Copropriété : L'ordre du jour de l'assemblée générale

par David Rodrigues, Juriste à l’association Consommation, Logement et Cadre de Vie (CLCV)
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©Ralf Geithe_AdobeStock_280708911L’assemblée générale ne peut délibérer valablement que sur les points inscrits à l’ordre du jour. D’où la nécessité que celui-ci soit le plus précis possible.

Si la rédaction de l’ordre du jour demeure assez libre, certaines résolutions ou formalités sont incontournables.

Article paru dans les Informations Rapides de la Copropriété numéro 685 de janvier-février 2023

Établissement de l’ordre du jour

L’ordre du jour de l’assemblée générale est établi en concertation avec le conseil syndical (art. 26, D. 17 mars 1967). Toutefois, les textes ne précisent nullement quelles conséquences pourraient découler du non-respect de cette formalité (CA Orléans, 18 juin 2018, n° 16/03784) de sorte que l’ordre du jour réalisé en totale autonomie par le seul syndic demeure valable, sans possibilité d’en contester le contenu.

En parallèle, un ou plusieurs copropriétaires peuvent, à tout moment, notifier au syndic la ou les questions dont ils demandent l’inscription à l’ordre du jour. Le syndic est alors tenu de les porter sur la convocation de la prochaine assemblée. Toutefois, si la ou les questions notifiées ne peuvent être inscrites à cette assemblée compte tenu de la date de réception de la demande par le syndic, elles le sont à l’assemblée suivante (art. 10, D. 17 mars 1967). Un simple mel est inopérant pour solliciter l’inscription d’une question à l’ordre du jour : la demande doit être communiquée en recommandé et être, le cas échéant, accompagnée des documents nécessaires (devis, plan des travaux…). A défaut de quoi, le syndic serait en droit d’en refuser l’inscription.

 

Théorie des incidents de séance

L‘assemblée générale ne prend de décision valide que sur les points inscrits à l’ordre du jour (art. 13, D. 17 mars 1967). L’adoption d’une résolution non inscrite est donc nulle (Cass. 3e civ., 9 juin 1993, n° 91-15.791), sauf à faire appel à la théorie des «incidents de séance». Cette théorie est intéressante en ce qu’elle consiste à valider le vote de l’assemblée générale sur une question non-prévue initialement. Cela était notamment le cas lorsque le syndic démissionnait en séance de façon brutale et non concertée. Il était alors procédé à la désignation d’un syndic temporaire (le président du conseil syndical, par exemple) afin que celui-ci convoque une nouvelle assemblée générale. Les réformes opérées par l’ordonnance du 30 octobre 2019, en ce qu’elles encadrent les modalités de démission du syndic, devraient rendre marginal le recours à la théorie des incidents de séance.

 

Rédaction des résolutions

Le projet de résolution n’a pas à être rédigé pour toutes les questions soumises à l’assemblée générale mais uniquement pour celles dont ce formalisme est expressément prévu par les textes [questions mentionnées aux articles 14-1 (al. 2 et 3) 14-2 (al. 2), 18-1 A, II (al. 1 et 2), 24 II, 25, 26, 30 (al. 1, 2 et 3), 35, 37 (al. 3 et 4) et 39 de la loi du 10 juillet 1965 et art. 11, 7° du décret du 17 mars 1967)]. À titre d’exemple, sont notamment soumis à cette obligation :

- le vote du budget prévisionnel et des dépenses hors budget prévisionnel ;

- les conventions passées entre le syndicat et une personne ou une entreprise ayant avec le syndic des liens capitalistiques ou juridiques ;

- l’ensemble des résolutions visées à l’article 24 II de la loi du 10 juillet 1965, tels que les travaux nécessaires à la conservation de l’immeuble (ravalement…), de sécurisation (digicode…), ou obligatoires (à la suite d’un arrêté de péril, par exemple), les travaux d’accessibilité aux personnes handicapées ou à mobilité réduite… ;

- l’ensemble des résolutions visées à l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965 (désignation du syndic, du conseil syndical, réalisation de travaux d’économie d’énergie…) ;

- l’ensemble des résolutions visées à l’article 26 de la loi du 10 juillet 1965 (actes d’acquisition immobilière, suppression du poste de concierge ou de gardien…) ;

- les travaux d’amélioration, de transformation d’un ou de plusieurs éléments d’équipement existants, l’adjonction d’éléments nouveaux.

Le fait de ne pas procéder à la rédaction des projets de résolution entache d’irrégularité la décision concernée et rend possible un recours en annulation (Cass. 3e civ., 13 nov. 2003, n° 02-12.311).

 

Droit d’amendement

Malgré l’obligation de procéder à leur rédaction, les résolutions ne sont pas pour autant figées : l’assemblée générale conserve son pouvoir d’amendement, le texte pouvant évoluer au fil des débats. Il a ainsi été jugé qu’aucune disposition n’impose la stricte identité de rédaction entre le projet de résolution et le texte finalement adopté (Cass. 3e civ., 15 avr. 2015, n° 14-13.255). La limite toutefois est de ne pas dénaturer la question initiale dans la mesure où elle pourrait alors s’apparenter à une nouvelle résolution qui n’aurait pas été finalement inscrite à l’ordre du jour.

 

Points à inscrire impérativement

Si, de manière générale, le contenu de l’ordre du jour n’est que peu règlementé, certaines résolutions doivent néanmoins y être obligatoirement inscrites. Il s’agit notamment de la désignation du président, des scrutateurs et du secrétaire de séance. Il a, d’ailleurs, été considéré que toute résolution adoptée avant la désignation du président est frappée de nullité (CA Paris, 8 nov.2001, Admin 4/2002,50).

L’assemblée générale doit également se prononcer sur l’approbation des comptes et l’adoption du budget prévisionnel, ainsi que sur la désignation du syndic et des conseillers syndicaux si leur mandat arrive à échéance. Elle doit statuer, par deux résolutions séparées, sur les montants des marchés et contrats à partir desquels la saisine du conseil syndical et une mise en concurrence sont obligatoires.

Dans un autre registre, l’assemblée doit délibérer sur le taux de la cotisation pour le fonds de travaux et sur la souscription d’un contrat d’assurance contre les risques de responsabilité civile dont doit répondre le syndicat.

Naturellement, d’autres résolutions doivent être prévues à l’ordre du jour selon les circonstances et les demandes des copropriétaires : autorisation de réaliser des travaux affectant les parties communes, habilitation du syndic à agir en justice, mise en place d’une délégation conventionnelle au profit du conseil syndical…

©Ralf Geithe_AdobeStock_280708911 

 

La copropriété point par point - David Rodrigues