[N°649] - Les emprunts en copropriété

par David Rodrigues - Juriste à l’association Consommation, Logement et Cadre de Vie (CLCV).
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La question de la souscription d’un emprunt en copropriété est souvent épineuse car elle renvoie à celle du paiement des intérêts qui en résultent. Selon les facultés financières de chacun, il n’est pas rare de voir des copropriétaires refuser un emprunt dont les intérêts alourdiraient le coût de l’opération finale alors qu’ils disposent des moyens permettant d’acquitter comptant leur quote-part. Or, avec la réalisation de travaux d’économie d’énergie, opération forcément coûteuse, la question de la souscription d’un emprunt est plus que jamais d’actualité.

Le principe : l’unanimité…
L’assemblée générale ne peut, sauf à l’unanimité des voix des copropriétaires, décider la souscription d’un emprunt au nom du syndicat des copropriétaires pour le financement :
- soit de travaux régulièrement votés concernant les parties communes ;
- soit de travaux régulièrement votés d’intérêt collectif portant sur les parties privatives ;
- soit des actes d’acquisition conformes à l’objet du syndicat et régulièrement votés.

Le législateur a très clairement montré sa réticence de principe à un emprunt collectif, l’unanimité étant quasiment impossible à obtenir. Cependant, cette position n’est qu’apparente, des exceptions ayant été prévues.

… sauf dans certains cas
La décision de souscrire un emprunt est votée à la même majorité que celle nécessaire au vote des travaux concernant les parties communes ou de travaux d’intérêt collectif sur parties privatives, lorsqu’il a pour unique objectif le préfinancement de subventions publiques accordées au syndicat pour la réalisation des travaux en question. Sont ici visées les aides financières qui peuvent être versées mais sur facture acquittée. C’est notamment le cas pour la réalisation de travaux d’économie d’énergie. Autrement dit, cette faculté permet en quelque sorte de préfinancer les travaux. En toute logique, le montant de l’emprunt ne porte alors que sur le montant de la subvention et non l’intégralité de l’opération.

De même, l’assemblée générale peut, toujours à la même majorité que celle nécessaire au vote soit des travaux concernant les parties communes ou des travaux d’intérêt collectif sur parties privatives, soit des actes d’acquisition conformes à l’objet du syndicat, voter la souscription d’un emprunt au nom du syndicat des copropriétaires. L’emprunt ne se fera cependant qu’au bénéfice des seuls copropriétaires décidant d’y participer. Sur ce point, on notera que les textes font un renvoi à la majorité fixée pour le vote de l’opération (travaux, acquisition…) et ne définissent pas les personnes qui peuvent prendre part audit vote. Cela signifie que l’ensemble de l’assemblée générale va être amenée à se prononcer sur le recours à un emprunt, lequel ne concernera que quelques personnes uniquement. La démarche peut paraître surprenante puisqu’un refus (hypothétique en pratique mais possible toute de même, surtout en cas de tensions entre les habitants) pourrait potentiellement mettre en difficulté certains copropriétaires, notamment des primo-accédant dont le pouvoir d’achat est limité.

L’emprunt proprement dit
Le projet de prêt doit être joint à la convocation de l’assemblée générale. Les copropriétaires qui souhaitent recourir à l’emprunt doivent notifier leur décision au syndic en précisant le montant qu’ils entendent solliciter, dans la limite de leur quote-part des dépenses. A peine de forclusion, la notification au syndic doit intervenir dans le délai de deux mois :
- à compter de la notification du procès-verbal d’assemblée générale pour les copropriétaires opposants ou défaillants ;
- à compter de la tenue de l’assemblée générale pour les autres copropriétaires.

L’emprunt est contracté par le syndic, au nom du syndicat. L’acte ne peut être signé avant l’expiration du délai de recours de deux mois, prévu pour la contestation des résolutions de l’assemblée générale.

Seuls les copropriétaires bénéficiant de l’emprunt sont tenus d’y participer, à hauteur de leur quote-part. Cette participation porte non seulement sur le montant même de la somme empruntée, mais également sur les intérêts, frais et honoraires y afférents. Ces frais accessoires sont répartis entre les copropriétaires à proportion du montant de leur emprunt.

Le cautionnement du syndicat des copropriétaires
Le syndicat est garanti en totalité, sans franchise et sans délai de carence, par un cautionnement solidaire après constat de la défaillance d’un copropriétaire bénéficiant de l’emprunt et ce pour l’ensemble des sommes concernées (en principal et accessoires, tels les intérêts).

Le cautionnement solidaire ne peut résulter que d’un engagement écrit fourni par une entreprise d’assurance spécialement agréée, par un établissement de crédit, une société de financement ou par une institution expressément visée par les textes à savoir le Trésor public, la Banque de France, La Poste, l’institut d’émission des départements d’outre-mer, l’institut d’émission d’outre-mer et la Caisse des dépôts et consignations. Pour la validité même de la décision, l’engagement de caution doit obligatoirement être communiqué aux copropriétaires en même temps que l’ordre du jour de l’assemblée générale.

Ce cautionnement est obligatoire sauf lorsque le prêt a pour unique objectif le préfinancement de subventions publiques.

Emprunt et mutation
En cas de mutation entre vifs (vente ou donation par exemple), et même si cette mutation est réalisée par voie d’apport en société, les sommes restant dues par le copropriétaire au titre du remboursement de l’emprunt ainsi que du paiement des accessoires deviennent immédiatement exigibles. Toutefois, en cas d’accord du prêteur et de la caution, l’obligation de payer ces sommes peut être transmise au nouveau copropriétaire s’il le désire. Le notaire doit alors en informer le syndic.