Indissociable de l’assemblée générale, la feuille de présence permet de s’assurer de l’identité des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance. Cependant, l’intérêt de ce document ne se limite pas au seul contrôle de l’assemblée. Il est en effet prisé par les copropriétaires, au grand dam de certains syndics, méfiants lorsqu’une demande de communication leur est faite.
Article paru dans les Informations Rapides de la Copropriété numéro 668 de mai 2021
Son établissement
Il est tenu, pour chaque assemblée générale, une feuille de présence (art. 14, D. 17 mars 1967). Toutefois, les textes ne définissent ni la personne chargée de son établissement, ni le moment où cette formalité doit être accomplie.
D’ordinaire, elle est élaborée par le syndic (CA Paris, 4 avr. 1991) mais cela n’interdit nullement à un copropriétaire de le faire. Hypothèse rare que l’on rencontrait lorsqu’il était envisagé de remercier le syndic et que l’on craignait que celui-ci ne quitte la séance, emmenant avec lui la feuille de présence. Toutefois, les modifications opérées par l’ordonnance d’octobre 2019 en matière de changement de syndic devraient désormais rendre inutiles de telles précautions.
Concernant l’établissement de la feuille de présence, la cour d’appel d’Aix-en-Provence avait estimé, dans un arrêt du 30 mars 1995, que celle-ci devait être postérieure à l’élection du président de séance. Elle s’est appuyée, pour cela, sur l’article 15 du décret du 17 mars 1967 qui impose que cette désignation se fasse «au début de chaque réunion».
Une solution qui n’est pas partagée puisque la cour d’appel de Paris, dans une décision du 4 juillet 2002, a opté pour une position inverse. En effet, les juges ont considéré que l’élection du président de séance ne pouvait se faire «qu’une fois connue la composition de l’assemblée, afin que soient déterminés le nombre de voix des copropriétaires ou associés présents ou représentés et, par-là, la majorité nécessaire à l’élection des membres du bureau ». Et de conclure qu’il s’agit de «l’objet de la feuille de présence». Une solution de bon sens.
Son contenu
La feuille de présence doit indiquer les nom et domicile de chaque copropriétaire ou associé :
- présent physiquement ou représenté ;
- participant à l’assemblée générale par visioconférence, par audioconférence ou par un autre moyen de communication électronique ;
- ayant voté par correspondance avec mention de la date de réception du formulaire par le syndic.
Dans le cas où le copropriétaire ou l’associé est représenté, la feuille de présence doit mentionner les nom et domicile du mandataire et préciser, le cas échéant, si ce dernier participe par visioconférence, audioconférence…
Par ailleurs, le nombre de voix dont dispose chaque copropriétaire doit être précisé, application faite, le cas échéant, des règles de diminution des voix applicables à un copropriétaire majoritaire ou à un mandataire détenant quatre mandats ou plus.
Elle est émargée par chaque copropriétaire, associé ou mandataire présent physiquement à l’assemblée générale, les personnes votant par correspondance ne pouvant se prêter à l’exercice. Sur ce point, la mention de la date de réception du formulaire de vote par le syndic permettra de s’assurer si le délai minimum de trois jours francs a bien été respecté.
Enfin, la feuille de présence est certifiée exacte par le président de séance et est annexée au procès-verbal (art. 17, D.17 mars 1967).
Sa forme
La feuille de présence peut comporter plusieurs feuillets et être tenue sur support écrit ou sous forme électronique. Dans ce cas, le syndic devra utiliser un procédé d’identification garantissant le lien entre la signature de l’intéressé (copropriétaire, mandataire…) et la feuille de présence. La fiabilité du dispositif est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie, le tout reposant sur un certificat de signature électronique répondant à des exigences techniques précises (art. 1366 et 1367, Code civil).
Sa communication
La feuille de présence constitue une annexe du procès-verbal. A ce titre, elle peut être communiquée à tout copropriétaire qui en fait la demande, à ses frais (art. 33, D. 17 mars 1967). Une démarche que certains syndics voient d’un mauvais œil puisque ce document permet de contacter les autres copropriétaires, ce qui est utile lorsque l’on souhaite leur faire part de doléances sur la gestion actuelle… Il est vrai qu’en parallèle, la communication de données personnelles peut légitimement interpeler le syndic, justifiant ainsi une certaine réticence. Pourtant, la Cour de cassation a eu l’occasion de rappeler l’obligation du syndic en ce domaine (Cass. 3e civ., 4 janv. 1996). De même, a-t-il été précisé que le syndic ne pouvait justifier son refus en arguant du respect de la vie privée (CA Chambéry, 24 avr. 2008). Et l’introduction du RGPD (Règlement général sur la protection des données personnelles) de n’avoir ici aucune conséquence, l’obligation de transmission résultant d’une mesure règlementaire.
Les irrégularités
L’absence de feuille de présence constitue une cause de nullité de l’assemblée générale (Cass. 3e civ., 27 avr. 2011). En revanche, il a été jugé que l’absence de certification n’était pas un motif pertinent d’annulation de l’assemblée générale dès lors que ni l’exactitude des mentions de cette feuille ni le procès-verbal de l’assemblée n’étaient contestés (Cass. 3e civ., 27 avr. 2011). Il s’agissait ici de faire preuve d’un certain pragmatisme et d‘éviter qu’une simple erreur ne soit invoquée à titre dilatoire en vue d’obtenir l’annulation de l’assemblée générale. Une position reprise à l’occasion de la réforme du droit de la copropriété puisqu’il est désormais précisé que l’irrégularité formelle affectant le procès-verbal d’assemblée générale ou la feuille de présence, lorsqu’elle est relative aux conditions de vote ou à la computation des voix, n’entraîne pas nécessairement la nullité de l’assemblée générale dès lors qu’il est possible de reconstituer le sens du vote et que le résultat de celui-ci n’en est pas affecté (art. 17-1, D. 17 mars 1967).