionné par l’assureur qui détermine le taux de vétusté. Cette valeur est exprimée en capital. La plupart des assurances d’immeuble étant indexées, le syndic doit périodiquement vérifier le montant des garanties et, le cas échéant, le faire évoluer.
Mais les copropriétaires peuvent juger insuffisant un remboursement limité à la valeur de reconstruction, vétusté déduite. Moyennant une prime d’un montant supérieur, ils peuvent alors choisir la valeur à neuf. Celle-ci correspond à la valeur de reconstruction, vétusté déduite, à laquelle on ajoute un pourcentage précisé dans le contrat, ne dépassant pas généralement 25 % de la valeur de reconstruction. À cela s’ajoute une condition : l’immeuble doit être reconstruit au même endroit dans un délai de deux ans, sauf impossibilité.
Attention toutefois, un immeuble ayant un taux de vétusté trop important peut se voir refuser par l’assureur l’indemnisation en valeur à neuf ; le sinistre sera donc indemnisé en valeur de reconstruction, vétusté déduite.
Toujours dans le souci d’une meilleure indemnisation, le syndic peut opter, en complément, pour la garantie des pertes indirectes. Elle permet à la copropriété d’être indemnisée sur justificatifs des frais et pertes restant à sa charge à la suite d’un sinistre garanti.
Il convient de préciser qu’en matière d'assurance de responsabilité, l'indemnité d'assurance n’est pas «à la carte». Elle ne peut excéder le montant des dommages-intérêts mis à la charge de l'assuré responsable (le syndicat des copropriétaires par exemple). Cette dette, qui correspond au préjudice subi par la victime, est soit évaluée par le juge à l'issue d'un procès, soit fixée amiablement par transaction avec l'assureur.
Selon quelle alchimie se calcule le montant de la prime d’assurance ?
Le montant de la prime d'assurance de l'immeuble répond aux mêmes règles que n'importe quel autre bien à assurer. Pour le dire autrement, son montant dépend du risque couvert. Le premier élément pris en compte est la taille de l'immeuble, exprimée en «surface développée». Elle correspond à la superficie totale des bâtiments prise à l’extérieur des murs de l’immeuble, multipliée par le nombre d’étages, plus le rez-de-chaussée. Les caves et les combles non aménagés seront réduits à 50 % de la surface réelle, ainsi que les parkings et les remises. L’addition de ces deux chiffres donne la surface développée en mètres carrés. Lorsqu'une nouvelle police d’assurance est négociée, il n’est pas rare que ce soit la superficie stipulée dans le précédent contrat qui soit reprise, par facilité. Mais, si cette superficie est supérieure à la réalité, la copropriété sera lésée, car elle paiera trop cher son assurance. À l’inverse, si cette superficie est inférieure, la copropriété risque une indemnisation partielle en cas de sinistre. Il est donc utile de vérifier la surface développée de la copropriété, voire de la corriger, avant la souscription d’un nouveau contrat.
D’autres critères sont étudiés par l’assureur pour l’évaluation de la prime, tels que la date de construction, la nature des matériaux de construction, les équipements, l’état d’entretien de l’immeuble, sa situation géographique ou son exposition à certains risques naturels. Par exemple, le risque incendie est majoré en présence d’un restaurant en rez-de-chaussée de la copropriété. Deux solutions sont alors possibles : soit l'ensemble de la copropriété supporte le poids de la majoration, soit seul le propriétaire des locaux jugés à risque prend à sa charge la surprime. Autre paramètre de tarification important, la fréquence et la nature des sinistres que la copropriété a déclarés dans le passé. En pratique au moment de la souscription du contrat, l’assureur demande la communication du suivi de sinistralité de l’immeuble sur les deux à cinq dernières années ; soit tous les sinistres qui ont fait l’objet d’une déclaration à l’assureur par le syndic, peu importe qu’il y ait eu ou non une indemnisation ensuite. En cas de forte sinistralité, des franchises conséquentes peuvent être appliquées, que le syndic est libre ou non d’accepter. Chaque immeuble fait donc l’objet d’une négociation particulière, et la mise en concurrence des contrats s’avère indispensable.
Quelles clauses du contrat d’assurance de la copropriété appellent une vigilance particulière ?
Le seul critère tarifaire pour apprécier la qualité d’une couverture assurantielle est insuffisant. D’autres éléments sont à scruter de près : quel est le champ d’application exact du contrat d’assurance ? Y a-t-il des exclusions à la couverture ? Quels sont les niveaux de franchises et les montants des plafonds de garantie ?
S’agissant des exclusions de garantie, la liste peut être longue ; il faut donc être vigilant car l’assureur peut ainsi exclure de la couverture, le fait intentionnel, les sanctions pénales et leurs conséquences (amendes), les dommages causés directement ou indirectement par l’amiante, le plomb, les moisissures toxiques ou les champignons, le vol commis par un préposé ou un locataire, les dommages occasionnés par le vent, la grêle ou le poids de la neige sur les biens laissés à l’extérieur, etc. À ces exclusions peuvent s’ajouter des restrictions de garantie. Par exemple : une réduction d’indemnité peut être appliquée en cas de dommages causés par le gel aux canalisations et appareils de chauffage si l’assuré ne prend pas les précautions (vidange et coupure d’eau) en cas d’absence supérieure à trois jours consécutifs.
Il est essentiel également de vérifier le montant des plafonds de garantie, c’est-à-dire le montant maximum des sommes qui seront versées en cas de sinistre. Les contrats prévoient, en principe, plusieurs plafonds de remboursement selon qu’il s’agit des garanties couvrant les dommages à l’immeuble ou la responsabilité civile de la copropriété, avec à nouveau une distinction entre dommages matériels et dommages corporels.
En cas de sinistre, le contrat prévoit de laisser une partie des dépenses à la charge de la copropriété. Ces franchises sont indiquées dans les conditions particulières de la police d’assurance et relèvent de la libre négociation. À titre d'exemple, nombre de contrats prévoient de n'indemniser un sinistre qu'au-delà d'une franchise égale à 10 % du montant des dommages, obligeant ainsi la copropriété à être son propre assureur pour les petits sinistres ou les sinistres dits de «fréquence», comme le dégât des eaux. Mais il existe des montants de franchise plus élevés, parfois avec des montants planchers, allant de quelques centaines à quelques milliers d'euros pour des sinistres plus importants (incendie ou catastrophe naturelle). Accepter des franchises peut être un moyen de diminuer la prime. Quoi qu’il en soit, pour éviter de surpayer l'assurance, l'assureur doit être remis en concurrence régulièrement par le syndic.