[N°652] Le “pré-état” daté

par David Rodrigues, Juriste à l’association Consommation, Logement et Cadre de Vie (CLCV)
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Pré-état datéLe “pré-état” daté a ceci de particulier qu’il n’a pas d’existence légale. Cette dénomination résulte de la pratique des professionnels et concerne les documents qui doivent être remis à l’occasion d’une vente préalablement à ceux fournis dans le cadre de l’état daté. D’où son nom.

Et c’est précisément l’articulation entre l’obligation de transmettre certaines informations, d’une part, et l’absence de précisions quant à la possibilité ou non pour un syndic de facturer cette prestation, d’autre part, qui est source de confusion pour les copropriétaires. Toutefois, l’évolution récente des textes devrait permettre d’améliorer la situation.

 

Contenu du “pré-état” daté


On désigne par “pré-état daté”, l’ensemble des éléments devant être transmis à l’acquéreur d’un lot en copropriété. L’étendue des informations à communiquer varie alors selon la taille de la résidence, la nature du lot vendu et la qualité de l’acquéreur, à savoir s’il est déjà propriétaire ou non d’un lot dans la copropriété en question (art. L. 721-2 CCH).

Doivent ainsi être transmis :

1°) Les documents relatifs à l’organisation de l’immeuble, à savoir :
- la fiche synthétique de l’immeuble ;
- le règlement de copropriété et l’état descriptif de division ainsi que les actes les modifiant, s’ils ont été publiés ;
- les procès-verbaux des assemblées générales des trois dernières années, sauf lorsque le copropriétaire vendeur n’a pas été en mesure d’obtenir ces documents auprès du syndic.

2°) Les informations financières suivantes (à noter qu’un arrêté ministériel est en attente) :
- le montant des charges courantes du budget prévisionnel et des charges hors budget prévisionnel payées par le copropriétaire vendeur au titre des deux exercices comptables précédant la vente ;
- les sommes susceptibles d’être dues au syndicat des copropriétaires par l’acquéreur ;
- l’état global des impayés de charges au sein du syndicat et de la dette vis-à-vis des fournisseurs ;
- lorsque le syndicat des copropriétaires dispose d’un fonds de travaux, le montant de la part du fonds de travaux rattachée au lot principal vendu et le montant de la dernière cotisation au fonds versée par le copropriétaire vendeur au titre de son lot.
Hormis ce qui concerne les sommes éventuellement dues au syndicat par l’acquéreur, les informations financières communiquées doivent être à jour de celles soumises à l’assemblée générale annuelle chargée d’approuver les comptes précédant la signature de la promesse de vente. Par ailleurs, lorsque la copropriété comporte moins de 10 lots à usage de logements, de bureaux ou de commerces et dispose d’un budget prévisionnel moyen sur trois exercices consécutifs inférieur à 15 000 € (les conditions sont ici cumulatives), les sommes susceptibles d’être dues au syndicat par l’acquéreur et l’état global des impayés de charges ainsi que la dette vis-à-vis des fournisseurs, n’ont pas à être communiqués.

3°) Le carnet d’entretien de l’immeuble.

4°) Une notice d’information relative aux droits et obligations des copropriétaires ainsi qu’au fonctionnement des instances du syndicat de copropriété. Un arrêté, non publié à ce jour, doit en déterminer le contenu.

5°) Le cas échéant, les conclusions du diagnostic technique.

Lorsque l’acquéreur est déjà propriétaire d’au moins un lot dans la copropriété, et ce quelle que soit la nature de ce lot, seules les informations financières sont à transmettre. De même, lorsque la vente porte sur un lot annexe ou une fraction de lot annexe, seuls la fiche synthétique de l’immeuble, le règlement de copropriété, l’état descriptif de division, leurs actes modificatifs publiés et l’ensemble des informations financières sont à transmettre. Est notamment considéré comme un lot annexe un emplacement de stationnement ou un local tel qu’une cave, un grenier, un débarras, un placard, une remise, un garage ou un cellier.



La transmission du “pré-état” daté


Les informations et documents visés doivent être transmis au plus tard à la date de signature de la promesse de vente. Lorsque les documents relatifs à l’organisation de l’immeuble et les informations financières n’ont pas été remis à l’acquéreur à cette date, le délai de rétractation de 10 jours permettant à l’acquéreur de changer d’avis et de renoncer finalement à conclure la vente voit son point de départ reporté dans le temps. Ce délai commence alors à courir à compter du lendemain de la communication de ces documents et informations à l’acquéreur (art. L. 271-3 CCH) au lieu du lendemain de la remise de la promesse de vente ou du courrier notifiant l’acte (art. L. 271-1 CCH).

A l’identique, dans l’hypothèse où la vente ne serait pas précédée d’une promesse, le fait de ne pas joindre à l’acte authentique les informations relatives à l’organisation de l’immeuble et à l’état global des impayés, dont la dette envers les fournisseurs, reporte dans le temps le point de départ du délai de réflexion de 10 jours, celui-ci ne commençant à courir qu’au lendemain de la communication de ces documents.

Les documents et informations sont à transmettre par lettre recommandée avec accusé de réception ou par remise en main propre.



La facturation du “pré-état” daté


Les prestations exceptionnelles du syndic sont limitativement énumérées, rendant impossible toute facturation d’un acte non expressément visé (art. 18-1 A de la loi du 10 juillet 1965 et décret n° 2015-342 du 26 mars 2015). Et si l’état daté est clairement mentionné dans le contrat type, il n’est fait nulle mention du pré-état daté ou des prestations qui en résultent. Un syndic ne peut donc inclure cette prestation dans son contrat pour justifier ensuite d’une rémunération. Le pré-état daté ne peut être facturé que si le demandeur s’est rapproché du syndic et que ce dernier lui a communiqué préalablement le montant de ses honoraires.

Mais ces débats sur la facturation ou non du pré-état daté devraient se tarir considérablement. En effet, les informations financières ainsi que les documents relatifs à la copropriété devront, à compter du 1er juillet 2020, figurer obligatoirement dans l’extranet proposé par le syndic (décret n° 2019-502 du 23 mai 2019). Tout un chacun sera ainsi à même de constituer lui-même le pré-état daté.

CLCV