Si la réduction des émissions de gaz à effet de serre et de l’utilisation des hydrocarbures passe principalement par la réalisation de travaux d’économie d’énergie, le législateur fait montre d’une volonté expansionniste en la matière pour qu’une telle réflexion puisse s’inscrire dans les actes de la vie courante. Pour preuve, les réformes successives relatives au rechargement de véhicules électriques censées faciliter et développer leur utilisation. Malheureusement, les textes ne sont pas toujours aussi clairs que l’intention de leurs auteurs…
L’inscription d’une question ad hoc à l’ordre du jour
L’article 24-5 de la loi du 10 juillet 1965 dispose :
«Lorsque l'immeuble possède des emplacements de stationnement d'accès sécurisé à usage privatif et n'est pas équipé […] des installations électriques intérieures permettant l'alimentation de ces emplacements pour permettre la recharge des véhicules électriques ou hybrides ou des installations de recharge électrique permettant un comptage individuel pour ces mêmes véhicules, le syndic inscrit à l'ordre du jour de l'assemblée générale la question des travaux permettant […] la recharge des véhicules électriques ou hybrides et des conditions de gestion ultérieure du nouveau réseau électrique, ainsi que la présentation des devis élaborés à cet effet.»
Le syndic a, de fait, l’obligation de soumettre une résolution relative au rechargement des véhicules électriques à l’assemblée générale. Mais, en aucun cas, cette dernière n’est tenue de réaliser les travaux.
L’inscription de cette question ne concerne cependant pas toutes les copropriétés : en toute logique, ne sont visées que celles dotées d’emplacements de stationnement. L’article 24-5 précité va même plus loin et fait référence à des «emplacements de stationnement d’accès sécurisé à usage privatif». Si l’on imagine très bien le cas des immeubles comprenant un parking avec des places numérotées individuelles, constituant des parties privatives, qu’en est-il lorsque les places ne sont pas individualisées, chaque occupant se garant en fonction des emplacements disponibles ? Le texte ne fait effectivement pas référence à des «parties privatives» mais à un «usage privatif». Dans une telle hypothèse, le comptage individuel du rechargement des véhicules électriques risque d’être complexe, voire impossible, de sorte que l’on peut légitimement penser que l’obligation d’inscrire une résolution sur ce sujet ne s’applique pas ici.
Autre problème d’interprétation des textes, la référence à un accès «sécurisé». Cela signifie que l’accès au parking doit être limité (existence de portes automatiques, barrière, plots…) et autorisé uniquement aux résidants ou à toute personne disposant d’un pass. Dans l’hypothèse, bien que rare désormais dans la pratique, où l’accès ne serait pas sécurisé malgré l’existence de places de stationnement individualisées, le syndic ne serait pas tenu de procéder à l’inscription de cette résolution à l’ordre du jour de l’assemblée générale.
Le vote des travaux
Au lendemain de la loi ALUR de 2014, «l'installation ou la modification des installations électriques intérieures permettant l'alimentation des emplacements de stationnement d'accès sécurisé à usage privatif pour permettre la recharge des véhicules électriques ou hybrides, ainsi que la réalisation des installations de recharge électrique permettant un comptage individuel pour ces mêmes véhicules» relèvent de la majorité de l’article 25 (art. 25j Loi 10 juillet 1965).
En 2015, la loi relative à la transition énergétique modifie l’article 24 de la loi de 1965 et soumet à cette majorité «la décision d'équiper les places de stationnement couvertes ou d'accès sécurisé avec des bornes de recharge pour véhicules électriques» (art. 24i). Mais les dispositions apportées par la loi ALUR ne sont pas supprimées… La question de l’articulation de ces textes se pose alors. S’agit-il d’une maladresse du législateur ou d’une volonté de soumettre à deux majorités distinctes des opérations différentes ? Il est intéressant de noter que le rapport de la Commission spéciale de l’Assemblée nationale pour l’examen du projet de loi relatif à la transition énergétique fait référence à une diminution de la majorité applicable, passant ainsi de la 25 à la 24, afin de favoriser la réalisation de ces travaux (rapport AN 2230, Tome 1, enregistré le 27 septembre 2014). L’intention du législateur est donc claire : pour lui, les travaux relatifs à la recharge des véhicules électriques relèvent de la majorité de l’article 24.
Malgré cela, le défaut d’articulation entre les dispositions existantes est bien réel et les différences rédactionnelles entre les articles 24i et 25j ne facilitent pas la réflexion. D’aucuns ont souligné la possibilité de scinder les travaux en deux opérations distinctes, chacune relevant alors d’une majorité différente. Relèverait ainsi de l’article 25, la décision concernant l’installation électrique puis, de l’article 24, la pose des bornes. Le raisonnement est intéressant car il respecte la lettre du texte, mais il s’écarte complètement de la volonté du législateur. Ce dernier souhaitait faciliter les travaux permettant de recharger les véhicules électriques ; il les a complexifiés puisque deux résolutions distinctes soumises à deux majorités différentes sont désormais nécessaires.
Le cas du locataire ou occupant de bonne foi
L’article R. 136-2 du Code de la construction et de l’habitation permet aux locataires et aux occupants de bonne foi de réaliser des travaux destinés à recharger des véhicules électriques ou hybrides avec un système permettant une facturation individuelle des consommations. Il doit alors en informer le propriétaire ainsi que le syndic. Dans le délai de 3 mois suivant la réception de la demande, le copropriétaire notifie au syndic sa demande d'inscription de la question à l'ordre du jour de la prochaine assemblée générale. La copropriété dispose de six mois pour s’opposer aux travaux ; elle peut également décider de les réaliser, mais pour l’ensemble des places de stationnement.