Copropriété : La durée du contrat de syndic

par David Rodrigues, Juriste à l’association Consommation, Logement et Cadre de Vie (CLCV)
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©Tiko/AdobeStock_213111849Le contrat de syndic a ceci de particulier qu’il est un mandat soumis à la volonté des parties mais dont le contenu est extrêmement encadré.
La preuve avec le contrat type institué par décret et dont le professionnel ne peut en modifier la rédaction sous aucun prétexte.
De fait, les points relevant de la simple volonté des parties s’avèrent finalement peu nombreux. À ce titre, si la durée du mandat peut être négociée entre le syndic et les copropriétaires, elle demeure soumise à quelques limites.

Article paru dans les Informations Rapides de la Copropriété numéro 682 d'octobre 2022

Un contrat limité à trois ans 

La durée des fonctions du syndic ne peut excéder trois ans (art. 28, Décret du 17 mars 1967). Il s’agit ici d’un seuil maximal, les parties pouvant décider d’une durée inférieure dans la limite de trois ans. On notera qu’il n’y a pas de durée minimale de sorte qu’il est possible de conclure un contrat de quelques mois seulement dès lors que cela est justifiée par la situation ou les caractéristiques de la copropriété. De même, l’éventail des durées possibles est extrêmement large et ne se limite pas à une, deux ou trois années. Certains syndics n’hésitent pas à définir des durées assez atypiques afin de caler la fin de leur mandat avec celui de l’expiration du délai de six mois suivant la clôture des comptes pour la tenue de l’assemblée générale. Ainsi peut-on ainsi trouver des contrats d’une durée de quatorze mois et dix-huit jours, par exemple. 

Le règlement de copropriété ne peut en aucun cas déterminer une durée plus longue du contrat de syndic (TGI Marseille, 27 mai 1972), la limite de trois années étant d’ordre public. 

Une durée déterminée

Le contrat doit contenir une durée déterminée (art. 18 VI, Loi du 10 juillet 1965) avec indication «des dates calendaires de prise d’effet et d’échéance». Cette précision émane de l’article 29 du décret du 17 mars 1967, lequel a été modifié à plusieurs reprises en vue de mettre fin à une pratique ancienne et qui a pourtant la vie dure malgré les réformes successives, à savoir le report de la fin du mandat en fonction de la date de l’assemblée générale. L’exemple type est la clause prévoyant que le contrat prendra fin à une date donnée et «au plus tard, à la date de l’assemblée générale appelée à statuer sur les comptes». En plus du flou inhérent à ce type de rédaction relativement imprécise, une telle situation permettait au syndic d’influer directement sur la durée de son mandat en reportant dans le temps la date de convocation de l’assemblée générale.

L’article 29 du décret du 17 mars 1967 a donc été modifié une première fois en 2004 afin que le contrat précise sa durée et sa date de prise d’effet. Pour autant, cela n’a pas mis fin à la pratique consistant à renvoyer l’échéance du mandat à la date de l’assemblée générale. L’article 29 a alors été modifié une seconde fois, par le décret n° 2010-391 du 20 avril 2010, lequel a imposé l’obligation pour le contrat de prévoir les dates calendaires de prise d’effet et d’échéance, rédaction qui perdure encore à l’heure actuelle. De fait, le sujet devrait être clos. Pour autant, on trouve encore, bien que plus rarement, des clauses de ce type. Faute pour le contrat de fixer ses dates de prise d’effet et d’échéance avec précision, la résolution portant sur la désignation du syndic peut être annulée. La Cour de cassation avait statué en ce sens dans une affaire où les juges du fond avaient refusé de prononcer l’annulation au motif que le renvoi à la date de l’assemblée générale n’avait pas eu comme conséquence de conférer au mandat une durée supérieure à trois ans. La Cour de cassation n’a nullement pris en compte cet argument et s’attache donc à ce que le contrat soit correctement rédigé sur ce point (Cass. 3e civ., 31 mai 2018, n° 17-18.046).

Cette réforme empêche également toute reconduction tacite du mandat, que la durée soit déterminée ou non. Il avait été effectivement jugé qu’un renouvellement d’une durée indéterminée était licite dès lors qu’il était possible de mettre fin aux fonctions du syndic à tout moment (CA Paris, 21 janvier 1991). A noter que si le langage courant fait régulièrement référence au renouvellement du mandat, il s’agit dans la réalité d’un nouveau contrat pouvant différer du précédent tant sur sa durée que sur le coût des honoraires ou les prestations proposées par exemple (révision à la hausse ou à la baisse du nombre de visites de l’immeuble…).

Exception à la durée de trois ans

Lorsque le syndic, son conjoint, son partenaire lié à lui par un pacte civil de solidarité, son concubin, leurs commettants ou employeurs, leurs préposés, leurs parents ou alliés jusqu’au deuxième degré inclus ont, directement ou indirectement, à quelque titre que ce soit, même par personne interposée, participé à la construction de l’immeuble, alors le mandat ne peut dépasser une année et ce pendant toute la durée de la garantie décennale des constructeurs (art. 28, al. 2, Décret du 17 mars 1967). Il s‘agit ici de limiter un éventuel conflit d’intérêt avec le syndic ou ses proches en cas de survenance de désordres susceptibles d’engager la responsabilité du constructeur. 

La jurisprudence peut s’avérer sévère sur la notion de participation à la construction. Ainsi a-t-il été jugé que la limitation de la durée du mandat s’appliquait, et ce pendant dix ans, au syndic ayant assuré les fonctions d’associé ou de dirigeant de la société promoteur, quand bien même aurait-il perdu cette qualité (Cass. 3e civ., 2 déc. 2009, n° 08-20.073).

La limitation ne porte que sur la durée du mandat et non la possibilité d’élire ou non un tel syndic. En conséquence, rien ne s’oppose à élire le même cabinet, année après année (Cass. 3e civ., 6 mars 2002, n° 00-10.405), dès lors que le contrat n’excède pas un an. Passé le délai de dix ans, l’exception prend fin et il est alors possible de désigner le syndic pour une durée supérieure à une année, mais dans la limite de trois ans. 

Cette limitation de la durée du mandat ne s’applique cependant pas au bailleur social qui procèderait à la vente d’un ou plusieurs lots dans l’immeuble. Dans une telle hypothèse, l’organisme HLM est alors syndic de plein droit, sauf renonciation de sa part (art. L. 443-15, CCH).

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La copropriété point par point - David Rodrigues