Copropriété | La passerelle de majorité de l’article 26-1

par David Rodrigues, Juriste à l’association Consommation, Logement et Cadre de Vie (CLCV)
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copropriétéLe principe des passerelles de majorité en copropriété est bien connu : il permet d’organiser un «vote de rattrapage» lorsqu’une résolution n’a pas obtenu la majorité requise. 

Une façon de lutter contre l’absentéisme en assemblée générale et d’éviter toute paralysie du processus décisionnel.

La passerelle de majorité la plus connue est celle de l’article 25-1.

Pour autant, l’ordonnance de réforme du 30 octobre 2019 en a créé une seconde, celle de l’article 26-1.

Article paru dans les Informations Rapides de la Copropriété numéro 680 de juillet août 2022

La majorité de l’article 26

La majorité de l’article 26, appelée également «double majorité» ou «majorité qualifiée» est l’une des plus complexes à obtenir au regard des conditions posées pour l’approbation de la résolution en question. Cette dernière doit en effet recueillir l’approbation de «la majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux-tiers des voix».

Cette majorité nécessite donc de prendre en compte le nombre de copropriétaires composant la résidence, mais également leur nombre de voix. Ainsi, dans une copropriété comprenant 50 copropriétaires, la majorité est atteinte lorsque la résolution obtient un vote favorable de 26 copropriétaires (la moitié + 1) représentant au moins 6 667 / 10 000èmes (pour un exemple de tantièmes de 10 000èmes). Des conditions qui imposent une mobilisation certaine mais qui demeure, dans les faits, assez limitée ; le taux de participation aux assemblées générales avoisinant les 50 %. La création d’une passerelle de majorité était donc indispensable.

Les conditions de la passerelle de l’article 26-1

La passerelle de majorité est ainsi définie : «Nonobstant toute disposition contraire, lorsque l’assemblée générale n’a pas décidé à la majorité prévue au premier alinéa de l’article 26 mais que le projet a au moins recueilli l’approbation de la moitié des membres du syndicat des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance, représentant au moins le tiers des voix de tous les copropriétaires, la même assemblée se prononce à la majorité des voix de tous les copropriétaires en procédant immédiatement à un second vote».

Contrairement à la passerelle de l’article 25-1 qui ne prend en compte que le nombre de voix recueillies par la résolution, celle de l’article 26-1 pose des critères à la fois de personnes et de tantièmes, par symétrie avec la majorité originelle.

Ainsi, la résolution doit-elle être approuvée par la moitié des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance. Ne sont donc pris en compte que les participants, directs ou indirects (mandat…) à l’assemblée générale et non plus l’ensemble des copropriétaires composant le syndicat. Par ailleurs, on ne vise plus la majorité de ces copropriétaires, mais la «moitié» seulement. Ensuite, ces mêmes copropriétaires doivent représenter au moins le tiers des voix du syndicat. Lorsque ces conditions sont réunies, alors un nouveau vote est organisé à la majorité des voix de tous les copropriétaires (l’équivalent en quelque sorte de la majorité de l’article 25). Une question s’est alors posée : est-il possible de procéder, ensuite, à une nouvelle passerelle de majorité si la résolution n’obtient toujours pas le nombre de voix requis mais recueille au moins un tiers des voix du syndicat, autrement dit les conditions de mise en œuvre de la passerelle de l’article 25-1 ?

S’il est bien précisé que l’assemblée générale procède à un «second» vote, ce qui exclut théoriquement l’organisation d’un troisième, des précisions n’étaient pas superflues. C’est chose faite avec l’article 19-1 du décret du 17 mars 1967, modifié par le décret n° 2020-834 du 2 juillet 2020, qui exclut expressément tout recours à la passerelle de majorité de l’article 25-1 si la résolution concernée n’obtient toujours pas le nombre de voix requis malgré le recours à la passerelle de l’article 26-1. «Passerelle sur passerelle ne vaut» en quelque sorte.


exemples de recours à la passerelle de majorité

L’automaticité du recours à la passerelle 

A l’instar de l’article 25-1, le recours à la passerelle de l’article 26-1 est automatique. Non seulement l’assemblée générale n’a pas à débattre sur l’opportunité d’un second vote (rappelons qu’avant la réforme par ordonnance de 2019, le recours à la passerelle de l’article 25-1 était facultatif, l’assemblée générale pouvant ne pas y recourir si elle le souhaitait) mais de plus, le vote doit avoir lieu immédiatement. Impossible donc de remettre la question en fin de séance, par exemple. 

Les résolutions concernées par la passerelle

Le recours à la passerelle se fait «nonobstant toute disposition contraire». Elle est donc possible quand bien même un texte n’en prévoirait pas expressément l’application (le refus d’instituer un conseil syndical visé par l’article 21 de la loi du 10 juillet 1965, par exemple). Cette rédaction résulte des débats concernant la passerelle de l’article 25-1 : son application était parfois prévue par les textes, parfois non, sans que l’on puisse systématiquement en déduire l’intention du législateur, sauf disposition expresse. Les auteurs de l’ordonnance de réforme de 2019 ont donc voulu clore les débats sur cette question en rendant la passerelle possible pour toutes les résolutions relevant de l’article 26.