[N°632] - La participation aux assemblées générales

par David Rodrigues, Juriste à l’association Consommation, Logement et Cadre de Vie (CLCV)
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Il est une question que peu se posent tant la réponse semble évidente : toute personne peut-elle assister à une assemblée générale ? Et très rapidement de se rendre compte que d’aucuns répondront par la négative, d’autres par l’affirmative. En fait, la réalité se trouve, comme souvent, entre ces deux extrêmes.


Est-il possible pour des personnes étrangères à la copropriété d’assister à une assemblée générale ? Il est vrai que l’on pourrait tout à fait concevoir que l’accès à cette manifestation soit restreint en raison de son caractère privé. Pourtant, des tiers au syndicat participent régulièrement aux assemblées générales sans que cela ne pose forcément de problèmes, voire sans que des copropriétaires ne s’en étonnent. En fait, tout dépend de la «nature», en quelque sorte, de cette tierce personne.


Les copropriétaires avant tout

C’est une évidence. Les copropriétaires peuvent assister aux assemblées générales, sans que ce droit ne puisse être remis en cause. Cela signifie que l’absence de convocation d’un copropriétaire entraîne l’annulation de l’assemblée générale (CA Montpellier, 8 septembre 2015), et ne peut être régularisée (CA Paris, 31 mars 1995). Il importe d’ailleurs peu de rechercher si les voix des copropriétaires non convoqués auraient pu ou non avoir une incidence sur le résultat des votes (Cass. 3e civ., 25 juin 1997). De même, encourt la nullité l’assemblée générale qui s’est tenue «en l'absence de copropriétaires expulsés manu militari par les autres copropriétaires» (CA Paris, 2 février 2006).
Plus subtil, il faut que chaque copropriétaire puisse matériellement, physiquement, accéder au lieu de réunion. Dans une affaire, un syndic a vu sa responsabilité engagée pour avoir convoqué l’assemblée générale dans une salle non-accessible aux personnes handicapées, malgré la demande d’un copropriétaire. Les juges ont estimé que l’assemblée générale ne pouvait être annulée, «les dispositions de l'article 9 du décret du 17 mars 1967 ayant été respectées et aucune autre violation d'une disposition particulière du règlement de copropriété invoquée». Toutefois, la décision du syndic ouvre le droit à une demande en dom- mages et intérêts (CA Aix-en-Provence, 6 avril 2012).


Les mandataires

Un copropriétaire peut donner mandat à toute personne de son choix (hormis au syndic, son conjoint, son partenaire lié à lui par un PACS, et à ses préposés), qu’elle soit membre ou non du syndicat pour le représenter à l’assemblée générale (art. 22 loi du 10 juillet 1965). Il est donc tout à fait possible pour un locataire de représenter son bailleur.
Celui qui détient un mandat ne peut se voir refuser l’accès à l’assemblée, cette possibilité étant expressément prévue par les textes. La Cour de cassation a d’ailleurs estimé que la possibilité pour un copropriétaire de participer à une assemblée générale ou de s’y faire représenter constitue «un droit fondamental [dont l’atteinte] entraîne la nullité des décisions prises» (Cass. civ. 3e, 22 février 1989).


Et les autres ?

En dehors de ces hypothèses qui ne posent que ponctuellement des difficultés, une personne étrangère à la copropriété peut- elle assister à l’assemblée générale ?
Il est généralement admis que le proche d’un copropriétaire, quand bien même ne détiendrait-il aucun droit sur aucun lot du syndicat, peut assister à l’assemblée générale. Il en est ainsi du conjoint (dans le cadre d’un achat acquis en propre par l’un des époux), du concubin, ou même d’un membre de la famille, tel un descendant. On peut d’ailleurs noter que les membres du conseil syndical peuvent être désignés parmi les copropriétaires, mais également parmi leur conjoint ou partenaire lié par un PACS (art. 21 loi du 10 juillet 1965). Cela démontre bien la possibilité, pour ces personnes, d’assister à l’assemblée générale. Dans les autres cas, contrairement à ce que l’on pourrait penser, l’accès aux assemblées générales de copropriété n’est nullement règlementé et aucun texte n’interdit la présence de tiers (Cass. 3e civ., 29 mars 2000). S’il est bien précisé selon quelles modalités les copropriétaires doivent être convoqués, il n’est aucunement indiqué si d’autres personnes peuvent y participer ou non. Ainsi, a-t-il été jugé que la convocation de tiers à la copropriété ne constitue pas une irrégularité de nature à entraîner l’annulation de l’assemblée générale dès lors qu’ils n’ont pas voté (Cass. 3e civ., 31 mai 2012).
De même, la présence d’un huissier avec une sténotypiste ne saurait entraîner l’annulation de l’assemblée générale (CA Paris, 23 octobre 1990), tout comme la participation passive d’un avocat (CA Orléans, 15 juin 2009).
L’assemblée générale demeure libre d’accepter ou non la présence de ces personnes étrangères à la copropriété. Cela ressort clairement de l’arrêt du 29 mars 2000 précité puisque la Haute juridiction fait expressément référence à «l’absence de protestation de nature à provoquer une délibération spéciale sur ce point». Autrement dit, la présence de tiers est possible, sauf si un copropriétaire manifeste son opposition. Dans ce cas, un vote de l’assemblée générale statuant à la majorité de l’article 24 pourra être organisé sur cette question.


Un cas particulier : le représentant des locataires

Dans une hypothèse bien précise, les textes prévoient expressément la possibilité pour un tiers d’assister à l’assemblée générale. L’article 44 de la loi du 23 décembre 1986 tendant à favoriser l’investissement locatif dispose que «dans les immeubles soumis au statut de la copropriété, les représentants des associations de locataires peuvent assister à l’assemblée générale et formuler des observations sur les questions inscrites à l’ordre du jour».
Bien que cette situation concerne, dans la pratique, le cas des copropriétés HLM résultant de la vente par le bailleur social d’un ou plusieurs de ses lots, elle peut tout à fait se présenter au sein d’une copropriété classique. On notera que le représentant est ici «invité» à l’assemblée générale et non «convoqué». Autrement dit, les règles relatives aux modalités de convocation ne sont pas applicables (délai de 21 jours,...).