La création d’un fonds de travaux obligatoire était loin d’aller de soi, d’aucuns y voyant une épargne forcée à la constitutionnalité douteuse. En s’inspirant du rapport de Dominique Braye, alors président de l’ANAH, “Prévenir et guérir les difficultés des copropriétés” (janvier 2012), les auteurs de la loi ALUR ont surtout voulu tenter une nouvelle approche de la gestion prévisionnelle des travaux, les dispositions applicables jusqu’alors n’ayant pas forcément eu le succès escompté.
Les immeubles concernés
Sont tenues à la création d’un fonds de travaux, les copropriétés à destination totale ou partielle d’habitation, à l’issue d’une période de 5 ans suivant la date de réception des dits travaux (art. 14-2 II Loi 10 juillet 1965). Passé ce délai, le fonds devra être institué.
Les immeubles ayant réalisé un diagnostic technique global et dont les conclusions ne font apparaître aucun besoin de travaux dans les 10 prochaines années ne sont pas tenus à la mise en place du fonds de travaux pendant ce délai. Pour mémoire, le diagnostic technique global n’est obligatoire que lors de la mise en copropriété d’un immeuble construit depuis plus de 10 ans. Dans les autres cas, il est facultatif et fait l’objet d’un vote de l’assemblée générale statuant à la majorité de l’article 24 de la loi du 10 juillet 1965 (art. L. 731-1 et L. 731-4 Code de la construction et de l’habitation).
Enfin, lorsque la copropriété comporte moins de dix lots, le syndicat peut décider de ne pas constituer de fonds de travaux par une décision unanime de l'assemblée générale. En l’absence de précisions, doit être pris en compte l’ensemble des lots, quelle que soit leur nature : logement, local professionnel, mais également cave ou place de stationnement par exemple. On notera que la dispense de création du fonds de travaux se fait à une nouvelle majorité : l’unanimité de l’assemblée générale. D’ordinaire, l’unanimité est qualifiée par rapport à l’ensemble des copropriétaires (voir notamment l’article 11 de la loi de 1965). En faisant référence à la seule assemblée générale, le législateur a voulu ne prendre en compte ici que les voix des copropriétaires présents ou représentés. L’unanimité pourra donc être obtenue malgré l’absence d’un copropriétaire.
La mise en place du fonds de travaux
Le fonds de travaux est alimenté par une cotisation annuelle obligatoire versée par les copropriétaires selon les mêmes modalités que celles décidées par l'assemblée générale pour le versement des provisions du budget prévisionnel (art. 14-2 II Loi 10 juillet 1965), c’est-à-dire le premier jour de chaque trimestre ou de la période fixée par l’assemblée générale (art. 14-1, Loi du 10 juillet 1965).
Le montant de cette cotisation est de 5 % minimum du budget prévisionnel, mais l’assemblée générale peut opter pour un taux supérieur par un vote à la majorité de l’article 25 et, le cas échéant, 25-1. Le fonds de travaux est obligatoire de sorte que la question relative à sa création n’a pas à être soumise à l’assemblée générale (sauf pour les petites copropriétés, cf. supra). Cette dernière ne peut se prononcer que sur le taux de la cotisation.
Le fonds de travaux doit être mis en place depuis le 1er janvier 2017 : les résolutions relatives à la cotisation ont donc normalement dues être inscrites à l’ordre du jour des assemblées générales de 2016.
Les cotisations sont versées sur un compte ouvert auprès du même établissement bancaire que celui destiné à recevoir toutes les sommes ou valeurs perçues au nom du syndicat. Toutefois, si pour ce dernier le syndic peut solliciter une dispense pour ouvrir un compte à son nom, cela est impossible pour celui destiné à recueillir les cotisations du fonds de travaux : le compte est obligatoirement séparé et la méconnaissance par le syndic de cette obligation emporte la nullité de plein droit de son mandat à l'expiration du délai de trois mois suivant sa désignation (art. 18 II, Loi 10 juillet 1965).
D’un point de vue comptable, les décret et arrêté du 14 mars 2005 ont été modifiés afin de tenir de permettre au syndic de passer les différentes écritures relatives au fonds de travaux.
Comme souvent, le législateur n’a pas prévu de sanction spécifique en cas d’absence de mise en place de ce fonds. Cette mesure n’en devient pas pour autant facultative, même si l’absence de dispositions contraignantes expresses peut nuire à son effectivité.
Enfin, contrairement aux anciennes provisions spéciales, les sommes versées au titre du fonds de travaux sont attachées aux lots et définitivement acquises au syndicat : elles ne donnent lieu à aucun remboursement lors de la cession d'un lot. Il appartiendra alors au vendeur de valoriser, dans le prix de vente, le montant de sa cotisation auprès de l’acquéreur.
L’objet du fonds de travaux
Le fonds de travaux est destiné à faire face :
- aux travaux obligatoires prescrits par les lois et règlements ;
- aux travaux non compris dans le budget prévisionnel.
Il ne peut donc être utilisé pour les dépenses de fonctionnement usuel, les petites réparations ou combler un budget prévisionnel dont le montant aurait été sous-évalué. L’affectation des sommes déposées sur le fonds de travaux doit obligatoirement être décidée préalablement par l’assemblée générale statuant à la majorité de l’article 25 et, le cas échéant, de l’article 25-1 25-1. Cette autorisation peut, toutefois, être fournie a posteriori, aux mêmes conditions de majorité, lorsque le syndic, dans un cas d’urgence, a fait procéder de sa propre initiative à l'exécution de travaux nécessaires à la sauvegarde de l'immeuble.
Lorsque le montant du fonds de travaux atteint un montant supérieur au budget prévisionnel, le syndic doit inscrire à l'ordre du jour de l'assemblée générale :
1° La question de l'élaboration du plan pluriannuel de travaux reprenant les conclusions du diagnostic technique global ;
2° La question de la suspension des cotisations au fonds de travaux, en fonction des décisions prises par l'assemblée générale sur le plan pluriannuel de travaux.
S’il y a obligation de mettre ces résolutions au vote, l’assemblée générale demeure libre de son choix.